Culture

à Strasbourg, les galeristes sereins face à la crise

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«Cette crise est très bonne», lâche, un brin provocateur, le prestigieux galeriste parisien Claude Bernard. «Les prix étaient délirants (…), ça n’avait rien à voir avec les vrais amateurs» d’art, poursuit-il, tablant sur une baisse des prix de l’ordre de «30 à 40%» d’ici «deux à trois mois». Ce «vieux sage» de l’art contemporain n’a d’ailleurs pas de mots assez durs pour fustiger les «spéculateurs qui achètent pour revendre trois mois après» et réduisent le marché de l’art à de la «Bourse». «Désormais, ça va redevenir silencieux», ricane-t-il. Sa consœur et voisine de stand strasbourgeoise Chantal Bamberger partage cet avis : «C’est vrai qu’il y a eu des artifices spéculatifs, des mouvements totalement irrationnels. Mais tout cela va s’écrouler et les choses vont devenir plus raisonnables», explique-t-elle. La clientèle de cette galeriste bien insérée dans le marché local est plutôt située dans la «classe moyenne» et semble pour l’heure épargnée par les effets de la crise. À l’inverse, les «gros collectionneurs», ceux qui achètent dans les foires prestigieuses comme celles de Bâle, en Suisse, ont «beaucoup perdu». «Par exemple, la foire d’art de Londres (Frieze Art Fair) vendait énormément aux «golden boys» de la City, des jeunes trentenaires dont beaucoup ont perdu leur boulot», souligne Mme Bamberger. «Les effets de la crise ne se font pas sentir maintenant», constate-t-elle, confiant même avoir plutôt «bien vendu» pendant les trois premiers jours de la foire alsacienne, qui s’est ouverte vendredi et s’achève lundi. «C’est trop tôt, on sera peut-être touchés plus tard, peut-être dans six mois», confirme Arlette Gimaray, galeriste à Paris. «Nos clients avaient de gros portefeuilles, ils ont beaucoup perdu…», glisse-t-elle, avant de rebondir: «en même temps, des crises, j’en ai connues! On fait le dos rond et on attend que ça reprenne», philosophe-t-elle. «On garde les tableaux, ils montent tranquillement. En plus, je suis plutôt coulante sur les délais de paiement!», s’amuse cette pétillante sexagénaire. A l’entendre, «le milieu» des galeristes ne paraît pas non plus particulièrement fébrile. Et elle aussi estime que la crise peut avoir des effets bénéfiques: «c’est vrai qu’il y avait du délire, maintenant tout le monde va faire attention, c’est peut-être bien». De son propre aveu, Karl-Johan Bergström est «né dans l’art». Fils de galeristes, il est installé à Malmö, en Suède, ainsi qu’à Paris. Lui non plus ne s’inquiète pas outre mesure, même si, en Suède comme ailleurs, «les gens mettent plus longtemps à se décider. Ils voient que tout est noir autour d’eux, alors forcément, ils hésitent». La crise, il en parle avec ses amis, bien sûr. «Mais on ne peut pas s’arrêter parce qu’il y a eu de la spéculation et des «conneries» qui ont été faites», s’énerve-t-il, avant de marteler son credo: «la Bourse, c’est une chose, l’art, c’en est une autre. Moi, je préfère avoir un tableau que de l’argent en Bourse: au moins, le tableau, il existe toujours».

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