Culture

Cinéma : Daaaaaalí, aïaïaïaïaïaïaïe !

© D.R

Il fallait bien cinq grands noms pour tenter de cerner cette figure flamboyante et excentrique qu’était Dalí. Comme le souligne le réalisateur, «Dalí le disait lui-même, sa personnalité était probablement son plus grand chef-d’œuvre. Mon film raconte modestement cela».

Près de trente ans après sa mort en 1979, à Figueres, en Espagne, Salvador Domingo Felipe Jacinto Dalí i Domènech faisait encore parler de lui avec une exhumation de son corps pour un test de paternité. Fin juillet 2017, à la demande de Pilar Abel, une équipe de scientifiques a dû soulever la dalle en pierre de sa sépulture, pesant une tonne, pour prélever des os, des cheveux et des ongles de l’artiste afin de faire une analyse ADN qui prouva, définitivement, que la plaignante catalane de 61 ans n’était pas la fille cachée du grand maître. Voilà une histoire romanesque qui aurait fait une excellente accroche pour un film consacré à Dalí.

Une accroche coda
Au lieu de cela, le réalisateur Quentin Dupieux propose une évocation du film Le chien andalou de Salvador Dalí et de Luis Buñuel, amis et co-réalisateurs en 1928. Un piano- fontaine nécrophilique servira donc d’accroche et de coda. Bel hommage visuel. Entre ces deux clins d’œil, le film relate un entretien manqué entre l’artiste et une apprentie journaliste (Anaïs Demoustier), entrecoupé d’un rêve aussi freudien que buñuelien. Dupieux se fait illusionniste et mélange des interprétations de cinq Dalí, à différents âges, de la vie et de la fantasmagorie dalienne. Vous trouverez donc, pour ce même rôle: Gilles Lellouche, Edouard Baer, Jonathan Cohen, Pio Marmaï et Didier Flamand. Il fallait bien cinq grands noms pour tenter de cerner cette figure flamboyante et excentrique qu’était Dalí. Comme le souligne le réalisateur, «Dalí le disait lui-même, sa personnalité était probablement son plus grand chef-d’œuvre. Mon film raconte modestement cela».

Dupieux cale mal ses pas dans ceux de Haynes
L’idée de portrait croisé avec plusieurs interprétations est excellente. Elle avait été brillamment exploitée par le réalisateur Todd Haynes, dans le film I’m not there, dépeignant les vies du chanteur Bob Dylan, en 2007. Dans cette fresque, plusieurs touches oniriques suggéraient pour chacune des six incarnations du chanteur une idée de voyage intérieur. Au sein d’une distribution remarquable, l’actrice Cate Blanchett et le jeune afro-étasunien Marcus Carl Franklin se démarquèrent pour jouer Dylan. Il est bien regrettable que Dupieux n’ait pas suivi davantage les pas audacieux de Haynes.

La maîtrise inégalée de l’improvisation de Baer
Saluons, tout de même, le choix astucieux du roi de l’improvisation : Edouard Baer. Comme une lumière dans la nuit, l’acteur campe le peintre avec des mimiques et une diction qui frôlent le génie d’un bohémien atypique, au sommet de son art. Pierre Niney et Alain Chabat, au départ annoncés au casting, se sont retirés parce qu’ils n’avaient, selon eux, rien à apporter à Dalí. Il est vrai qu’il est bien difficile de rivaliser avec Baer. Que retenir de ce film : une béquille, un tunnel, un piano ou un cowboy prêtricide, voire simplement une moustache. Un Dalí mégalomane, narcissique, grandiloquent et dépensier apparaît en toile de fond.

Dans la scène à l’hôtel, Dalí insiste sur sa grande soif et son envie d’eau gazeuse. Une allusion directe est faite à Perrier, une marque pour laquelle le peintre réalisa une affiche publicitaire en 1969. Plus tard, Perrier rendit aussi hommage à Dalí dans une campagne publicitaire en 2009, en reprenant la célèbre thématique des montres molles. Au final, ce film fait penser à une autre publicité de 1988 pour Préparation H, où un simple tabouret et une petite mélodie composée de sept récurrences de l’onomatopée «aïe» permettaient de comprendre l’utilité du produit. Peut-être qu’une crème pourrait servir de béquille à ce film.

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