Culture

Enquête : Le bizutage, un rituel d’accueil «d’enfer»

© D.R

Comme chaque année, la rentrée scolaire n’est pas drôle pour les étudiants de première année qui ont à subir le fameux bizutage. Cette cérémonie dite «d’accueil» n’a d’accueil que le nom. Les nouveaux arrivants subissent les pires humiliations par les bizuteurs. Parfois, les bizutés restent marqués durant toute leur vie et ont des troubles psychologiques. Contrairement aux institutions comme ENIM, INSEA, EMI, IAV, EST et autres, les universités marocaines ne connaissent pas cette pratique. Le bizutage est devenu la grande tradition des grandes écoles supérieures. A l’Ecole nationale de l’industrie minérale (ENIM), le bizutage est loin d’être une partie de plaisir. «Les anciens n’hésitent pas à profiter de l’occasion pour harceler les filles et raser le crâne des garçons. Les étudiants internes sont les plus visés et subissent diverses formes de perversité et ce durant tout un mois. La nuit, on les fait sortir par la force», affirme un ancien étudiant de l’ENIM avant d’ajouter «ma cousine qui vient d’intégrer cette école est rentrée à la maison et ne veut plus y retourner. Le pire est que l’administration qui est au courant de ce qui se passe, ferme les yeux et s’abstient de tout commentaire». Une étudiante de l’Institut national de statistique et d’économie appliquée (INSEA) victime du bizutage durant toute une semaine déclare «avant d’avoir les clés de ma chambre, j’ai été obligée de faire le salut à mes anciens. Cela consiste à se mettre à genoux, se présenter et puis crier : mes respects mon supérieur. Durant les deux premiers jours à l’INSEA, c’était la grande alerte. Tenue spéciale, des ordres à longueur de journée. On était obligé de mettre nos vêtements à l’envers et porter nos livres dans un sachet noir sans oublier qu’on devait porter une paire de chaussures différente».
Selon une étudiante issue d’une école d’ingénieur, le bizutage a toujours été une pratique ordinaire au sein de son établissement. «L’accueil commence par des présentations humiliantes. Chacun doit citer son nom, prénom et poursuivre en se traitant d’imbécile et recommencer à chaque fois qu’un ancien le lui demande. Les bizutés doivent se nourrir par terre et manger directement dans les plats, même pas avec la main. Les garçons se font raser le crâne dès qu’ils arrivent. Tout le monde se sent très mal mais rares sont ceux qui le disent à voix haute. Nous subissons les moqueries de l’ensemble des présents».
La situation est d’autant plus déplorable en l’absence de disposition juridique en la matière. «Il n’y a pas de disposition légale concernant le bizutage au Maroc», souligne Abdelhafid Debbagh, directeur de la formation des cadres, au ministère de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur, de la Formation des cadres et de la Recherche scientifique. En France, la pratique du bizutage, en raison de ces abus, avait fini par être officiellement interdite sous le ministère de Ségolène Royal. Cette pratique qui est définie comme un ensemble d’actes humiliants ou dégradants en milieu scolaire est puni de six mois de prison et de 7500 euros d’amende. Des consignes de prévention ont été imposées aux chefs d’établissements pratiquant le bizutage. On continue en France à désigner sous le nom de bizutage un certain nombre de «cérémonies d’accueil» ou «journées d’intégration» des jeunes promotions, se voulant aujourd’hui une tendance plus humoristique et se donnant juste pour but de dissuader les nouveaux d’attraper la «grosse tête» du fait de leur admission et créer de fait un esprit de cohésion entre membres d’une même promotion.

Le bizutage banni en France

L’article 225-16-1 du code pénal français définit le bizutage comme «le fait pour une personne d’amener autrui, contre son gré ou non à subir ou à commettre des actes humiliants ou dégradants lors de manifestations ou de réunions liées au milieu scolaire ou socio-éducatif».
Cette infraction punit deux situations bien distinctes :
– soit la victime subit des actes humiliants ou dégradants
– soit la victime peut être amenée elle-même à faire subir à autrui des actes humiliants ou dégradants. Dans ce cas, celui qui organise l’agression est puni. Pour que l’infraction soit constituée, les actes doivent avoir été commis dans le cadre de manifestations liées au milieu scolaire ou socio-éducatif.

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