Culture

Al Di Meola et Saïd Chraïbi, un dialogue de géants

© D.R

Comment font deux géants, chacun régnant dans une planète, un monde musical différent, lorsqu’ils se rencontrent ? Ils se respectent considérablement. Chacun descend humblement de son trône pour accueillir l’autre. Mais qui était l’hôte de qui, ce mardi 20 mai au théâtre Mohammed V lors de la rencontre tant attendue entre le grand luthiste Saïd Chraïbi et le guitariste
virtuose Al Di Meola ?
Ce dernier est à sa deuxième participation à Mawâzine. Son public a été acquis l’an dernier, et il est conquis d’avance cette année. Présentant ses musiciens et leurs nationalités au début du spectacle, le jazzman américain s’est même déclaré «Moroccan» dans cette salle archicomble. Pour sa part, Saïd Chraïbi, cet expert des maqams arabes est véritablement de nationalité marocaine, mais c’est sa première participation à Mawâzine. Et le parallélisme entre le parcours de ces deux figures s’impose.
Il s’agissait donc dans ce concert, non d’une rencontre entre deux droites dans un point donné, mais d’un dialogue entre deux hommes aux itinéraires se réfléchissant. Deux hommes utilisant un même langage, la musique, mais n’articulant pas de la même langue. Une différence de langue avec tout ce que cela importe de spécificités culturelles profondes.
La musique de Saïd Chraïbi est empreinte de lyrisme. Même si l’habileté et la maîtrise techniques du luthiste y est largement reconnue, c’est l’émotion et la sensibilité qui y dominent. Dans l’œuvre musicale de Chraïbi, chaque maqam (plus d’une quarantaine dans la musique arabe) ou mode (oriental, turc, perse, arabe, asiatique, africain…) doit s’étaler et prendre son temps pour dévoiler toutes ses subtilités et ses nuances. Et puis la dimension lyrique de la musique arabe est accentuée par la personnalité de Chraïbi d’une grande sensibilité et douceur, lui qui a jusqu’au bout en autodidacte exploré cette voie. De l’autre côté, Al Di Meola pourrait être aux antipodes. Sa musique savante est pointue. Des virages brusques la ponctuent. Ses transitions répétées et élaborées par une mathématique complexe, déroutent parfois les spectateurs même les plus initiés d’entre eux et qui étaient nombreux ce mardi 20 mai au Théâtre Mohammed V.
En dehors du répertoire personnel que chacun a présenté, comment ont-ils communiqué lors des quelques titres qu’ils ont interprétés. Chacun a dû se faire à la présence de l’autre. Al Di Meola, lui, qui a déclaré lors d’un point de presse qu’il était venu avec des partitions et des compositions préparées pour ce duo, a fini par ne pas les exploiter, et a dû abattre ses préjugés et l’idée qu’il se faisait de Saïd Chraïbi. Al Di Meola a dû «désapprendre», oublier son côté académique, «School» comme il dit, aux dépens de son autre face, «Street», d’autodidacte. Saïd Chraïbi est resté lui même, réservé, doux, fier et modeste à la fois, sensible, n’intervenant avec son luth qu’à petites brides significatives et symboliques. Par ailleurs, lors de cette rencontre singulière, le public a été encore une fois séduit par le jeu et la personnalité de ces deux artistes.

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