CultureUne

A la quête du sens de l’existence dans le soufisme avec Dr Faouzi Skali

© D.R

Lors d’une conférence initiée par la Fondation Al Mada

Connaît-on vraiment le soufisme ? Une question à laquelle répond Dr Faouzi Skali, mardi soir à la villa des arts de Rabat dans le cadre d’un cycle de conférences initié par la Fondation Al Mada. «Le soufisme n’est pas véritablement reconnu. Il est plutôt connu par l’évidence et les valeurs», estime-t-il lors de la première conférence intitulée «Le soufisme, un patrimoine mondial de l’humanité ?». A ce propos, il trouve qu’il est «surprenant» de parler de ce patrimoine. Le tout en remontant le temps pour évoquer son expérience particulière. D’abord, il est né dans une famille très imprégnée par le soufisme «sans entendre parler de ce mot». Il y a même la zaouia familiale «Skallia» à Fès où des veillées de Samaâ soufi (audition spirituelle) sont célébrées.

Terminologie des étapes d’une veillée soufie
Dans ces assemblées, des invocations sont, tel que le détaille M. Skali, faites. Elles sont également marquées par des «Houlal» (ryhtmiques en dhikr) qui vont «crescendo dans une saisie extatique (Khamra)». Dans ce sens, il s’exprime sur Ibn Farid et son grand poème chanté sous l’appellation «Al Khamria» (Eloge du vin). Un intitulé que le conférencier troque par «vin spirituel». Entre-temps, il remonte à ses études en mission culturelle française et son départ à l’Hexagone où il n’entendait parler que de «politique» sans référence au sacré. Le tout en établissant une comparaison avec le Royaume. «Au Maroc, l’appel à la prière est une transcendance». Tel qu’il s’en souvient, le religieux était refoulé mais avec «une quête du sens».

A la recherche d’œuvres spirituelles
Dans cette quête, il se lance dans une autre. Celle des œuvres spirituelles. C’est ainsi qu’il découvre, notamment dans la Fnac de Paris, des traductions de livres très importants sur le soufisme traduits de l’arabe et du persan en français. Il y a surtout trouvé des livres de Hallaj, Rûmî et Ibn Arabi. Au fil de son oral, l’intervenant donne, entre autres, l’exemple de ses lectures du «Livre du dedans» de Rûmî, traduit par Eva de Vitray-Meyerovitch et qui parle de l’humain et de la quête du sens ainsi que de l’œuvre «Al Matnawi» (Mystiques), du même auteur, plein «d’anecdotes et d’histoires sur la quête spirituelle». Après quoi, Dr Skali se lance dans une recherche personnelle. «J’ai toujours pensé que le soufisme était en Orient, alors que ça existait chez nous au Maroc qui est riche en ce patrimoine», tranche-t-il. C’est ainsi qu’il découvre Ibn Ajiba et son «Al Miâraj» (Ascension spirituelle) ainsi que sa «Tarika Derkaouia». Avec Eva de Vitray-Meyerovitch, l’orateur fait également un livre collectif intitulé «Jésus dans la tradition soufie». Entre-temps, il cite aussi, à propos de l’existence du soufisme dans le Royaume, Titus Buchart et Jean-Louis Michon qui se sont installés à Fès avant le protectorat et appelé à la préservation de la culture spirituelle de cette capitale scientifique. Le tout en se posant une question.

Comment préserver un patrimoine ?
Pour y répondre, l’intervenant énumère également Henri Corbin et son livre «L’imagination créatrice dans le soufisme d’Ibn Arabi». Par la même occasion, Dr Skali se remémore sa rencontre avec le maître Hamza Kadiri Boudchichi en 1977. Il lui dédie même un livre intitulé «Le souvenir de l’être profond ; les enseignements du maître Hamza». A cette époque, il est question pour l’orateur de «profiter de cette expérience vivante pour faire des études et recherches sur le patrimoine du Royaume». A cette occasion, il découvre des ouvrages en arabe, notamment «Attachawouf Ila Rijal Attasawouf» (ndlr : contemplation des soufis) d’Ibn Ziat ainsi que des œuvres du ministre des habous et des affaires islamiques, Ahmed Taoufiq. Après quoi, il dénombre d’autres noms de soufis marocains comme le Berbère Abou Yaâza Yennour, Abou Medyene El Ghaout qui vient de Séville vers Fès pour étudier la science et la théologie et rencontrer Yennour entre autres. «Abou Medyene est également le maître d’Ibn Arabi sans l’avoir jamais rencontré», raconte le conférencier qui rappelle les six références féminines exaltées, notamment «Leila», «Nidham» dans L’interprète des désirs et Rabiâ El Adaouia par Ibn Arabi qui part en outre à la rencontre d’Ibn Rochd (Averroès). Ibn Arabi, qui a écrit 846 œuvres inspirées, est également arrivé à Fès tel que le révèle M. Skali en rappelant que ce poète a également rencontré Rûmî, dont le maître est Chams de Tabriz, qui rencontre à son tour Farid Eddine El Attar lequel a à son actif l’œuvre poétique «La conférence des oiseaux».

Des démarches concrètes
Cela étant, l’orateur, qui trouve que «la spiritualité dans notre pays est un levier pour la culture», ne manque pas de s’exprimer sur ses démarches pour préserver ce patrimoine. C’est le cas de «Sufi Heritage», une plate-forme destinée à faciliter l’accès à cette culture. Il rappelle, en outre, la création d’une bibliothèque vivante dans le cadre d’un travail fait par la Pr Leili Anvar. «Il faut s’intéresser à cette culture qui peut être stimulante dans toute démarche spirituelle. Il y a un travail à faire pour la transmission aux jeunes à travers des récits soufis. Nous avons une certaine identité spirituelle au Maroc», recommande l’intervenant en s’exprimant sur les bienfaits du soufisme pour la vie sociale, l’éducation voire l’entreprise. Pour lui, la spiritualité et le soufisme peuvent même nourrir des corporations de métiers et notre quotidien. «Une façon d’être au monde. C’est l’enjeu», ajoute M. Skali en récitant un poème d’Abou Medyene El Ghaout. Il en profite pour annoncer l’organisation du festival de la culture soufie en octobre prochain sous le thème «La science et la conscience». Quant au débat, il abonde dans le sens de la conférence de M. Skali ponctuée par une performance spirituelle fort appréciée par le public présent.

Articles similaires

ActualitéUne

Emission d’un nouveau timbre-poste à l’occasion du 60ème anniversaire de l’ONCF

Le Groupe Barid Al-Maghrib, en partenariat avec l’Office National des Chemins de...

ActualitéUne

Le Conseil de la concurrence alerte sur une éventuelle augmentation des prix des boissons servies dans les cafés

Le Conseil de la concurrence a annoncé que les investigations préliminaires menées...

ActualitéUne

3,3 millions d’arrivées touristiques au T1-2024

Les arrivées touristiques au Maroc ont atteint 3,3 millions de personnes au...

ActualitéUne

Téléphonie mobile : près de 56 millions d’abonnés en 2023, selon la DEPF

Le parc de la téléphonie mobile au Maroc s’est consolidé de 5,6%...

EDITO

Couverture

Nos supplément spéciaux

Articles les plus lus