Chroniques

Un projet de loi «hors la loi» : Les binationaux visés

© D.R

Comment peut-on jouer ainsi contre son pays en proposant de se priver de talents, alors que nous avons tant besoin de compétences. Avoir une seconde nationalité amoindrirait-il les neurones ?

Notre pays est un pays de droit, régi par une Constitution, des lois, des institutions… et cela est le fruit d’un long travail qui d’ailleurs se poursuit, toute Nation digne de ce nom étant en perpétuel développement, en perpétuel «chantier» pour plus de progrès.
Il existe dans notre arsenal une loi organique relative à l’organisation des travaux du gouvernement et statut de ses membres qui précise : «Ne peuvent être membres du gouvernement les personnes ne jouissant pas de leurs droits civils et politiques».
Ce qui bien évidemment relève du pur bon sens, or il n’est fait ici aucune référence à la nationalité !!!
Eh bien le PJD puisque, c’est de lui qu’il s’agit, veut amender la loi pour interdire aux binationaux de devenir membres du gouvernement.
Pourquoi jouer avec les mots, disons les choses franchement : il s’agit ni plus ni moins que d’une loi d’exclusion, voire d’une loi raciste : ne s’agit-il pas ici de diviser les Marocains en deux catégories ?
Ceux qui seraient de «vrais» Marocains – je n’ose pas employer le terme de «purs» et ceux qui seraient entachés de suspicion, soupçonnés de traîtrise potentielle, car possédant une seconde nationalité !!!???
Les arguments qui s’élèvent contre une telle dérive sont nombreux, je voudrais ici en développer quelques uns. En effet, je voudrais m’attacher ici à tous ces Marocain(e)s dont beaucoup ont, en plus de la nationalité marocaine, la nationalité du pays dans lequel ils sont nés ou dans lequel ils vivent, France, Belgique, Canada, Espagne, etc.
Donc tous ceux-là seraient les bienvenus pour envoyer des devises, ou pour certains d’entre eux (nombreux d’ailleurs actuellement) revenir au pays pour y investir, créer des entreprises, apporter leur savoir-faire acquis ailleurs… mais à qui l’on dirait au moment où ils souhaiteraient également s’investir en politique – ce qui est leur droit absolu – «vous ne pourrez aucunement accéder à des responsabilités gouvernementales puisque possédant une autre nationalité.»
Quelle est la logique ?
Le PJD serait bien inspiré alors de déduire des votes qu’il obtient lors des élections, les voix de tous ceux qui ont voté pour lui et possèdent une double nationalité !!!!
– Comment peut-on jouer ainsi contre son pays en proposant de se priver de talents, alors que nous avons tant besoin de compétences. Avoir une seconde nationalité amoindrirait-il les neurones ?
– Le préambule de notre Constitution stipule que le Maroc s’est fait – et se fait – d’apports, de confluents… or les binationaux font précisément partie de ceux qui peuvent nous enrichir, non seulement en matière culturelle, sportive, artistique… mais aussi sur le plan politique s’ils en font le choix.
– Combien d’enfants issus de couples mixtes allons -nous ainsi priver de ce qui peut les animer – légitimement – s’impliquer en politique et souhaiter participer au gouvernement de leur pays.
– Nous ne cessons de décrire les générations actuelles de la communauté marocaine de l’étranger comme les enfants de l’addition, ce parti politique veut en faire les instruments de la soustraction, voire de la division.
– Et quand bien même les binationaux ne seraient pas animés par l’envie de devenir ministre, se rend-on compte du signal qu’on leur enverrait ainsi ?
– Cette proposition honteuse va à l’encontre du sens de l’avenir.
Je voudrais prendre maintenant l’exemple inverse, je suis moi-même né en France, j’ai été parmi les premiers à devenir conseiller ministériel dans un gouvernement français, dans les années 2000, conseiller auprès de Martine Aubry puis de Elisabeth Guigou, je me suis toujours considéré comme un «facilitateur», comme un pont et à aucun moment je n’ai senti de soupçon ni du côté français, ni du côté marocain.
Au contraire Feu SM le Roi Hassan II m’a alors décoré du Wissam pour ce rôle dont je suis fier !!!!
Aujourd’hui d’hui en France nous avons une ministre ô combien proche du Maroc, Rachida Dati, qui remplit ses fonctions en France avec compétence, devrait-elle être mise en équation dans l’un ou l’autre des deux pays ?
En France, en Belgique, en Hollande…nombre de compatriotes MRE sont maires, députés, conseillers… et si demain l’envie leur en prenait, après leurs mandats, de se lancer en politique dans leur pays d’origine, le Maroc ?!
Nous pouvons retourner cela dans tous les sens, quelle que soit la raison qui fait qu’un Marocain(e) ait une double nationalité, rien ne justifie de le priver de ses droits et de son désir de servir son pays, y compris au niveau gouvernemental.
Pour terminer je poserais une simple question, à laquelle chacun apportera sa réponse : que vaut-il mieux : des binationaux fidèles et patriotes attachés à la marocanité de nos provinces du Sud ou des politiques aux amitiés douteuses avec des ennemis de notre intégrité territoriale.

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