Culture

Entretien avec Hicham Massine, chanteur marocain: «Je suis presque sur la même voie d’Ammouri Mbarek tout en apportant une autre touche»

© D.R

Rencontré directement après les préparatifs du spectacle, célébré samedi soir à Rabat pour commémorer feu Ammouri Mbraek, le jeune artiste, Hicham Massine, révèle les dessous de cet événement dans la capitale. L’occasion pour ce musicien de se livrer sur l’art du défunt dont il est neveu.

ALM : Vous êtes habitué à commémorer feu Ammouri Mbarek près de son lieu de naissance. Pourriez-vous nous révéler les raisons du choix de Rabat pour cette célébration samedi dernier?
Hicham Massine : A vrai dire, le défunt est connu pour être un oiseau libre de son vivant. Il n’était pas sédentaire pour ainsi dire. Il est vrai que, notamment les deux dernières années, nous l’avons célébré dans son lieu de naissance. Mais au début, la commémoration était à Tafraout, puis Agadir. D’où cette cérémonie dans la capitale pour signifier qu’il se déplaçait. D’ailleurs, quand il était invité à animer un concert, les organisateurs devaient lui laisser un message auprès de la famille tellement il était injoignable ou au moins l’inviter quelques jours avant à cet effet. Mieux encore, la carrière artistique d’Ammouri Mbarek a débuté à Rabat où il était installé notamment au cours des années 70. Après quoi, il est parti à l’étranger. Puis il est revenu à Agadir avant d’aller à son lieu de naissance. Donc le défunt a des connaissances et un grand public à Rabat. En outre, sa musique est universelle. Aussi, le groupe «Ousmane» était monté par ses soins dans la capitale où il a travaillé avec Ahmed Aouatef et l’orchestre national. Pour rappel, nous avons un deuil près du lieu de naissance d’Ammouri Mbarek. Par l’occasion, nous sommes très fiers et heureux de faire cette célébration à Rabat où nous avons trouvé un grand soutien auprès des responsables locaux dans un laps de temps surtout que nous avons dû changer la salle par une autre en face. Nous les remercions vivement.

Qu’en est-il des nouveautés de la commémoration de cette année?
Déjà, c’est une première célébration à Rabat. Aussi, le thème du «rôle des groupes de musique» est une nouveauté. En plus, la troupe «Ousmane», dont le regretté était fondateur, était une source d’inspiration pour d’autres groupes amazighs. C’est pour montrer que le lieu de naissance de la première troupe de musique amazighe moderne était dans la capitale notamment dans le début des années 70. A l’époque, il y avait à ses côtés l’artiste Belaid Akkaf entre autres. Et même les intervenants à la conférence qui jalonne cette célébration sont éminents. C’est le cas entre autres d’Ahmed Assid, un des amis du défunt et qui sait beaucoup de lui. Aussi Taleb Ali, directeur de la chaîne amazighe, avait une relation très solide avec mon oncle. De son côté, Ibrahim Akdim était l’un de ses amis intimes. A son tour, Ayoub Tourabi, secrétaire général du syndicat professionnel pour la protection et le soutien de l’artiste y était invité parce que le défunt nourrissait un rapport avec les droits dans le secteur.

En tant que neveu de l’artiste disparu, vous êtes bercé par son univers musical. Que faites-vous pour faire perdurer son héritage?
En fait, je suis issu de l’école artistique du défunt qui est mon oncle maternel. Avec lui j’ai commencé la musique en 2002. Une relation artistique qui a duré 13 ans jusqu’à son décès. Donc, sa musique m’a influencé surtout quand je le voyais chanter à la télé. Depuis l’enfance, je pouvais performer ses œuvres. De même, le public m’identifie quasiment à lui quand je suis sur scène. Et c’est normal l’influence est totale puisque j’ai appris auprès de lui. J’ai passé de très bons moments avec lui ici et ailleurs. Il nous manque parce que la jeunesse désire innover en chanson amazighe alors qu’il était en avance sur son temps. Il en est même l’innovateur en la poussant à aller de l’avant. Donc les influences d’Ammouri Mbarek commençaient à peine. Hélas, il est parti à l’au-delà. Heureusement qu’il a légué une école. C’est comme s’il était toujours parmi nous. Pour l’heure, je suis son porte-flambeau. Et je compte continuer sur sa voie pour être à la hauteur du grand public marocain.

Lors des préparatifs du spectacle, il semblait que vous avez introduit de nouveaux styles à la musique du défunt. Quel commentaire en faites-vous ?
C’est plutôt juste un changement de la sonorité des guitares. Après, la structure est la même que celle d’Ammouri Mbarek qui a travaillé avec de l’overdrive entre autres dans les années 80. C’est ainsi qu’il a servi la musique universelle plus tôt. Il est vrai qu’à un moment il n’était pas bien assimilé par certains de par leur oreille musicale, cependant il commence à l’être actuellement auprès d’un large public.

Vous avez interprété lors de cet hommage au défunt des œuvres qu’il dédiait au nomadisme, entre autres. Est-ce pour annoncer déjà une tournée que vous organiserez pour les prochaines commémorations ?
Au fait, nous voulons nous approcher du grand public élitiste d’Ammouri Mbarek. Nous voulons cibler ces mélomanes, qui ne sont pas seulement au Souss et amazighophones. Il a aussi des fans dans le Rif ainsi que de par le Maroc bien qu’ils ne parlent que le darija. Peut-être que cet événement sera organisé à Tanger, Nador ou Al Hoceïma. Et comme il était ambulant, nous voulons emprunter cette voie de son école. Aussi sa commémoration se déplacera d’une ville à l’autre pour véhiculer le message d’Ammouri Mbarek auprès du grand public.

Le regretté chantait aussi pour la nature, les oiseaux et même les abeilles. Veuillez bien nous en expliquer les dessous de ses choix?
Il est vrai que ses paroles étaient inspirées de la nature. Déjà, sa poésie c’est de la métaphore. Il traitait avec des poètes élitistes et contemporains voire en vers libre comme feu Ali Sedki Azayku. Donc, à chaque fois que mon oncle trouvait son compte dans une poésie, il la reflétait dans son art. Pour ma part, je suis presque sur la même voie tout en apportant une autre touche quand je fais mes œuvres tout en gardant des compositions issues de l’école d’origine. Mais quand il s’agit de commémoration, je préfère interpréter les œuvres du défunt.

Lors de cette cérémonie, vous vous êtes produits avec des artistes de par le Royaume et de l’étranger. Comment avez-vous coordonné ?
Déjà, la musique de mon oncle est académique. Il suffit d’un jour de répétition et ca marche. La langue musicale étant un dénominateur commun. C’est ainsi que nous nous arrangeons sur la scène.

Un avant-goût de vos projets ?
Mon nouvel album sera de sortie après le Ramadan. Aussi, j’animerais des concerts à Agadir à l’occasion du 8 mars. Après quoi, j’ai quelques dates réservées à l’étranger notamment en France. Par la suite, je continuerai à travailler sur mon deuxième album qui bénéficie du soutien du ministère de la culture au titre de 2024.

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