A vue d’oeil : la salle de ventes de Casablanca n’a rien à envier aux salles professionnelles en Europe. Un espace tout en profondeur accueille le visiteur. Cet espace a été aménagé de façon à garantir des conditions de confort aux enchérisseurs. Deux écrans géants permettent aux retardataires de suivre de près le marteau du commissaire-priseur. Un bureau d’estimation est ouvert tous les jours. Quiconque possédant une pièce, susceptible de faire l’objet d’une vente, peut l’expertiser gratuitement. La salle de ventes de la Compagnie marocaine des oeuvres & objets d’art (CMOOA) a été réfléchie de façon à répondre de A jusqu’à Z aux circuits de la vente. De l’estimation jusqu’à la vente, elle prend en charge l’objet et en assure l’authenticité. “C’est un lieu dont tout le monde a besoin“, explique Hicham Daoudi, directeur de la CMOOA. Il ajoute que la salle “aide le vendeur, tout en protégeant l’acheteur“.
La construction de cet espace est intervenue après le succès de quatre ventes de prestige, menées par la CMOOA. Fondées essentiellement sur les peintures orientalistes, ces ventes ont prouvé qu’un public d’amateurs existe au Maroc. Avec la salle de Casablanca, la CMOOA élargit son champ d’activité. Elle ne s’intéresse plus exclusivement aux tableaux et aux meubles d’époque, mais à tout objet pouvant trouver un acheteur. L’acheteur y trouvera des tableaux orientalistes et modernes, des sculptures, des instruments de musique, des pièces de monnaie, des livres et manuscrits, des meubles, des bijoux et des armes anciennes. Le seuil de réserve ne constitue plus une barrière infranchissable pour les petites bourses. Dans la vente de février, il existe des lots à 400 DH.
Il est prévu d’organiser une vente par mois dans la salle de la CMOOA. Mais faute “de ressources humaines et financières“, une vente sera organisée tous les deux mois, pour le moment. Chaque opération sera accompagnée d’un catalogue qui n’a rien à envier à ce qui se fait de meilleur en Europe. Tous les objets des enchères y sont répertoriés.
Dès l’opération inaugurale, la CMOOA tient à montrer qu’elle a élargi le rayon de ses activités. En plus des tableaux et meubles, des livres sont mis en vente. Ils intéresseront assurément les bibliophiles du pays. Parmi les lots les plus curieux de cette vente : un “dictionnaire des personnalités passées et contemporaines du Maroc“. C’est le Bottin de 1934. Par ordre alphabétique, les personnalités françaises et marocaines, qui comptaient dans le pays, sont mentionnées avec leurs photos. Très probablement que ce livre constituera l’un des moments forts de la vente. De nombreuses personnes seront curieuses de savoir si leur père ou grand-père est cité parmi les notables du pays. Autre pièce de qualité : un tableau de Henri Pontoy, datant de 1939, et intitulé “Casbah au pied des montagnes“. Par sa taille, cette oeuvre est exceptionnelle. Pontoy est surtout connu par de petits et moyens formats. Avec ce tableau de 2 mètres, il a peint un très beau paysage, fondé sur l’harmonie des contraires et le mariage de la terre ocre avec la neige.
Par ailleurs, la salle de la CMOOA ne sera pas seulement un espace de vente. Son directeur explique qu’elle abritera également des expositions pour encourager de jeunes créateurs. Son emplacement au coeur du quartier Bourgogne est emblématique du frémissement artistique qui s’y produit. La rue Jaafar Esnaani, où se situe la salle de ventes, est appelée à devenir l’un des lieux vivants des arts à Casablanca. Elle abrite déjà des galeries et une librairie spécialisée dans les beaux livres.
La salle de la CMOOA est un signe de l’évolution du marché de l’art au Maroc. Des salles de vente sont nécessaires au pays. Elles régulent le marché, permettent de coter les artistes. Loin des mensonges dont certains peintres nappent leurs oeuvres. Quand une salle de ventes fait son travail correctement, elle barre de surcroît la route à cette bête hideuse – le faux – qui ronge les oeuvres d’art au Maroc.