On peut les interpréter comme ça nous arrange. Il y en a un que j’affectionne particulièrement, c’est le fameux : «Dkhoul l’Hammam machi b7al khroujou». Je n’ai jamais su le traduire, mais je pense qu’on pourrait lui donner 1000 et une significations. Je vais commencer par celle au 1er degré : «On rentre sale dans un bain, et on en sort tout propre».
Oui, c’est une lapalissade, même si la propreté n’est pas toujours garantie, ne serait-que parce que certains de nos hammams sont limites crades. Avant d’évacuer ce premier sens plutôt primaire, permettez-moi de remonter juste un petit chouia et dire qu’on peut également lui donner une interprétation mystico-religieuse : laver ses péchés, se débarrasser de ses mauvaises actions, se repentir quoi…
Enfin, c’est juste une proposition comme une autre… Justement, voyons s’il n’y a pas d’autres explications plus profondes car nos ancêtres étaient peut-être vieux, mais pas stupides. D’abord, je vais essayer de retraduire ce proverbe. Je vais tenter le mot-à-mot. «Dkhoul l’Hammam machi b7al khroujou». Littéralement ça veut dire : «la sortie du hammam n’est pas comme son entrée», ou si vous préférez, «Sortir du hammam n’est pas comme y entrer». Franchement, ça ne nous avance pas beaucoup…
Pour tout vous avouer, si je suis passé par toutes ces circonvolutions si sinueuses, c’est parce que j’ai une envie folle de vous parler de cette étrange histoire de demande de rapatriement de l’argent sorti à l’étranger. Je crois que j’ai déjà eu l’occasion de donner mon avis là-dessus, ici ou ailleurs. Oui, c’est vraiment une très bonne idée – ne serait-ce que pour alimenter nos caisses qui crient famine – de demander à tous ces malins et malignes (J’aurais pu écrire «gredins et gredines», mais je ne l’ai pas fait pour ne pas trop les froisser) qui ont profité de la confiance parfois aveugle de nos garde-frontières, pour s’éclipser tranquillement avec les poches, ou même, m’a-t-on rapporté, des valises pleines de blé pour le placer en lieu sûr mais inconnu. Pour ma part, n’aimant pas les procès d’intention, je préfère me focaliser sur les «sorteurs» plutôt qu’incriminer injustement et sans preuves les pauvres contrôleurs.
Non, je ne suis pas devenu politiquement correct, mais entre un «sorteur repenti» qui avouerait d’une manière ou une autre son délit, et une autorité qui aurait fermé les yeux ou se serait endormie au moment de la sortie, mon cœur pencherait tout normalement du côté de cette autorité même somnolente. D’ailleurs je ne vous cache pas que je suis très attendri par cette naïveté plus que candide qui croyait qu’il suffisait de montrer la carotte du pardon et de l’impunité pour voir plein de containers bourrés de fric retourner à bon port en courant.
C’était 5 milliards de DH, soit 500 milliards de centimes, qu’on croyait pouvoir rapatrier de cette grande opération de miséricorde et cela, en une année seulement. Je vous jure que j’aurais été le premier à applaudir chaudement le convoi, même si ce n’est pas tout à fait mes sous, mais d’après ce que je vois, on est très loin du compte. Bien sûr que je ne suis pas content, bien sûr que je trouve que ces gens-là sont vraiment vaches de refuser une offre aussi généreuse de la part de nos responsables qui sont peut-être très naïfs, mais probablement très sincères. Mais maintenant qu’ils ont vu la réaction si molle de ces petits… chenapans, j’espère qu’ils vont s’y prendre avec eux autrement. Surtout s’il s’avère que les lieux des cachettes ne sont pas… inconnus.
En attendant, je souhaite à tous les non-sorteurs et à toutes les non-sorteuses, ainsi qu’à tous ceux et à toutes celles qui n’ont rien à sortir, un très bon week-end. Quant aux autres…
Un dernier mot sous forme de devinette pour rigoler un peu : pourquoi on a libéré aussi vite un vieil anglais un peu libertin, et on a laissé à l’ombre plein de petits Marocains pas forcément plus vilains ?