Cinema

Melita Toscan du Plantier : «Le FIFM n’est pas un festival dédié à l’Amérique»

© D.R

ALM : Quelle est la particularité de cette édition 2014 du FIFM au niveau de la sélection des films ?

Melita Toscan Du Plantier : La sélection confirme une exigence de cinéma, souvent propice au talent, qui se manifeste particulièrement dans la compétition, témoin d’une vérité intangible de souligner la quête de sens des œuvres présentées.
Ainsi, l’enfance et ses conséquences s’y montrent comme préoccupation du temps qui fuit et s’efface, et la condition humaine comme l’intérêt des cinéastes pour le goût des autres.
22 nationalités sont représentées à travers 87 films, dont 13 premiers films et particulièrement 8 films en compétition.
Les films «Coup de cœur», essentiellement consacrés au cinéma marocain, témoignent de sa vitalité et de sa diversité, les films hors compétition montrent des auteurs à la rencontre d’un large public, certains en route pour les Oscars, le film d’ouverture «The Theory of Everything», le film «The Imitation Game», et le film de clôture «A Most Violent Year», du déjà confirmé J.C. Chandor.

Parlez-nous du jury qui a toujours été une exigence de qualité pour le festival de Marrakech ?

Depuis toujours, les jurys du festival ont fait une place d’honneur aux cinéastes, substantifique moelle de l’art qui nous intéresse. Cette année, c’est une «reine» reconnue comme telle dans le monde, Isabelle Huppert, qui préside aux destinées des quinze films de la compétition. Pour ce faire, elle sera entourée de cinéastes qui imprègnent de leur sceau l’univers d’aujourd’hui: Ritesh Batra qui, avec «The Lunchbox», a montré que la valeur du talent n’attend pas le nombre des années, mais augure d’un bel avenir pour le cinéma indépendant indien ; Cristian Mungiu, Palme d’Or avec «4 mois 3 semaines et 2 jours»; Susanne Bier, Oscar du meilleur film étranger avec «Revenge» ; Mario Martone, cinéaste italien reconnu pour la rigueur de ses mises en scène ; Bertrand Bonnello, cinéaste français dont l’œuvre, souvent exposée à Cannes, est aussi en route pour les Oscars avec «Yves Saint Laurent» ; Moumen Smihi, digne représentant du cinéma d’auteur marocain, déjà sélectionné en compétition et hors compétition au festival ; Alan Rickman, un des plus grands acteurs anglais passant brillamment du théâtre, avec «Les liaisons dangereuses», au cinéma, de «Love Actually» à «Die Hard», et perpétuant ainsi la grande tradition du talent des acteurs britanniques ; et Mélanie Laurent, qui souligne la tendance très intéressante que l’on observe dans le cinéma américain d’abord, européen ensuite, des acteurs passant à la mise en scène, nous faisant «adopter sa respiration».
 
Chaque année, les mordus du cinéma attendent les visages américains qui viennent au festival de Marrakech. Quelle est la présence américaine cette année?

Le festival n’est pas un festival dédié à l’Amérique, mais bien un festival international dans lequel le cinéma américain a sa place, toute sa place mais rien que sa place. Pour exemple cette année deux films américains sont en compétition, «The Keeping Room» et «Things People Do», accompagnés de leurs metteurs en scène. Le film de clôture «A Most Violent Year» est américain, et les hommages, qu’ils soient à Jeremy Irons ou Viggo Mortensen (d’origine danoise mais né à New York donc aussi américain que Martin Scorsese qui y est né lui aussi de parents immigrés italiens) sont rendus à des acteurs dont l’essentiel de la carrière a honoré le cinéma américain, à l’instar d’Alan Rickman, acteur anglais membre du jury, de Zoe Cassavetes, réalisatrice américaine membre du jury cinécole, et de Danny Glover, passant du statut d’acteur américain à celui de producteur d’un film marocain.

Qu’en est-il des hommages cette année ?

En plus de Viggo Mortensen et de Jeremy Irons dont nous venons de parler, le festival, toujours fidèle à sa vocation de créer des liens, rend hommage à Adel Imam, star égyptienne, mais bien au-delà puisque le monde arabe le reconnaît comme tel. Enfin, Khadija Alami et Zakaria Alaoui, producteurs marocains, sont honorés pour avoir su convaincre et persuader les producteurs étrangers du talent du Maroc à accueillir et à produire des films de grande audience comme «Captain Philips», «Gladiator»…
 
Pourquoi avoir choisi de mettre à l’honneur le cinéma japonais ? Et quelle délégation nippone pour cette édition ?

Fidèle à sa tradition, entamée il y a 11 ans, d’honorer chaque année un grand pays de cinéma, le festival a choisi cette année le Japon. Cet hommage s’articulera autour des anciens grands maîtres du Soleil Levant, Ozu, Mizogushi, Naruse, Akira Kurosawa, Shohei Imamura, et du cinéma d’aujourd’hui reconnu internationalement et incarné par Kore-eda, Kyioshi Kurosawa, Naomi Kawase, Nobu Sawara et Ryuishi Hiroki.

Parlez-nous des master class…

Malgré leur nom, les master class sont des cours de cinéma, plutôt que des leçons, donnés par des auteurs confirmés aux styles différents, illustrant les facettes du cinéma. Cette année nous avons la chance d’avoir parmi nous Benoit Jacquot, que l’on pourrait classer dans les romantiques français, imposant une grammaire du cinéma sans cesse renouvelée. Il y a aussi Bille August, cinéaste danois aux deux Palmes d’Or, montrant que l’on peut être le digne héritier de Bergman.
Enfin, Alex de la Iglesia est sans doute le cinéaste espagnol le plus important après Almodovar, qui a su renouveler le genre fantastique ou le polar en Espagne tout en gardant l’intégrité flamboyante de sa belle nature ibérique.

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