Culture

Haïk, chef-d’oeuvre de l’artisanat de la région Tanger-Tétouan

© D.R

A Chefchouaen, le Haïk est exposé parmi les autres articles de l’artisanat marocain dans des magasins à Souika. Considérée parmi les anciens costumes féminins, cette tenue traditionnelle est fabriquée en coton ou en laine de mouton et ornée de fils en soie. «La fabrication du Haïk diffère d’une ville à l’autre», explique Hajja Saïdia, une  Chefchouaen de cinquante ans qui a porté à l’âge de dix-neuf ans son premier Haïk en laine de mouton tissé par sa grand-mère.Les visiteurs de  Chefchouaen ne peuvent rester insensibles devant la couleur banche et bleue de ses ruelles et de ses femmes arborant le Haïk blanc. Ce beau décor a inspiré plusieurs artistes- peintres marocains et étrangers, «qui en ont fait de magnifiques tableaux. Ce qui a permis de faire connaître notre ville à travers le monde», dit Hajja Saïdia. Bien que les femmes actives et les jeunes filles à  Chefchouaen ont abandonné cette tenue traditionnelle, «la plupart des familles chefchaouanies gardent soigneusement le Haïk dans leur maison. Je garde moi- même chez- moi deux Haïk de laine ornés de fils en soie. C’est une ancienne habitude vestimentaire qui est pratiquée à l’occasion des mariages ou des deuils», témoigne Hajja Saïdia avant d’ajouter que «les anciennes chefchaounies continuent de porter les plus beaux Haïk de laine (dit Haïk Soukar) pour rendre visite à des membres de ses familles ou pendant le mois de Ramadan et les fêtes religieuses». Les anciennes chefchaounies ont l’habitude de porter le Haïk pour se rendre au Hammam (bain maure), situés aux environs de la place Outa Hammam. Ce site historique où se trouve la grande mosquée revêt, chaque vendredi à l’heure de la prière du dohr, une ambiance de fête. En plus des hommes habillés en tenues traditionnelles, les femmes s’y rendent pour faire leur prière avec leur Haïk blanc ou de couleur jaune safran. La place Outa Hammam est aussi le lieu de passage des cortèges de la mariée arborant le Haïk pour se rendre au bain maure. «La plupart des jeunes filles et les femmes qui accompagnent la mariée au Hammam tiennent, elles- aussi, à porter le Haïk», révèle Hajja Saïdia.Par ailleurs, l’étude de notre histoire récente indique que le Haïk fut porté par la femme dans plusieurs régions au Maroc avant qu’il soit abandonné, il y a quelques années, dans les grandes villes marocaines. «Le Haïk demeure un chef-d’œuvre de l’artisanat dans la région. Il a été très apprécié par les femmes et il a atteint son apogée dans les années cinquante. Il a été pendant longtemps à l’origine aussi bien de la notoriété que de la richesse des artisans de Tanger. Nous le travaillions sous commande», se souvient Hajj Jillali Msaouiri Kanchel, qui travaille depuis 1938 dans le secteur du tissage. Selon ce dernier, le Haïk est considéré depuis toujours comme une tenue citadine. «Elle est portée presque de la même façon dans la région Tanger- Tétouan. La femme à Chefchaouen se sert du bord de son Haïk pour camoufler le bas de son visage. Je me souviens de ma mère et des autres femmes de mon entourage qui faisaient de même pour cacher une grande partie de leur visage et ne laisser apparaître que leurs yeux», raconte Hajja Saïdia avant de faire remarquer que «la femme tangéroise et celle d’autres villes de la région portaient le Haïk avec un petit voile en tissu crêpe noir ou blanc pour couvrir en particulier le bas de leur visage». Les amoureux des effets vestimentaires traditionnels regrettent l’abandon du Haïk. «Il donne à la femme beaucoup plus de respect et la protège des regards. Il la met à l’abri des agressions dont sont actuellement victimes les jeunes filles à cause de leurs tenues vestimentaires», confie Hajj Msaouiri Kanchel.
Pour la fabrication du Haïk de laine fine, celui-ci «exige toute une journée de travail. Nous nous mobilisons tous- Maâlam et employés- pour pouvoir terminer le grand nombre de commandes que nous recevions. Le Haïk en laine fine nécessite généralement six mètres de longueur. Alors que la même tenue commandée pour une jeune fille ne nécessite que trois et demie de laine tissée et une demie journée de travail», précise Hajj Msaouiri Kanchel. Selon ce dernier, il existe trois sortes de Haïk : «nous fabriquions le Haïk à cette époque de son apogée avec du coton importé de l’étranger. Nous achetions cette matière d’un juif- qui possédait un dépôt dans le quartier Sayaghine ou d’un autre dépôt situé au grand Socco et détenu par un Marocain d’origine marrakchie. La tenue la plus chère est fabriquée en laine fine et ornée de fils argentés ou de soie. Le Haïk qui est fait uniquement en laine est destiné particulièrement aux couches pauvres», souligne Hajj Msaouiri Kanchel.
Le Haïk, considéré parmi le patrimoine artisanal marocain, est présent dans les grandes expositions organisées dans la région dont le musée ethnographique de Tétouan.

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