Débilité : Aujourd’hui, les humains sont engagés en dehors de leurs âmes. Ils s’adonnent avec frénésie au culte de la confusion et du bruit. Ils pensent qu’être vivant, c’est être entendu, croyant qu’ils ont aimé alors qu’ils se sont effrités contre les murailles du non-amour. Pour les autres, ceux qui vivent selon leur âme.
Plus on se penche sur le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui, plus il nous apparaît clair que cette planète est à coup sûr utilisée comme un asile psychiatrique par d’autres planètes. Plus on y voit clair, plus on se rend compte que nous sommes perdus dans un monde où un seul imbécile peut engendrer des millions d’autres semblables à sa personne, tandis que des dizaines d’hommes avisés (pour ne pas aller jusqu’à la sagesse, qui, elle, demande plusieurs vies pour que l’on y arrive) sont incapables de se dupliquer, pour donner corps à d’autres personnes plus mesurées, moins bêtes, plus alertes et moins enclines à la débilité ambiante. Il paraît même que d’un point de vue biologique et chimique, la bêtise a une forte tendance à se fractionner en une infinie quantité de clones. Alors que l’acuité de l’esprit est biologiquement très rare et encline à une forte résistance à la copie. Il est très aisé pour un grand esprit de feindre la bêtise, mais il est impossible pour un esprit éteint de simuler l’intelligence. Nous l’avons vérifié à travers les siècles, le moins de talent ils ont, le plus de fière, de vanité et d’arrogance ils affichent. Tous ces esprits vides trouvent d’autres imbéciles pour les applaudir. C’est là, l’une des vérités absolues de notre univers, avec, il faut le dire celle-ci, comme l’avait bien lancée Albert Einstein, il y a de cela plus d’un siècle :
Deux choses sont infinies, la stupidité humaine et l’univers, et le savant ajoute qu’il n’est pas sûr en ce qui concerne l’univers. Dans cette infinité de connerie humaine, les uns et les autres, individuellement et en bandes serrées, rivalisent d’ingéniosité pour devenir encore plus cons.
C’est une rude adversité à laquelle nous assistons aujourd’hui. On se bouscule aux portillons de la bêtise. On prie. On dépense une somme considérable d’énergie pour devenir le plus débile possible et le montrer en le revendiquant aux yeux du monde. On est fier de la connerie. On l’étale aux yeux des autres. On la fête, la bêtise.
On la glorifie. On en devient adepte, comme une religion. La débilité est tellement sacralisée qu’elle produit des fanatiques virulents qui veillent au grain. Ce sont là les grands gardiens du temple de la bassesse humaine dans ce qu’elle a de plus pathétique. Oui, la connerie a ses paroisses. Elle a ses pauvres comme elle a ses riches. Elle ne connaît aucune distinction de classe sociale. Elle est démocratique, la connerie. Elle happe. Elle aimante les masses. Elle attire le plus grand nombre comme un aimant infaillible pour grossir les rangs. Et ce grossissement des masses est pris pour une réussite. Alors que ce type de faux succès est très dangereux. Il pousse les uns et les autres à se copier cédant à la facilité et à son faux confort. Se copier, se répéter est encore plus néfaste que de copier les autres. C’est dans ce sens, qu’il faut comprendre que nous avons hérité d’un monde détruit et hybride.
Aujourd’hui, seul l’homme stupide, insensible et perturbé, a une place dans cette société. Aujourd’hui, le droit à la vie et à la liberté est requis avec les mêmes qualifications pour être interné dans un asile de fous où le mot d’ordre est affiché au fronton de l’établissement : immoralité, hypomanie et incapacité de réfléchir.
Aujourd’hui, dans un monde livré à la superficialité la plus assassine, l’écrasante majorité des humains est très occupée à être engagée en dehors de la vie. Les gens n’existent même plus. Ils sont de simples comparses dans une pièce de théâtre qui joue leur tragique comédie. Aujourd’hui, les humains sont engagés en dehors de leurs âmes. Ils s’adonnent avec frénésie au culte de la confusion et du bruit. Ils pensent qu’être vivant, c’est être entendu, croyant qu’ils ont aimé alors qu’ils se sont effrités contre les murailles du non-amour. Pour les autres, ceux qui vivent selon leur âme, ils sont blessés parce qu’ils sont en vie, et la mort ne constitue aucune peur pour eux, parce qu’ils ont éprouvé et égaré toutes les notions normales de la mort. Seule la vie réfléchit en eux. Alors que pour tous les autres, tous ces beaucoup-trop-nombreux, fuir est la règle. Fuir par peur de la mort en ne vivant aucune vie. Dans cette terrible configuration, l’un des problèmes majeurs de notre société aujourd’hui, c’est que les gens ne veulent pas être utiles, mais importants. Parce que ce n’est que grâce à leur stupidité qu’ils peuvent être si sûrs d’eux. C’est aussi pour cette raison que ce monde produit des êtres malades pour supporter une économie qui ne sera jamais saine, parce qu’elle est bâtie sur l’asservissement des masses, sur l’embrigadement systématique des foules, sur le conformisme des esprits comme règle de conduite. Ce qui ouvre la porte à toutes les formes de fascismes. Et comment naissent les fascismes ? D’abord, on abrutit les masses, ensuite, on fascine les foules. Et enfin, on ligote l’intelligence.
C’est pour cette raison également qu’il ne faut jamais perdre de vue quand on essaie de comprendre le monde dans lequel nous vivons que la première chose qu’il faut réaliser est que tout le monde arrive à la vie avec tout un univers de croyances qui n’ont aucune justification rationnelle, sans réaliser que cet univers de croyances n’est en aucun cas compatible avec celui d’un autre. Ce qui fait qu’ils ne peuvent être dans la logique, ni l’un ni l’autre. C’est dans ce sens que les opinions des gens sont là pour rendre leurs existences confortables. Quant à la vérité, pour tout le monde, ce n’est là qu’une question subsidiaire. Et là, il y a une constante infaillible: les hommes mauvais et médiocres, toujours satisfaits d’eux-mêmes, n’éprouvent aucune répugnance à se glorifier. Pour s’en rendre profondément compte, regardez ce que les gens lisent chaque jour.
Faites attention à ce qui les attire et les garde dans un étau très serré. Les gens se jettent sans mesure sur tout un arsenal de données et de faux faits qui les assomment littéralement. Ils feuillettent un certain type de journaux, ils lisent chaque matin et chaque soir le même type de propos déclinés en commentaires laconiques et bêtes. Chaque jour, on les travaille, on les exhorte, on excite leur haine, on fait d’eux des êtres insatisfaits et méchants. Face à cela, il faut réfléchir une heure, rentrer en soi-même pendant un moment et se demander quelle part, on prend personnellement au règne du désordre et de la méchanceté dans le monde, il faut, une fois dans sa vie, se demander quel est le poids de notre responsabilité.
Cela, personne n’en a envie. Personne ne l’assume. Voilà pourquoi tout continuera comme avant. Voilà pourquoi, jour après jour, des millions d’hommes préparent avec zèle la prochaine guerre. Une guerre qui en finira avec la race humaine, à coup sûr. C’est dans ce sens que Hubert Reeves a écrit ceci de très clair : «Je pense que l’humanité n’est pas nécessairement la favorite de la nature, que l’humanité peut très bien disparaître, que nous ne sommes pas une espèce sacrée, qu’il y a eu 10 millions d’espèces animales jusqu’ici, que neuf millions ont été éliminés. On n’est pas l’espèce élue comme on l’a cru pendant longtemps. La nature peut très bien se passer de nous. Et elle ne nous éliminera pas. C’est nous qui pourrions nous éliminer. Et si nous nous éliminons, la nature ne fera pas particulièrement un deuil, mais elle continuera à développer d’autres espèces, en espérant que ces espèces seront plus en mesure de se préserver et de ne pas se détruire».














