Culture

À son amant, Khadija offre la vie de son mari (5)

© D.R

Abdeslam est arrivé à ce monde. Il n’a pas choisi d’être le premier enfant de deux parents toujours en discordance, toujours en malentendu, toujours l’un loin de l’autre. Il n’a pas choisi d’être le fils d’une mère qui n’aime pas son père, ni d’un père qui essaie de tout son cœur de couvrir son foyer d’un sentiment de chaleur, d’affection et de confiance. Au fil des jours, leur relation semblait rester stable, sans avancer d’un iota, sans la moindre évolution et sans le moindre espoir d’être changé. Bref, le petit Abdeslam n’a rien changé. Khadija était toujours cette femme qui a offert son corps à Ismaël, mais son cœur à Hamid. Où est-il ce Hamid auquel elle pensait encore ? Elle ne savait pas. Elle n’en avait pas la moindre idée. Devait-elle accepter le statu quo ? C’est du moins ce qu’elle devait faire puisqu’elle n’avait pas d’autre choix. Mais, elle n’a pas pu le faire. Au fond de son cœur, elle n’a pas de place pour un homme qu’elle n’aime pas et qu’elle n’en aurait pour jamais. En fait, son cœur, elle ne pouvait le réserver qu’à celui qu’elle adore, qu’elle rêve être son cavalier, sa vie, son corps et âme, son passé, son présent et son avenir. Celui-ci n’était pas Ismaël auquel elle offrait un corps sans âme, sans vie, sans besoin, sans désirs. Elle lui en offrait pour qu’il se vidât. Rien de plus. Abdeslam était à son troisième printemps. Khadija était enceinte pour la deuxième fois. Mélancolique, elle ne voulait plus d’enfant. Triste, elle souhaitait être avortée. Par contre, son mari Ismaël était très heureux d’avoir son deuxième bambin. Il était fier d’être père d’un second enfant. C’était comme si avoir plus d’enfants lui prouve sa virilité. Et l’amour ? Pour lui, peu importe.
Les neuf mois de grossesse ont écoulé. Khadija a accouché d’un second enfant, Mohamed, qui n’a rien changé de ses comportements. Elle passait son temps à veiller sur ses deux enfants, à préparer les repas, à faire la vaisselle, à nettoyer et à répondre aux besoins de son mari. Ce sont les tâches qu’elle effectuait sans avoir du plaisir.
Cinq ans après le mariage. C’était le début de 1994. Khadija venait d’avoir son vingt-quatrième printemps. Elle était à la fleur de l’âge. Sa demi-sœur, Zahra, a accouché d’une petite fille. Accompagnée de ses deux enfants, Khadija lui a rendu visite. Elle lui a porté un petit cadeau. Tout d’un coup, elle a pensé à son bien aimé, Hamid. Elle s’est souvenue de lui. Son image lui passait par la tête, lui hantait l’esprit. Son cœur battait la chamade. Pourquoi à ce moment-là alors qu’elle est venue, uniquement, voir sa sœur ? La réponse était simple: son bien aimé qu’elle n’a pas vu depuis cinq ans demeurait au même quartier que sa demi-sœur. Elle désirait lui parler, le voir, le rencontrer, le toucher…
Comment ? Elle gardait encore le numéro de son téléphone. À l’époque, les gens n’utilisaient pas souvent les téléphones portables. Il n’y avait que le fixe qui régnait encore. Khadija a fait semblant qu’elle irait faire des courses. Elle a laissé ses deux enfants chez sa demi-sœur et elle a claqué la porte derrière elle. Sa destination était l’épicier du coin. Elle lui a demandé le téléphone. L’épicier lui en a remis. Il a composé le numéro qu’elle avait noté dans un bout de papier et a gardé, depuis cinq ans, dans son porte-monnaie. Le téléphone sonnait. Tout d’un coup, elle entendait la voix d’un homme qui disait : «Allô!». Tremblante, elle a gardé le silence, et a tenté remettre l’appareil de téléphone au commerçant. La même voix lui a demandé : « Qui est à l’appareil ? ». C’était lui ? Peut-être.

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