A la une : Isli et Tislit

Parler du Moussem d’Imilchil revient à remonter aux origines de sa création. Réduire ce Moussem à une simple manifestation matrimoniale, cela veut dire tourner le dos à des faits historiques combien indispensables à la compréhension d’un événement de taille. N’aborder cet événement que sous son angle socio-économique, pire encore, c’est faire preuve d’une dangereuse cécité culturelle. Bien sûr, on ne peut occulter le fait que le Moussem offre aux jeunes de la région l’opportunité de convoler en justes noces, ce qui, d’un point de vue social, reste très encourageant. Bien entendu, le Moussem présente à la population d’une région enclavée l’occasion de prendre du service. Mais évoquer ses effets socio-économiques indéniables, sans rappeler les causes de sa genèse, c’est faire injure à ce qui a fait sa légende. D’où et comment est donc né le Moussem des mariages ? Explication : A Imilchil, il existe deux tribus sœurs des Aït Hdidou : les Aït Brahim et les Aït Yazza. La légende veut que deux jeunes appartenant aux deux tribus, Isli et Tislit tombent amoureux l’un de l’autre. Les parents devaient naturellement dire amen à cet hymen, en apportant leur bénédiction à un mariage né du plus noble et beau sentiment que l’on puisse avoir : l’amour. Or, ce n’est pas de cette oreille que les géniteurs l’entendent. Les parents en opposition refusèrent de donner l’accord de mariage. Au grand malheur de deux âmes sœurs, qui n’avaient que leurs yeux pour pleurer.
A ce stade crucial, les habitants des deux tribus s’associent au malheur des amoureux. Que va-t-il arriver à ces derniers ? Deux versions viennent s’affronter : la première dit que les amants ont tellement pleuré qu’ils ont formé le lac « Isli et Tislit ». Selon la seconde version, les deux amoureux se seraient jetés dans le lac par dépit. C’est pour cela, peut-être, que le lac séparant les deux tribus aurait été baptisé des noms d’Isli et Tislit. Mais contre mauvaise fortune, il faut faire bon cœur. Si Isli et Tislit n’ont pu s’unir, à cause d’un litige entre leurs deux parents, leur séparation tragique aura pour effet de réconcilier les deux tribus d’Aït Hdidou. Le Moussem des mariages, organisé à chaque été, vient commémorer non seulement cet acte de réconciliation entre les deux tribus, il vient également glorifier la mémoire d’Isli et Tislit. Ainsi, en souvenir de l’amour de ces deux derniers, des actes de mariage viennent, à chaque édition, sceller l’union entre des jeunes de la région.
Une tradition qui, comme on le disait plus haut, possède une importance sociale considérable. Sa célébration coïncide avec l’été, c’est-à-dire avec la saison des récoltes. Ce qui offre à la population d’Imilchil l’occasion de célébrer à la fois les mariages collectifs et les fruits de leurs travaux pendant l’année. A cette double joie, s’associent, à chaque occasion, des visiteurs, issus de différentes régions du Royaume mais aussi de l’étranger ; ce qui, d’un point de vue économique, participe au développement touristique et économique de la région. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la dimension sociale est fort présente à la 3ème édition du Festival de la musique des cimes, qui coïncide avec le Moussem d’Imilchil.
Cette manifestation, qui aura lieu du 25 au 27 août 2005, « vise à apporter des éléments de développement et d’ouverture à une très belle région montagneuse géographiquement retirée et cloisonnée de notre pays », nous souligne Youssef Aït Lemkaddem, président d’une association locale et membre de l’Institut royal de la culture amazighe (IRCAM). Ainsi, la musique des cimes, autant que le traditionnel Moussem des mariages, se portent au service du développement de la région d’Imilchil