Chroniques

Qui pour remplacer Macron ?

Mustapha Tossa Journaliste éditorialiste

Le grand non-dit actuel de la politique française, le point névralgique de toutes les attitudes et le positionnement est celui de savoir qui pour mener la bataille de la prochaine présidentielle à la place d’Emmanuel Macron, empêché par la Constitution de concourir pour un troisième mandat successif.

Il est vrai que les élections présidentielles de 2027 sont encore loin, et qu’en politique trois longues années ressemblent à une éternité. Mais il est tout aussi vrai que les enjeux de la prochaine course à l’Elysée sont tout aussi limpides. Une compétition entre d’un côté un candidat de l’extrême droite, pour le moment l’hésitation est grande entre Marine Le Pen et Jordan Bardella, et un autre candidat venu soit de la majorité présidentielle qui comprend presque l’ensemble de la droite, soit issu de la gauche dont on ne sait si elle sera celle du gouvernement ou celle des ruptures. Pour l’extrême droite, l’affaire de la candidature est close sur le papier.

Marine Le Pen a déjà tranché la question en annonçant sa candidature pour les prochaines présidentielles. Mais les vents de la politique peuvent aussi entraîner les bateaux vers un autre port. L’étoile de Jordan Bardella monte si vite qu’il peut constituer un véritable danger pour le chemin tracé par la famille Le Pen à cette présidentielle. Les prochaines élections européennes risquent fort de faire apparaître Bardella comme le véritable chef de cette extrême droite acceptable aussi bien par l’opinion que par une grande partie de la droite républicaine.

Au sein du gouvernement, un désir semble s’exprimer. Il est porté par l’actuel ministre de l’intérieur Gérald Darmanin. Un homme qui se veut être la synthèse d’un Nicolas Sarkozy et d’une Marine Le Pen. Il avait laissé entendre qu’il quitterait son poste au lendemain des Jeux olympiques. Il pourra ainsi se consacrer à fabriquer une candidature susceptible de porter les espoirs de la droite face à l’extrême droite. À gauche, le brouillard est plus épais. L’homme qui porte une offre politique susceptible de mobiliser une partie des Français est le chef de la France Insoumise Jean Luc Mélenchon. Mais il porte aussi le grave handicap d’être incapable de mobiliser l’ensemble des composantes de cette gauche. Pour le moment, le principe d’un plafond de verre le frappe aussi. Jean Luc Mélenchon n’a de chance d’accéder à cette présidentielle que si les Français auront décidé de mettre en scène un grand combat entre les extrêmes pour le scrutin de 2027. Ce qui est loin d’être exclu.

Il reste une candidature réellement interne à la gouvernance actuelle d’Emmanuel Macron. Et elle semble être incarnée par le jeune Premier ministre Gabriel Attal. Il est vrai que dans la logique des institutions de la cinquième république, le poste de Premier ministre est à la fois un fusible et une malédiction et qu’on a rarement vu un passage direct entre Matignon et l’Elysée, mais cette hypothèse était valable en présence d’une concurrence naturelle entre un président qui veut rempiler et un Premier ministre qui veut le déloger.

Ce n’est pas du tout le cas de Gabriel Attal. Face à la fermeture constitutionnelle des horizons d’Emmanuel Macron, Gabriel Attal a été coopté au poste de Premier ministre pour justement se construire une légende de candidat naturel à la prochaine présidentielle. C’est ce qui explique qu’il est en communication et en exposition permanente. Il s’agit de convaincre les Français que le successeur naturel de Macron est Gabriel Attal dont le mimétisme avec le président de la République interpelle.

Il n’est pas certain que l’opération Attal réussisse. Tout dépendra de son bilan comme Premier ministre qui sera son programme de campagne, mais aussi de sa capacité à convaincre les autres composantes de la majorité présidentielle de la pertinence de son choix. Et ce n’est pas une partie gagnée quand on se rappelle les grincements de dents que sa venue à Matignon a provoqués au sein de cette majorité. On entend encore les murmures d’amertume et de déception exprimées par une homme comme François Bayrou, pièce maîtresse du centre et dont l’adhésion est indispensable pour la réussite de tout projet afin de contrer l’éventuelle victoire de Marine Le Pen. En tout cas les dès sont jetés mais on ignore de quel côté tombera le double six gagnant.

Related Articles

ChroniquesUne

Ce que cache un émoji : L’angoisse muette d’une génération sous filtre

xxxLe mal-être adolescent d’aujourd’hui ne s’exprime plus dans les mots ou les...

Chroniques

Yoga et acceptation : Le retour à soi

Une posture inconfortable nous enseigne la patience. Une ouverture du cœur nous...

Chroniques

Contribution : L’autre fait partie de l’équation (Part II)

Fatima ne met pas en opposition un «Orient innocent et pur» contre...