La longue crise entre Alger et Paris s’est volontairement cristallisée sur la personne de Bruno Retailleau. Le régime algérien a focalisé ses attaques contre sa personne, ménageant volontairement et le président Emmanuel Macron et le ministre des affaires étrangères Jean Noël Barrot.
En quoi le succès d’une personnalité politique à la tête du Parti les Républicains pourrait été senti et perçu comme une défaite pour le régime algérien ? La question, si lointaine dans les préoccupations des Français, est pourtant d’une grande pertinence. Pour analyser cette relation entre Bruno Retailleau et le régime algérien, il faut revenir aux multiples bras de fer que se sont livrés la France et l’Algérie sur deux sujets majeurs de discorde que sont l’arrestation arbitraire de l’écrivain franco-algérien Boualam Sansal et le refus permanent algérien de recevoir leurs OQTF, ces clandestins algériens que la France voulait à tout prix expulser.
Au cœur de ce bras de fer franco-algérien trônait Bruno Retailleau comme ministre de l’intérieur. En plus d’être directement chargé de ces questions migratoires, il est un ami personnel de Boualem Sansal dont l’arrestation arbitraire fut ressentie comme une attaque personnelle.
La longue crise entre Alger et Paris s’est volontairement cristallisée sur la personne de Bruno Retailleau. Le régime algérien a focalisé ses attaques contre sa personne, ménageant volontairement et le président Emmanuel Macron et le ministre des affaires étrangères Jean Noël Barrot. La stratégie algérienne était de signifier à l’opinion que la crise n’est pas avec la France dans sa totalité, mais avec une frange de l’extrême droite et des nostalgiques de l’Algérie française incarnée à leurs yeux par Bruno Retailleau .
Cette stratégie n’a pas fait long feu puisqu’elle visait à isoler Retailleau de l’architecture gouvernementale française. Le régime algérien est allé jusqu’à affirmer qu’il ne traitera pas avec Bruno Retailleau et a poussé l’obsession jusqu’à expulser des diplomates français directement rattachés au service du ministre de l’intérieur. Sans le dire ouvertement, le régime d’Alger exigeait d’Emmanuel Macron la démission de Bruno Retailleau et sa sortie de la photo gouvernementale. Une demande sèchement ignorée par le Palais de l’Élysée.
La victoire de Bruno Retailleau au congrès des Républicains est assurément une vraie défaite algérienne. Non seulement les médias officiels algériens ont fait de lui la personnalité française la plus haïe en Algérie, ce qui aurait dû impacter négativement son image. Mais bien au contraire, plus le régime algérien ciblait Bruno Retailleau, plus ses actions dans la bourse des opinions grimpaient.
Il est clair aujourd’hui que si Bruno Retailleau est parvenu à s’imposer à ses pairs républicains, il le doit à sa politique de fermeté dans la lutte contre l’immigration clandestine, en particulier et la gestion de la question migratoire en général. De par ses sorties et ses prises de position, Bruno Retailleau est en train de réussir une opération dont la droite traditionnelle rêvait depuis longtemps , démagnétiser le Rassemblement National de Marine Le Pen et de Jordan Bardella et lui soutirer cette disponibilité à prendre des mesures radicales pour se protéger contre l’immigration clandestine. Mais il y a aussi le facteur algérien qui a participé à la fortune politique et médiatique de Bruno Retailleau. La crise avec le régime algérien en a donné d’homme de poigne, de conviction qui n’hésite pas à aller au contact, à croiser le fer avec un pays, actuellement producteur de la majorité des angoisses françaises, en termes de sécurité et de vivre-ensemble.
En réalité, plus le régime algérien critiquait avec sa violence habituelle Bruno Retailleau, plus ce dernier capitalisait sur cette haine auprès des français et de leur classe politique. En fin de compte, Bruno Retailleau doit au régime algérien une grande partie de sa notoriété, de sa crédibilité en tant qu’homme politique. Aujourd’hui, l’homme s’est manifestement positionné pour la course des présidentielles de 2027. En l’absence d’Emmanuel Macron privé par la Constitution d’un troisième mandat, en l’absence de Marine Le Pen potentiellement frappée d’une peine d’inéligibilité, une autoroute vers l’Elysée semble dessinée devant Bruno Retailleau , au grand dam du régime algérien qui angoisse encore plus à l’idée de devoir composer avec lui demain non pas comme ministre de l’intérieur mais comme possible futur président de la République.
Et ce qui augmente encore plus l’indice de l’amertume algérienne, le fait que Bruno Retailleau fasse, depuis longtemps, partie de cette droite française convaincue depuis les années Chirac de la marocanité du Sahara. Une position qu’Emmanuel Macron a traduite dans les faits provoquant ainsi l’ire des militaires d’Alger.