«Le temps du livre » semble être la réponse du secrétariat d’Etat chargé de la Jeunesse à l’éternelle question : Comment réhabiliter cette source de savoir ? Dans un pays en développement, où le taux d’analphabétisme est très élevé et où l’accès à l’enseignement n’est pas assuré pour tout le monde, la question se transforme facilement en un casse-tête chinois. «Nous n’avons pas la prétention de résoudre ce problème qui se pose dans de nombreux pays. Devant l’urgence de la situation de nos jeunes, il nous était impossible de garder les mains croisées. Il nous fallait agir. Nous avons donc décidé de commencer par quelque chose», a déclaré le secrétaire d’Etat chargé de la Jeunesse, Mohamed El Gahs lors d’une conférence de presse, tenue mercredi soir à Rabat. Ce point de départ n’est autre que l’opération «Le temps du livre» dont le principe est très simple. Elle se base sur la collecte de livres afin d’en doter le maximum de centres de lecture (bibliothèques scolaires ou communaux, centres culturels, maisons de jeunes…). Cette collecte de livres neufs ou utilisés, entamée jeudi 15 janvier, est organisée dans toutes les délégations du secrétariat d’Etat, les maisons de jeunes et les centres de protection de l’enfance. Pour être plus proches des gens, plusieurs points de collecte vont être improvisés dans plusieurs grandes places publiques à travers le Royaume. D’ailleurs, une campagne publicitaire est programmée sur les deux chaînes de télévisions tout au long de la durée de cette campagne. Et ce n’est qu’au bout de ce mois de collecte que le véritable travail commencera. Les livres ainsi collectés devront trouver leur place sur les rayons d’espaces de lecture existant ou qu’il va falloir réhabiliter ou créer. Là est le début de la mission principale de cette opération, à savoir rapprocher le livre du jeune, au moindre coût, de lui permettre d’assouvir sa soif du savoir où qu’il soit, indépendamment de ses livres et programmes scolaires. Ces derniers, surchargés, sont de plus en plus montrés du doigt comme une raison principale de la désaffection des jeunes de lire. Pour relever ce défi, plusieurs actions sont prévues dans le cadre du «Temps du livre». Rencontres, débats et tables rondes, animées par de grands écrivains et penseurs marocains, seront organisés. Les bibliothèques ne seront plus uniquement un espace de lecture mais d’épanouissement culturel et artistique avec l’organisation régulière d’ateliers de création littéraire et poétique. Une multitude d’actions qui seront initiées par des personnes qualifiées que le secrétariat d’Etat se chargera de recruter parmi ses fonctionnaires ou les acteurs associatifs. Le programme est ambitieux et ses partenaires débordent d’enthousiasme. L’UNESCO et l’UNFPA dont les responsables n’ont pas tari d’éloges sur ses objectifs à moyen et à long terme. Les responsables de la presse nationale, associés également à l’opération, y voient en outre une occasion pour faire décoller leurs ventes. Mettant en évidence l’étroitesse du marché de la presse écrite au Maroc, Abdelmounïm Dilami et Younes Moujahid, respectivement président de la Fédération marocaine des éditeurs de journaux (FMEJ) et secrétaire général du Syndicat national de la presse marocaine (SNPM), ont attiré l’attention contre la menace de fermeture plusieurs titres et ce, en dépit du climat démocratique favorable à la liberté d’expression et partant la diversité du marché. Pour eux, encourager la lecture ne peut se faire sans encourager l’accès aux journaux. «Le temps du livre» risque ainsi d’élargir ses horizons pour devenir «Le temps de la lecture». Lire un journal, se tenir informé des nouveautés qui marquent un monde en perpétuelle ébullition, fait également partie des priorités du programme. Le département chargé de la Jeunesse ne dispose certes pas de tous les moyens à même de garantir une véritable révolution dans les habitudes de lecture des Marocains, mais «l’essentiel est de pouvoir mobiliser le plus grand nombre de personnes et de leur faire comprendre l’utilité de ce combat pour la démocratisation de l’accès au livre», a expliqué M. El Gahs. «Il est certain que les moyens pour mener à bon port ce grand programme s’avèrent insuffisants, mais ce n’est point en spéculant sur la crise qu’on va la résoudre», a-t-il insisté. C’est que les défis auxquels le Royaume doit faire face à l’heure de la mondialisation sont très nombreux. «Il ne peut y avoir d’Etat démocratique et moderne qu’en présence d’une société de lecteurs immunisés par l’appropriation des connaissances à même de permettre l’expression de l’identité et la compréhension des défis extérieurs», a-t-il ajouté.