Chroniques

Macron, Barnier et le Maroc !

Mustapha Tossa Journaliste éditorialiste

Le couple Macron /Barnier est une belle opportunité politique pour le Maroc qui intervient à un moment crucial où la diplomatie française a fait le choix raisonné et réfléchi du réalisme politique.

La nomination de Michel Barnier au poste de Premier ministre est une bonne nouvelle pour le Maroc. Non seulement il ne risque pas de s’opposer ou de compliquer la nouvelle stratégie de Macron sur le Maroc, mais c’est une certitude, il va la consacrer et la renforcer. Michel Barnier, un républicain, est connu depuis longtemps pour avoir des convictions qui soutiennent la souveraineté du Maroc sur son Sahara. Il est un compagnon notoire de Jacques Chirac, resté dans les mémoires collectives comme le président le plus pro marocain de ces dernières décennies. C’est donc un bel alignement des planètes politiques qui s’organise actuellement à Paris et qui va donner à la relation franco-marocaine le grand lustre qu’elle mérite et qui lui fait défaut depuis le froid glacial qui l’a paralysée depuis des années. Le 30 juillet dernier, alors que la recherche d’un Premier ministre battait son plein, Emmanuel Macron avait opéré le grand tournant de la diplomatie français à travers la lettre qu’il avait adressée au Roi du Maroc à l’occasion du vingt cinquième anniversaire de son accession au Trône. En réponse à cette missive, le Roi Mohammed VI lui adressa une invitation officielle à venir effectuer une visite d’Etat au Maroc. Tant que le Premier ministre n’était pas nommé et le gouvernement formé, il était hors de question d’établir le moindre agenda diplomatique pour cette visite importante destinée à sacrer ce tournant historique. Maintenant que le ciel est dégagé, que Michel Barnier va conduire, au moins pour un temps, les affaires de la France, Paris et Rabat peuvent envisager d’ouvrir cette nouvelle séquence diplomatique pour donner la grande accélération très attendue à leur partenariat stratégique.
Avec un homme au pedigree politique de Michel Barnier, tout se fera dans l’harmonie et la cohérence, plus encore dans une forme d’enthousiasme. Il est vrai que les choix diplomatiques de la France font partie du domaine réservé du président de la république, mais il est tout aussi vrai que cette mission aurait connu quelques complications et quelques lenteurs si Emmanuel Macron avait choisi un Premier ministre au tropisme algérien bien prononcé. Avec Michel Barnier, la relation avec le Maroc sera pavée des meilleures décisions. Au risque d’approfondir l’ire du régime algérien qui voit en ce choix pour Matignon un signe supplémentaire d’alignement de la France en faveur du Maroc.
Aujourd’hui, plus que jamais la diplomatie marocaine est impatiente, à raison d’ailleurs, de transformer l’essai et de traduire le tournant diplomatique français en actes politiques irréversibles. Cela commence certainement par l’organisation de cette fameuse visite d’Etat d’Emmanuel Macron au Maroc et dont une des annonces symboliques les plus probables sera l’ouverture d’un grand consulat français dans ces territoires du Sahara marocain. Cela se poursuivra aussi par l’accélération des rythmes des visites ministérielles entre les deux pays pour donner à la coopération économique, culturelle, humaine entre les deux pays une ampleur et une dimension à la hauteur des enjeux de leur partenariat renouvelé. Le couple Macron /Barnier est une belle opportunité politique pour le Maroc qui intervient à un moment crucial où la diplomatie française a fait le choix raisonné et réfléchi du réalisme politique. Ce choix sortait la France d’une longue séquence de flou diplomatique, d’indécisions et d’hésitations. Ce couple aura non seulement à trouver les meilleures manières de magnifier la relation franco-marocaine mais aussi en même temps à gérer une crise devenue structurelle dans ses rapports avec le régime algérien. Il est de notoriété publique que la diplomatie française au Maghreb subit un effet de balancier qui change les rapports de force au gré de la météo politique régionale.
Celle qui souffle aujourd’hui porte en elle des vents favorables au Maroc.
D’ailleurs, le rapport au Maghreb est un des dossiers à la fois les plus lourds et les plus effervescents que la diplomatie française aura à traiter une fois le nouveau gouvernement dirigé par Michel Barnier installé. Il s’agirait de procéder, non seulement en paroles mais en actes aussi, à des clarifications aussi bien à l’égard du Maroc qu’à l’égard du régime algérien avec à sa tête Abdel-Majid Tebboune prolongé pour un second mandat. Un exercice de diplomatie qui ne fera pas peur à Michel Barnier, l’homme qui a négocié un des divorces les plus douloureux de l’Europe contemporaine, le Brexit.

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