Culture

Art déco à Casablanca : Patrimoine en détresse

© D.R

Situé sur le boulevard Mohammed V à Casablanca, l’hotel Lincoln a été aujourd’hui rattrapé par l’histoire. Et pour cause, ce bâtiment témoin du patrimoine Art déco de Casablanca a fait tirer il y a quelque temps la sonnette d’alarme. Construit en 1916 par l’architecte français Hubert Bride, l’hotel Lincoln a été classé par un arrêté du ministère de la Culture qui date de 2000 patrimoine historique. En effet, vu la vétusté du bâtiment la seule solution, c’est de le préserver en le restaurant. Cependant, rien n’a été réalisé dans ce sens.
Le propriétaire du bâtiment a même souhaité le démolir afin de le remplacer par un autre immeuble pour des habitations. Cette idée a fait l’objet de plusieurs débats et a été vivement combattue par l’association Casa Mémoire ainsi que l’Ordre des architectes. A partir de ce moment, la situation a connu un blocage, l’hôtel n’a pas été détruit, mais il n’a pas subi de restauration non plus.
Jour après jour, une partie de l’hôtel s’effondre et menace de mettre en danger la vie des promeneurs du boulevard Mohammed V. Il y a quatorze ans que le premier éboulement d’une partie de l’hôtel Lincoln s’est produit. Et le 12 avril 2004, une autre partie s’est effondrée, faisant un mort et plusieurs blessés parmi les squatters qui s’y sont installés depuis. Pour assurer la sécurité des citoyens, une partie du boulevard Mohammed V a donc été fermée à la circulation jusqu’aujourdhui. Laissé à l’abandon pendant des années, l’hôtel menace aujourd’hui de s’écrouler.
En outre, ce bâtiment, témoin de l’histoire architectural du Maroc, continuera à s’effondrer si rien n’est fait pour le restaurer et le préserver.
Cependant, il faudrait arriver à instaurer une certaine prise de conscience.
Une prise de conscience qui pourrait éviter de détruire les monuments historiques du Maroc.
Et l’hôtel Lincoln n’est pas le seul bâtiment qui symbolise l’architecture Art déco de Casablanca. C’est un bâtiment parmi tant d’autres qui méritent d’êtres entretenus. Mais selon Fouad Akalay, le directeur général de l’agence Archimédia, « beaucoup de bâtiments ont été détruits depuis trente, quarante ans, il ne se passe pas une année, sans qu’un bâtiment à valeur patrimonial ne soit détruit » et d’ajouter : « L’hôtel d’Anfa où a eu lieu la conférence d’Anfa en janvier 1943 a été lui aussi démoli, on ne peut pas démolir un monument qui a connu une réunion aussi prestigieuse ».
Mais ceci n’est pas le vrai problème, comme l’a déclaré M. Akalay, en supposant que ce bâtiment n’était pas interessant sur le plan architectural, ce n’est pas une raison pour le détruire.
Car on ne doit pas détruire des lieux qui sont des repères de l’histoire, de la mémoire.
Les monuments de Casablanca ont continué à être détruits sans imposer aucune restriction, sans garde fous.
Ces monuments représentatifs de l’architecture Art déco étaient considérés comme le symbole de la présence des Français au Maroc. Après l’Indépendance, les autorités ont décidé d’entreprendre une action de démolition des bâtiments légués par la colonisation.
En outre, après avoir chassé le colon, on aurait voulu chasser son héritage qui témoigne de sa présence à un certain moment de l’histoire.
En effet, même les noms des rues ont été modifiés par des noms marocains. C’était une sorte de volonté d’effacer cette mémoire. Cela pourrait peut-être s’expliquer par la naissance d’une volonté de retrouver l’identité culturelle arabo-musulmane.
Par ailleurs, après la destruction de certains monuments, il y a eu, à un certain moment, une certaine prise de conscience.
«A un moment il ya eu une prise de conscience et l’hôtel Lincoln est juste le monument qui va marquer le démarrage de cette prise de conscience», déclare Fouad Akalay.
Et d’ajouter : «Ce bâtiment n’est ni plus ni moins important que d’autres monuments qui sont tombés avant lui ou après lui». Cependant, l’hôtel Lincoln représente un moment de l’histoire, un moment qui selon M.Akalay où la société civile, les architectes se sont manifestés et ont déclaré qu’on ne peut guère démolir impunément des repères de l’Histoire. Cela démontre qu’il a fallu que les Marocains prennent conscience de la nécessité d’accepter leur héritage.
Un héritage qui a été légué par la France. « Les Marocains ont du accepter leur héritage coloniale », déclare Fouad Akalay. C’est un phénomène d’acceptation.
Mais plusieurs pays ont vécus cette situation. Ce n’est que récemment que l’Espagne a accepté qu’elle était pendant sept siècles arabe. Ce pays a finalement réalisé qu’il avait de la chance d’avoir un patrimoine de cette richesse, ce patrimoine devient aujourd’hui un objet de tourisme.
Le Maroc pourrait peut-être un jour suivre l’exemple de l’Espagne qui a fini par accepter le legs architectural arabo-musulman et le préserve.

Articles similaires

Culture

Villes intelligentes : Seconde édition du salon pédagogique, cette fois-ci à Agadir

Après Casablanca c’est au tour de la ville d’Agadir d’accueillir la seconde...

Culture

Elle présente ses œuvres pour la première fois au Maroc: L’artiste internationale Myam expose à l’espace «Cowork & Live»

L’espace «Cowork & Live», situé à Casablanca dédié à la synergie créative,...

Culture

«Perles d’Art» : Une exposition qui célèbre la créativité internationale

Prévue le 27 avril à la galerie «Living 4 Art» à Casablanca

Culture

La série américaine «Flight 103» sera tournée au Maroc

Le Maroc continue d’accueillir le tournage de grandes productions étrangères. Il accueille...