Chroniques

Un vendredi par moi

Des voix de la jeunesse du 20 février ont commencé à s’élever publiquement contre les tentatives insidieuses de récupération opérées par Al Adl Wal Ihssane. Flairant le danger, quelques porte-voix du mouvement de Abdeslam Yassine, qui a son propre agenda politique, sont montés au créneau pour faire écran de fumée en «ajustant» leurs revendications sur celles des févriétistes. Un seul mot d’ordre : leur plafond est le nôtre. La fille du cheikh d’abord, Nadia de son prénom, qui réitère une ineptie : l’appel à la construction d’un Etat civil. En même temps elle récuse la laïcité, notamment à la française, stipulant par la même occasion que vu la complexité du sujet, ce n’est pas le moment de l’aborder, l’heure étant à la revendication. Du flou peu artistique, une façon simpliste et expéditive de jeter un voile, si ce n’est  une burqa, sur un débat de fond et des plus urgents. Il est vrai que c’est impoli de parler la bouche pleine mais on peut discuter tout en marchant. Et dire que selon certaines théories c’est la femme, contrairement à l’homme, qui est capable de faire plusieurs choses à la fois.
Pas plus futé ni moins simpliste, Fathallah Arsalane, porte-parole d’Al Adl Wal Ihssane, cherche à faire passer ses vessies pour des lanternes. C’est peut-être les communistes qui ont soufflé à Abdeslam Yassine le concept de  wilayat alfaquih, cette curieuse démocratie à l’iranienne qui met le Parlement, le gouvernement et le président sous la tutelle d’un seul homme, un ayatollah élu dans son sommeil par les voix de l’au-delà. Car Fathallah Arsalane est catégorique : son mouvement n’a jamais revendiqué l’Etat religieux mais aspire seulement à l’Etat civil. Sans doute. L’Islam ou le déluge, Alminhaj annabaoui, l’islamisation de la modernité… ce n’est pas Abdeslam Yassine qui les a écrits, mais ce sont ceux qui l’ont lu dans le texte, victimes d’une hallucination collective, qui le lui ont attribué. Un cran au-dessus, le même Arsalane, qui devrait avoir de l’eau dans les veines à la place du sang -l’avez-vous déjà vu rougir ?- affirme que la khilafat, dans sa bouche elle revient à wilayat alfaquih, n’est pas pour le Maroc mais pour l’ensemble des pays musulmans programmés à s’unir dans un Etat fédéral. On ne sait pas si le porte-parole d’Al Adl Wal Ihssane a fait un peu de mathématique à l’école, mais appliquez à cette déclaration l’associativité ou la logique le résultat est toujours le même : le Maroc est un pays musulman, les pays musulmans vivent sous la khilafat, le Maroc est donc sous une khilafat. Elémentaire, non ?

PS : La stratégie d’Al Adl Wal Ihssane a toujours été dans le discours des meneurs de la Jamaâ d’une limpidité déconcertante. Elle ne trouve son équivalent que dans le déterminisme marxiste. De pourrir le régime tombera. Pour le ramasser, Abdeslam Yassine et ses adeptes. L’occupation des plages au début des années deux mille, la kawma de 2006, la récupération du 20 février, juste des coups de pouce au destin qu’ils croient écrit d’avance dans les tables. Parole de leur cheikh qui l’a vu dans ses songes. Le reste, Nadia, Arsalane et consort ne sont qu’ergotage et circonlocutions.

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