R.Kelly : Tp2.com
Le roi du R’n’B nous livre pour les fêtes son cinquième album. Après le coup d’éclat de R, son précédent double opus, R. Kelly était attendu au tournant. Sans nullement décevoir, TP-2. com marque cependant les limites artistiques de notre homme. Rien, en effet, ne différencie cet essai de son prédécesseur : même structure mélodique des morceaux, même gimmicks vocaux et instrumentaux… Quelques bombes sortent quand même du lot (dont l’incroyable "A Woman’s Treath"). Impressionnés par son talent indéniable, on a peut-être trop demandé à R. Kelly. Mais un artiste, même au dessus de lot, peut-il sauver à lui seul le R’n’B ? –Amon
Depuis que le single "I Wish" était "on the air" (en passages radio), on le savait : le R. Kelly nouveau n’est pas du meilleur cru. Il faut dire qu’après les "I Believe I Can Fly" (1997), "I’m Your Angel" (1998 en duo avec Céline Dion) et autres "If I Could Turn Back The Hands Of Time" (1999), il fallait s’attendre à un creux de la vague. On n’aurait pourtant jamais imaginé que ce cinquième opus soit à ce point dépouillé des mélodies qui avaient apporté la gloire à RK, y compris dans ses productions pour Toni Braxton, Mary J. Blige, Luther Vandross, Janet Jakson… Ici, l’artiste préfère rapper à fond son rhythm & blues plutôt que de le chanter. En revanche, l’artiste qui ne sourit jamais en photo (chez les rappeurs, c’est ringard…) n’est pas avare de titres : au total 19 morceaux composent ce disque. Même si certains comme "I Wish" y sont en deux versions, on peut quasiment parler de double album. Malheureusement la quantité ne donne jamais la qualité et Bob (diminutif de Robert, son prénom) devra admettre que ce sont feu les ballades variétés arrosées de sirop qui lui vont le mieux, ne lui en déplaise.
Born to sing : En vogue
Véritable machine à conquérir les charts, on doit le quatuor féminin En Vogue à la clairvoyance de deux membres fondateurs de Club Nouveau (Denzil Foster et Thomas Mc Elroy) qui, à la fin des années 80, recrutèrent sur casting quatre jolies jeunes filles disposées à se mouler dans un concept mûrement réfléchi. Dès le premier single ("Hold On"), il est évident que la formule envisagée était la bonne puisque Born To Sing, l’album sorti dans la foulée, devient disque de platine en quelques semaines. La recette est simple : des voix accrocheuses, un marketing savamment étudié pour appuyer une mixture musicale qui mêle rythmiques hip-hop, funk et R&B. On a rarement entendu carrière aussi rondement menée depuis les Suprêmes de Diana Ross.
Janet Jackson : Janet
Chaud devant : la soeur cadette de Michael, si elle a de qui tenir côté filiation, est plus extravertie que son frère. Entre Madonna (qu’elle rappelle par ses provocations et sa réussite à une époque où la parité n’est pas de mise) et Prince (dont elle pourrait être un équivalent en jupons, la mégalomanie et le génie tourmenté en moins), elle n’hésite pas l’ombre d’une seconde à exhiber sa sexualité dans des hits (et des clips) torrides. Produit par Jimmy Jam et Terry Lewis qui commencèrent à façonner le son de Janet à partir de son troisième album, l’excellent Control sorti en 1986, Janet distille un funk échevelé où le rappeur Chuck D. de Public Enemy vient pousser la chansonnette. "Again" et "That’s The Way Love Goes" sont des hits. Authentique chanteuse noire engagée (elle a participé au film "Poetic Justice" avec Tupac), ses disques sont moins connus que ceux de son frère, mais n’en demeurent pas moins aussi indispensables que l’inusable Thriller.
Ben Harper ne tient pas au tape-à-l’oeil, au clinquant, à l’accessoire.
C’est cette sobriété dans l’expression et la présentation de soi qui lui a valu une bonne partie de son succès à partir du milieu des années 90.
Prophète des charts aux solos façon Hendrix rassasié, l’Américain a déroulé un répertoire blues-rock chanté d’une voix plaintive propre à séduire un jeune public avide d’authenticité. Ce double « live » arrive donc à point nommé.
Un disque électrique, l’autre acoustique, l’ambiance serait presque au recueillement : les morceaux sont joués avec rigueur par Harper et son équipe.
Le public complice salue les tubes (dont un "Sexual Healing" torve et hululé, un "Mama’s Got A Girlfriend Now" – presque – rigolard ou un "Whole Lotta Love" initié par Led Zeppelin) et semble écouter la prestation, au vu du niveau sonore de ses interventions, de façon quasi religieuse. Évidemment, pas d’émeute : Harper joue assis et sur une corde qu’il raidit. Mais c’est là son secret : il ne tient qu’à l’auditeur de se laisser aller à cet air ambiant que Ben agite si bien à coups de slide maigre et de voix fragile, mais, entend-on, inspirée.