Chroniques

Un vendredi par moi

C’est facile, d’un trait on peut gommer la rationalité et la lucidité en les faisant passer pour l’expression d’une haine. C’est en effet plus confortable pour le repos de l’esprit, en attendant celui de l’âme, de voir en des défaites des victoires, nos islamistes y excellent, comme d’autres ont pris des vessies pour des lanternes. Pour ma part, je préfère le tourment à l’aveuglement qui consiste à croire qu’Israël n’a pas atteint ses objectifs à Gaza alors même qu’elle a réussi à mettre sur la table des négociations avec Le Caire la question des tunnels qui relient cette partie des territoires palestiniens à l’Egypte. Pour saisir leur portée stratégique et vitale pour Gaza, il suffit de comprendre que ce sont ses poumons par lesquels passent les approvisionnements en armes et en produits alimentaires. A cette potentielle perte, il faut ajouter tous les autres dégâts humains et matériels que ce minuscule territoire a subis. Mais on les mettra, toujours pour le confort, sur le compte d’un peuple, qui comme tous les peuples occupés, a prouvé depuis longtemps son sens du martyr.

Ne confondons pas les choses. Dans Hamas, il y a le front office et le back office: ceux qui, armes au poing, vont au combat, meurent par centaines, y laissent également leurs familles, tuent l’ennemi tant et autant qu’ils peuvent, et ceux qui à Damas, à Amman et ailleurs tirent les ficelles, nouent les alliances, établissent les stratégies. Ce sont précisément ces stratégies qui sont particulièrement discutables. L’OLP a de tout temps été traversée par des courants et des fractions mais jamais l’unité du peuple palestinien n’a été remise en cause ni une de ses composantes a ajouté à son malheur les affres d’une guerre civile. Avec le Hamas, on a assisté à une rupture idéologique qui s’est poursuivie par une division territoriale réalisée dans une confrontation générale. Au moment même où les bombes israéliennes tuaient les Palestiniens sans distinction de leur religion et de leur idéologie, les gens du Hamas continuaient de persécuter les militants du Fatah.

La faute au Fatah qui n’a pas respecté les résultats des urnes ? Soit. La faute au Hamas aussi qui a prospéré, sans s’apercevoir qu’il a été programmé à cette fin, sur les continuels reniements par Tel-Aviv de ses engagements à l’égard de l’Autorité palestinienne. Les deux mouvements sont par ailleurs à égalité dans une monumentale erreur : céder aux charmes de la démocratie, condition imposée par l’Occident. Rappelons-nous comment en 2005, les Américains avaient dépêché à dessein  un dispositif de surveillance des élections pour s’assurer de la victoire annoncée du Hamas. Or, le suffrage universel pour un mouvement de libération, avant même que les objectifs de la lutte nationale, l’indépendance et la création de l’Etat n’aient été atteints, est mortel. En mettant la charrue avant les bœufs, les Palestiniens se sont laissé écarteler pour entrer avant terme dans les règlements de compte inhérents à tous les mouvements nationaux au lendemain des indépendances.

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