Chroniques

Mieux vaut en rire : Liberté-égalité-intimité

© D.R

Je vous avoue que j’ai un peu hésité avant d’aborder le sujet d’aujourd’hui. Ce que vous ne savez pas et que je vais vous dévoiler tout de suite, c’est que malgré mes côtés frondeur, cabotin et boute-en-train, je suis quelqu’un de timide et même de pudique. D’ailleurs ceux et celles qui me connaissent bien m’ont rarement entendu dire en public un gros mot, ou ce qu’on appelle comme tel,  ni juste de l’écrire. C’est vous dire… Cela dit, je suis loin d’être parfait même si tous les mots que je n’ose pas dire, je les connais par cœur, et j’y pense parfois si fort que je rougis tout seul. En fait, quand je dis «parfait», je ne veux pas insinuer que ceux et celles qui ne se retiennent pas et appellent les choses par leurs noms seraient des gens «imparfaits». Bien au contraire. Où veux-je en venir? J’y viens. Hier, dans mon désormais célèbre petit «Mot pour rire», ici même, j’avais soulevé la levée de boucliers d’un de notre éminent penseur du théâtre dit «festif», suite à la dernière représentation d’une pièce qui sort un peu des sentiers battus, et qui s’intitule, tout simplement et tout pudiquement : «Diali» («Le mien»). Si vous ne le savez pas encore, je vais vous l’apprendre: «Diali» est une adaptation plus ou moins libre de l’œuvre française qui a fait couler beaucoup d’’encre, y compris dans l’Hexagone, et qui s’appelle, très librement et très ouvertement: «Le monologue du vagin» (Oh ! Je rougis!). Revenons-en à notre grand auteur-chercheur. Si j’en reparle aujourd’hui, c’est parce qu’il est revenu à la charge dans une interview où il va jusqu’à affirmer, sans rougir, que  «le théâtre sert à guérir les maladies sociales, culturelles et politiques; quant aux personnes qui souffrent de complexes psychiques ou sexuels, elles doivent aller à la clinique spécialisée la plus proche pour se faire soigner». Fin de citation. Je vous assure que j’ai traduit sa déclaration presque mot pour mot. Donc, si on en croit notre éclairé professeur, que Dieu renforce et accentue «ses lueurs», tout artiste qui aborde dans son œuvre un sujet «sexuel» est un névrosé notoire et dangereux, qu’il faudrait enfermer au plus vite pour préserver la sécurité des citoyens et assurer le secret de leur intimité. Il faut être dingue pour penser et s’exprimer comme ça ! Oui, j’exagère peut-être, mais c’est lui qui a commencé. En vérité, il n’est pas le seul. Un autre de nos éminents hommes de théâtre préhistorique a refait une apparition à cette occasion. Lui, il est allé encore plus loin : il accuse tous ces artistes trop libérés pour ne pas dire libertins, qu’ils «sont financés par des forces étrangères qui ont pour but de porter atteinte à nos valeurs sociales et à notre identité nationale». Rien que ça ? Et pourquoi pas, puisque vous y êtes, notre «intégrité territoriale» ?  Blague à part, j’aurais bien voulu que ces penseurs bien pensants se soulèvent autant quand Amina Filali et bien d’autres se font violer au grand jour, et sans rectangle blanc sur l’écran, ou quand de pauvres femmes ou jeunes filles accouchent, toute intimité dehors, dans des parcs, des terrains vagues ou même, parfois, devant les portes de certains hôpitaux inhospitaliers. Pourquoi ils n’ont jamais dit un seul mot contre le harcèlement sexuel que subissent dans la rue, à chaque moment, nos filles, nos sœurs, nos femmes, voire nos mères? Parce que ce sont des femmes ? Parce que ce n’est pas de «la culture», hein ? Vous savez ce que j’ai envie de leur dire, à ces redresseurs de torts à tort ? Ce qu’on dit souvent chez nous quand on ne trouve rien à dire devant des imbécilités : «Que Dieu maudisse celui qui n’a pas honte !». Amen. Bon week-end les artistes, et bon débarras, les autres.

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