L’exposition «Maria Helena Vieira da Silva et Arpad Szenes. Une histoire d’amour et de peinture» vient d’être inaugurée au MMVI de Rabat. Elle donne à découvrir des œuvres majeures de deux artistes reconnus à l’échelle internationale.
Le Musée Mohammed VI d’art moderne et contemporain de Rabat (MMVI) accueille une exposition majeure du couple d’artistes de renommée mondiale, en l’occurrence la Portugaise Maria Helena Vieira da Silva et le Hongrois Arpad Szenes. Baptisée «Maria Helena Vieira da Silva et Arpad Szenes. Une histoire d’amour et de peinture», cette manifestation d’envergure est organisée pour la première fois en Afrique. Elle regroupe une sélection de 100 œuvres provenant de la collection de la Fondation Arpad Szenes – Vieira da Silva, exposée au musée de Lisbonne, mais aussi de la Fondation Millennium bcp, du Métropolitain de Lisbonne et d’autres collections privées. «Les œuvres exposées de ces deux artistes présentent ainsi une vue générale de leurs parcours artistiques majeurs. Les visiteurs auront l’occasion de découvrir deux âmes étroitement liées tant dans leurs œuvres que dans leur vie», indique à ce sujet Mehdi Qotbi, président de la Fondation nationale des musées. Et d’ajouter : «Leurs créations, bien que différentes, reflètent une grande cohésion et une profonde spiritualité, fruit de 55 ans de vie commune enrichissante. Ensemble, ils ont contribué à enrichir le paysage artistique contemporain du 20ème siècle». António Gomes de Pinho, président de la Fondation Arpad Szenes-Vieira da Silva, indique pour sa part que «c’est la première fois qu’un ensemble aussi important d’œuvres des deux artistes, offrant une vision globale de leur travail, est présenté sur le continent africain, dans la capitale d’un pays qui, à l’exception évidente de l’Espagne, est le plus proche voisin du Portugal».
Un parcours à deux
Le public découvre ainsi 100 œuvres remarquables accompagnées des photos et autres documents enrichissant certains moments, lieux et expériences de deux artistes. L’ensemble des pièces rassemblées permet de suivre le parcours et l’évolution de l’œuvre de deux peintres. «Le parcours de l’exposition dévoile une vision globale de l’importance de ces deux artistes dans le contexte de la création contemporaine du XXe siècle et en particulier de l’École de Paris à laquelle ils ont tous deux appartenu», expliquent Marina Bairrão Ruivo et Abdelaziz El Idriss, commissaires de l’exposition. Et d’ajouter : «Bien que leur référence commune soit la représentation spatiale, les réflexions plastiques de Vieira da Silva et d’Arpad Szenes ont rapidement divergé». En effet, Vieira explore l’espace à travers les structures qui constituent la base de son langage pictural, la grille et la spirale, qui permettent de cantonner et de multiplier différents espaces sur une même surface. Arpad, quant à lui, opte d’abord pour des représentations plus figuratives, préférant ensuite le potentiel de l’abstraction, exploitée principalement sur ses paysages, réels ou imaginaires, où les textures, la lumière et l’atmosphère sont considérées comme des éléments centraux. Les différences et les similitudes dans la peinture d’Arpad et de Vieira au fil de décennies reflètent, outre leurs recherches et réflexions plus conceptuelles et intellectuelles, les caractéristiques de leur personnalité et leurs traits émotionnels.
55 ans de vie commune
Inséparables dans la vie comme dans la peinture, Arpad Szenes et Vieira da Silva se sont rencontrés à Paris en 1928, se sont mariés en 1930 et ont vécu ensemble jusqu’à la mort d’Arpad en 1985. Ce sont 55 ans d’une vie commune d’une richesse exceptionnelle, aussi bien sur le plan créatif qu’affectif. Leurs œuvres respectives sont à la fois très différentes et indissociables, proviennent des mêmes sources et résultent d’une vie commune intense et enrichissante. La ressemblance entre leurs tableaux dépasse peut-être le côté formel et traduit plutôt une compréhension commune de l’art, une attitude exigeante et des interrogations plastiques que chacun a explorées à sa manière. «Plus complexe et tourmentée, Vieira da Silva a trouvé chez Arpad Szenes protection et encouragement. Elle lui transmettra le sens de la rigueur et la persévérance et lui, d’une certaine manière, la libérera de ses angoisses. C’est dans cet esprit que l’on peut parler de complémentarité entre leurs œuvres. Arpad Szenes fut le maître érudit et attentif de Vieira da Silva, se mettant pour elle volontairement en retrait. Malgré cela, cet exemple d’union, marqué par la durée et l’intensité, aboutira au destin remarquable de chacun», notent les commissaires. Il faut dire que cette exposition réunit deux peintres associés dans leur travail mais aussi dans la vie. Vieira da Silva est devenue plus célèbre mais sans rivalités parce qu’Arpad est également l’auteur d’une œuvre remarquable. «Malgré une carrière plus discrète, Arpad Szenes n’a pas ignoré les voies contemporaines de la culture. C’est par choix et par tempérament qu’il se concentre sur une abstraction intériorisée. La relation entre leurs œuvres repose sur l’unité, sur une spiritualité extrême, chacune illuminant l’autre», relève-t-on.