Elle s’appelle Fadma Oussassay. Elle est d’origine berbère. Elle habite à Ait Hbibi, Charij, à Taghzirt. Elle est née en 1888. Elle est de nature calme, généreuse et indulgente. Son regard, plein de tendresse, donne une force de réalité à toute une vie que le temps tente d’ensevelir dans les méandres du passé. Elle était et reste toujours, malgré son âge très avancé, cette femme berbère courageuse et affectueuse. Lorsqu’elle raconte les souvenirs de sa jeunesse, elle plonge, un laps de temps, dans les tréfonds de ses pensées hagardes et soudain, elle en remonte pour répéter : «Eh oui ! Mon fils, la vie passe très vite et personne n’est éternel. Louange à Dieu que la mort existe. La vie mérite d’être vécue si on fait du bien. Que la vie est éphémère mon fils !». Quand elle était encore petite, elle se rappelait que Tagzirht était une région où il y avait des grenadiers, des figuiers et des «oueds» parce que l’eau était très abandante et souvent il y avait des inondations. C’était le temps de la colonisation et la majorité des berbères habitaient les montagnes. Son père est mort lorsqu’il a voulu cueillir des figues la nuit. Elle se rappelait que pendant sa jeunesse, toutes les tribus de Ait Oudi, Ait Hbibi, Ait Saïd, Ait M’hand vivaient dans les montagnes à cause de l’insécurité qui régnait à l’époque. Lorsqu’elle était encore jeune, elle préparait surtout le couscous et aidait les familles pendant les mariages et les fêtes. Quelques années plus tard, elle perdit ses parents. Elle travaillait pour nourrir son frère et sa sœur : ils étaient tous des orphelins. Elle se nourrit à l’époque d’une plante des montagnes appelée «ouabou», «Sykouk», de l’orge, du maïs, les fruits des chaînes, qu’ils séchaient. Elle ne buvait pas souvent du thé et parfois elle mangeait du pain en ingurgitant un ver d’eau. Son alimentation était très naturelle. Elle avait l’habitude de dormir tôt et de se réveiller de bonne heure pour travailler la terre, chercher du bois dans les montagnes les plus proches ou aider les autres familles pour gagner un peu d’argent. Elle avait épousé le premier homme avec qui elle a eu un enfant. Et après la mort du premier mari, elle épousa son second. Les habitants étaient en majorité des agriculteurs. A l’époque, elle n’avait pas de maison, elle habitait sous des tentes parce que la majorité des habitants était des nomades. Elle avait l’habitude de chercher du bois à «Labhirate», «agarte nouazour». Avec ses frères, elle n’avait pas de grandes terres à cultiver mais des parcelles qu’ils labouraient avec des pioches pour survivre. L’histoire de son passé est un genre d’autobiographie ou plutôt de mémoire où les souvenirs de sa jeunesse sont en étroite relation avec les événements de l’époque. Vêtue d’une chemise, elle porte un foulard blanc autour de la tête et son visage conserve encore les traces d’une beauté qui est arrivée à défier les rides de la vieillesse. Actuellement, Fadma a 8 enfants (5 enfants et 3 filles). Sa maison grouille d’enfants, d’hommes et de femmes. Le portrait complet de Fadma ne peut pas se brosser à partir de son physique uniquement, elle constitue un trésor de générations. Le jour où ALM lui a rendu visite pour la première fois à son domicile à Tagzirht, province de Beni Mellal, elle était souriante, ouverte et aimable. «Le temps coule et il est irréversible mon fils. Louange à Dieu que je sois encore vivante. Je vous souhaite tous une bonne santé et le succès dans votre vie. Un conseil, faites du bien et faites votre prière».