«Finies les longues et ennuyeuses pièces de théâtre, nous vivons, paraît-il, sous le signe de la vitesse. On zappe, on zippe, on rap, on ripe, on clap, on clip, on shnappe, on shnippe, on flash, on flop ! zap, clap, clip, flash, flish, flip, flop.
Le réflexe a remplacé la réflexion. Le monde se crétinise à vitesse accélérée, à vitesse de l’image.
Au rythme où l’on va, je ne serais pas étonné de voir disparaître l’auteur de théâtre, l’auteur dramatique. Et sans auteur qu’adviendrait-il de nous pauvres comédiens ? (…)
Ah ! la méchanceté des comédiens, et surtout des comédiennes! La moindre petite affaire fait les choux gras des conversations.
– Je la croyais morte de vieillesse!
– Si elle avait dû mourir de ça, il y a longtemps qu’elle serait morte. (…)
– Je parie que vous ne connaissiez même pas votre mère !
– Taisez-vous, c’est peut-être vous! (…)
– Comment va mademoiselle votre maman ?
– Merci, et comment vont messieurs vos papas ? (…)
Le théâtre a une âme, et une parole. Et quand on le quitte on doit en emporter, comme après une entrevue avec un ami, un souvenir attendri ou amusé et parfois un réconfort.
C’est évidemment le théâtre qui parle le mieux de l’homme.
Comment voulez-vous d’ailleurs parler de l’homme, autrement qu’avec un bonhomme qui en parle ? Le théâtre est une déclaration d’amour à la vie.
Une fois le spectacle terminé, le théâtre se vide de ses spectateurs, l’acteur enlève son costume de scène, se démaquille, s’habille comme tout le monde, et… quitte le théâtre ! Un peu rose, un peu morose. Il entre dans l’anonymat. Mais le moment le plus terrible, c’est quand il se trouve seul dans une chambre d’hôtel.»