Chroniques

Tant qu’il n’est pas interdit de rire…

© D.R

Ceci étant précisé, je vais rentrer tout de suite dans le vif du sujet. Le wali d’une grande ville qui ne manque pas de spiritualité, mais également, pourquoi le cacher, de spiritueux, vient de décréter un arrêté autant bizarre qu’anachronique. Il interdit tout bonnement, je cite, «l’exercice des barmaids dans les bars, cabarets et restaurants».

Donc, si je comprends bien, les femmes ont le droit de faire tous les métiers, de la bonne à tout faire, jusqu’à la pilote de tram, de train ou d’avions long-courrier, en passant par policière, ambassadrice, puéricultrice, cuisinière, hôtesse de l’air, commissaire, patronne des patrons, vendeuse de baghrir, de saykok ou d’escargots, ministre ou serveuse dans un café ou un glacier, mais pas, je répète, barmaid dans un bar, un cabaret ou un restaurant. Je rappelle aux lecteurs et surtout aux lectrices que «barmaid» c’est tout simplement le féminin de «barman» et qui n’est autre, selon le très éclairé Wikipédia, qu’«un travailleur polyvalent qui accueille la clientèle du bar, prépare et effectue le service des boissons chaudes, froides, simples ou composées, ainsi que des mets simples voire des snacks, des sandwichs ou et des crèmes glacées…», bref, pas de quoi chatouiller un chat. Justement, à une certaine époque noire de la discrimination raciale et de l’antisémitisme en Europe, certains propriétaires de restaurants ou de bistrots en Europe mettaient des pancartes sur leurs portes et sur lesquelles ils écrivaient: «Interdit aux juifs et aux chiens». De nombreuses années après, des pancartes similaires sont apparues, notamment en France, mais le mot juif avait été remplacé par le mot arabe. Comme quoi, on est toujours le juif ou l’arabe de quelqu’un d’autre.

Mais, me diriez-vous, là, dans le cas d’espèce, il ne s’agit pas de race, mais de «genre». Alors, c’est pour cela que je pense que c’est encore plus grave. C’est d’autant plus grave que c’est un très haut fonctionnaire de l’Etat, en l’occurrence un wali d’une ville prestigieuse, qui décide de décider de mettre la femme marocaine à l’index juste au moment où des types obscurantistes de tout genre, c’est le cas de le dire, s’acharnent sur elle avec tous les moyens haineux et irrespectueux. Il y a comme qui dirait «désordre». Dites-moi, Monsieur le wali, vous êtes avec nous ou contre nous ? Vous être notre ami ou l’ami du lion ? Plaisanterie à part, je trouve que cette décision est humainement inacceptable, socialement injuste, économiquement contre-productive et politiquement ridicule, voire risquée. D’ailleurs, notre ministre du tourisme a bien fait de réagir en dénonçant ce décret car lui sait très bien que ce n’est pas du tout le moment de prendre une telle décision.

Au fait, j’ai oublié de vous dire qu’avant que l’information officielle ne soit publiée dans la presse, des rumeurs avaient circulé ces derniers jours parlant de l’interdiction des serveuses dans tous les cafés et restaurants du Royaume. Je ne vous cache pas que quand j’ai entendu cette ineptie, j’avais sauté au plafond, mais j’avais aussitôt atterri en me disant qu’aucune autorité sensée ou pas assez ne serait capable de décréter une débilité pareille, ne serait-ce que parce que l’Etat, donc, le gouvernement, a érigé depuis de nombreuses années moult écoles et instituts de formation pour former justement, entre autres, ce type de métiers si beaux car si mixtes. Et j’ai laissé le meilleur pour rire pour la fin.

Ce même décret pas rigolo précise également que, désormais, l’accès aux établissements incriminés précités sera interdit aux prostituées, comme il sera dorénavant défendu de servir de l’alcool aux adolescents. Tout cela est bien et on ne peut qu’applaudir, mais, j’aimerais d’abord qu’on m’explique comment on va reconnaître une femme prostituée parmi d’autres femmes qui peuvent être aussi peu habillées que trop maquillées. Et d’un. De deux : à ma connaissance, et jusqu’à nouvel ordre, depuis la nuit des temps, il est non seulement interdit dans notre pays de servir ou juste de vendre de l’alcool aux Marocains et aux Marocaines car, évidemment, toutes Musulmanes et tous musulmans, qu’ils ou qu’elles soient d’ailleurs adultes et, encore plus, adolescents ou adolescentes. Franchement, on se moque de qui ? Je suis sûr que notre cher wali a sorti ce décret de bonne foi, mais comme disent nos ami(e)s catholiques, l’enfer est pavé de bonnes intentions. En tout cas, j’espère que tout cela sera très vite revu et très bientôt considéré comme nul et non avenu.

En attendant, je souhaite à tous les amoureux et à toutes les amoureuses de la spiritualité si bienfaisante au repos de l’âme et à l’humanité, un très bon week-end et de très bonnes vacances pour ceux et celles qui vont en prendre. Quant aux autres…

Un dernier mot sous forme de devinette pour rigoler un peu : Pourquoi ce sont toujours les moins loti(e)s et les moins nanti(e)s qui râlent et rarement le contraire ?

Related Articles

ChroniquesLifestyle

Mettre des limites : Un acte de loyauté envers soi-même

Le yoga n’est pas seulement un enchaînement de postures ; c’est un...

ChroniquesUne

L’debat : foot le grand révélateur…  Soutenir, sensibiliser, mobiliser, encourager notre jeunesse

Les intervenants durant deux heures ont déroulé les chances que ces grands...

Chroniques

La France à la recherche d’une solution migratoire à l’américaine ?

Si Emmanuel Macron ou Bruno Retailleau ne peuvent agir comme le président...