Moonspell : Memorial
Le Portugal doit être baigné par une pleine lune permanente depuis quelques mois car nos lycanthropes sont sacrément énervés. C’est du moins ce que laisse à penser le retour d’un Moonspell la bave aux lèvres avec « Memorial», tranchant pour le moins avec leur deux derniers albums «Darkness & Hope » et le tiède « The Antidote ». Il est clair que la sophistication racée du sublime « Sin / Pecado » est remisée au placard, les expérimentations du terrible « The Butterfly Effect » enterrées, Moonspell est atteint d’une nouvelle crise de mutation et sort les crocs, comme à l’époque qui lui fit un nom, l’enchaînement de « Wolfheart » et du mythique « Irreligious ». « Memorial » entend d’ailleurs Waldemar Sorychta reprendre les manettes, lui qui officia sur « Irreligious», le groupe boucle la boucle comme un cycle de lune. Et Moonspell de reprendre par le menu les tournures qu’il déclama par le feu des années auparavant. Quitte à sonner comme une copie de lui-même. « Memorial » est un album épique et massivement impressionnant de puissance, à l’âme sombre et aux rythmiques profondes, aux instants de grandeur quasi-symphonique, l’ampleur prenant le pas sur le mur de son. Où est le Moonspell qui nous surprenait par ses contre-pieds majeurs ? Où est le Moonspell qui innovait en permanence et ne cherchait pas à rejoindre un style dont il avait écrit les lettres de noblesse ? Ainsi, les nouveaux venus qui ne connaîtraient pas le passé de Moonspell pourront y trouver leur compte avec un metal tendance gothique (terme ô combien galvaudé mais cédons à la tentation) et dark percutant. Ceux qui connaissent Moonspell pour ses prises de risques en seront déçus.
Bruce Springsteen : We Shall overcome, The Seeger sessions
De Bruce Springsteen , on ne retient très souvent qu’un surnom : « Le boss » . Pour tout dire, en écoutant Born in the USA, son plus grand succès, archétype d’une certaine forme de rock FM putassier qui a empoisonné les années 80, on pourrait bien se demander pourquoi. Et seule une rétroplongée dans son imposante discographie permet de comprendre l’œuvre. On comprend alors le caractère ironique du titre, la relation d’amour-haine qu’il entretient envers son pays, contrée natale du rock’n’roll et patrie chérie d’un Georges Bush qu’il déteste (au point de faire de ses derniers albums de violents pamphlets politiques). Continuant sa longue relation passionnelle et complexe avec sa terre natale, Bruce Springsteen revient avec un album de chansons du répertoire traditionnel, composées par Pete Seeger et intitulé : We Shall overcome, The Seeger sessions. Avec un tel hommage, le boss tourne une nouvelle page de sa très longue histoire musicale : réalise-t-il, comme à son habitude, un nouveau virage gagnant ? Une chose est sûre : cet album ravira bien entendu tous les fans du boss qui trouveront à son écoute un nouvel angle d’approche de la relation complexe et passionnée qu’il entretient avec sa terre natale.
Natacha Atlas : Mish Maoul
Alors donc, revoici la belle et pulpeuse Natacha Atlas.Après avoir chanté au sein du Transglobal Underground dans un registre électro/ world, après avoir sorti plusieurs albums sous son nom, celle qui a fait (re) découvrir la musique orientale à l’Europe, voire au monde en la mettant à la portée de toutes les oreilles et de toutes les cultures grâce à ce mélange dont elle a le secret consistant à injecter ces orientalismes dans des chansons pop et électro, revient donc avec un album presque entièrement écrit et composé par elle-même intitulé Mish Maoul. Aujourd’hui, Natacha Atlas a visiblement mis de côté le passé. Pas de DJ, le format pop à l’anglaise n’est pas non plus mis en avant. Enfin, pas tout le passé. Car sur Mish Maoul c’est la musique orientale qui domine. Ce que finalement sait le mieux faire la belle. Moins accessible peut- être pour notre culture pop occidentale, Mish Maoul est en tout cas un des meilleurs albums de Natacha Atlas.
Gnarls Barkley : St Elsewhere
Premier album (2006) et première collaboration du rappeur americain Cee-Lo et du producteur Danger Mouse (également américain, plus connu pour son Grey Album ) pour un résultat des plus brillants mélangeant élégance soyeuse et rythmique electro/hip-hop redoutable qui parvient parfois à ressembler à du rock. Quant à Crazy, c’est la chanson de l’année. Le résultat est particulièrement plaisant, à commencer par la fameuse Crazy, chanson sensuelle à la rythmique de guitare tout ce qu’il y a de plus groovy dominée par la so hot voix de Thomas Callaway qui tabasse vraiment. Finalement, la recette – mélange de samples (où semblent surnager quelques rares instruments acoustiques) combiné à la voix suave de Cee-Lo – est très réussie.