Chroniques

Maroc-Algérie : Les conditions d’une réconciliation

Mustapha Tossa Journaliste éditorialiste

Pour justifier son refus de répondre favorablement à ces médiations, le régime algérien avait lancé une surenchère dans les processus des accusations formulées contre le Maroc, dans leur totalité fantaisistes et irréelles.

Alors que les relations entre les deux pays sont en dents de scie, plus le Maroc tend la main de la réconciliation, plus le régime algérien monte sur ses chevaux, l’hypothèse d’une brusque embellie n’est pas à exclure, même si elle paraît impossible dans le contexte actuel.
Depuis que de nombreux pays et non des moindres avaient tenté une médiation entre Alger et Rabat, avec le non-succès que l’on connaît, le régime algérien était acculé dans ses postions tranchées. Pour justifier son refus de répondre favorablement à ces médiations, le régime algérien avait lancé une surenchère dans les processus des accusations formulées contre le Maroc, dans leur totalité fantaisistes et irréelles.
C’est ainsi qu’Alger avait accusé le Maroc tour à tour de noyer le territoire algérien de drogues cultivées au Maroc, d’initier des incendies en Kabylie, de soutenir le mouvement d’autonomie kabyle, de participer à des complots externes pour déstabiliser l’Algérie. Avec une mentalité d’assiégé, le régime algérien tente de s’inventer tous les prétextes les plus fallacieux pour justifier son refus d’entamer le moindre rapprochement avec le Maroc.
Face à cette attitude de refus d’une radicalité algérienne inédite, le Maroc oppose une politique d’ouverture. Non seulement l’Etat marocain et ses médias officiels s’interdisent toute campagne de dénigrement, comme les médias algériens sont devenus maître à l’encontre du Maroc, mais le Roi du Maroc Mohammed VI ne rate aucune occasion pour tendre la main de réconciliation avec l’Algérie, inspiré par l’incontournable fraternité entre les deux peuples.
Cette disponibilité marocaine provoque un double effet. Elle plait aux citoyens algériens qui ne voient pas les raisons objectives de cette animosité chronique du régime à l’égard du Maroc. Elle met dans l’embarras l’appareil militaire algérien qui, pour justifier son refus de la main marocaine tendue, élève le plafond de ses exigences à l’égard du Maroc. Ainsi, souvent dans une presse reflétant les états d’âme des cercles du pouvoir en Algérie, il est souvent formulé comme condition de retour à la normale dans les relations entre les deux pays, la nécessité pour le Maroc de mettre fin à son alliance avec Israël.
Cette demande algérienne est une vraie illusion d’optique. Non seulement l’alliance entre le Maroc et Israël invoquée comme condition sine qua non de réconciliation est postérieure à la crise entre Alger et Rabat, mais elle sert uniquement de muraille de fumée pour camoufler les vraies raisons de cette abstinence algérienne à normaliser les relations avec le voisin marocain.
En fait les vraies raisons de cette paralysie algérienne envers le Maroc sont à trouver dans ce que représente aujourd’hui le Polisario dans l’architecture du pouvoir en Algérie. Le régime militaire algérien a fait du dossier du Polisario une raison d’exister et dont la disparition provoquerait d’énormes remises en cause. Il ne s’agit pas, comme pour certains pays, la croyance en une aventure séparatiste qui pourrait se terminer aussi bien par une concrétisation que par une évaporation du rêve séparatiste. Il s’agit de la survie de tout un système militaire en Algérie. Ou la crise du Polisario dure et ce même système est assuré de survivre. Ou le Polisario se fend dans l’option de l’autonomie proposée par le Maroc et le régime militaire algérien se liquéfie de l’intérieur et perd officiellement sa raison d’exister.
Aujourd’hui une des questions majeures qui se pose autour de cette expérience algérienne de soutien absolu à un mouvement séparatiste qu’elle couve sur son territoire est la suivante : comment l’armée algérienne pourra-t-elle gérer le casse-tête du Polisario et de ces milices armées une fois éteintes par la communauté internationale toutes les pulsions séparatistes du régime algérien ?
Les hypothèses qui découlent de cette interrogation annoncent une séquence sécuritaire algérienne d’une grande sensibilité. Non seulement se posera à l’armée algérienne la nécessité de reprendre le contrôle des territoires offerts gracieusement aux milices du Polisario, mais se posera aussi avec une grande acuité la nécessité de désarmer ces milices et de contrôler leurs postures et leurs agendas.
Les conditions de réconciliation entre Alger et Rabat passent inévitablement par l’indispensable disparition du Polisario de cette région. Le Maroc y travaille sur le plan international avec une redoutable efficacité. Le point énigmatique de cette crise est de savoir comment ce régime algérien, qui semble abord lié son destin au Polisario, pourra gérer et inter-réagir avec le rouleau compresseur marocain.

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