Culture

Interview de la professeure Meriem Khalil, docteure en sciences de l’éducation, conférencière, auteure et présentatrice à Sada al Ibdaa, l’émission phare de la SNRT: «Notre devise, c’est l’amour et le respect de ce qu’on fait»

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Docteure en sciences de l’éducation, conseillère, enseignante universitaire, dame de culture et grande passionnée des arts, surtout la danse, Meriem Khalil présente l’émission culturelle d’Al Oula : Sada al Ibdaa, depuis treize ans, avec la même passion et la même exigence. Entretien.

Quelle émotion ressentez-vous à l’idée de retrouver votre équipe et de reprendre cette nouvelle saison de Sada al Ibdaa ?
Meriem Khalil : Je suis grandement fière et heureuse de retrouver notre équipe de choc, animée par une vraie passion pour l’art et la culture. C’est un vrai moment fort que de nourrir son âme à travers ce lien vivant avec les œuvres, les chercheurs et les artistes. J’en profite pour saluer le directeur de production d’Al Oula, Driss Idrissi, qui continue de piloter Sada al Ibdaa avec brio, ainsi que mes chers amis et collègues Najib Abdelhak et Mohammed Chouika. Je considère que j’ai beaucoup de chance de collaborer avec eux. Ce que j’apprécie le plus, c’est cette énergie unique que nous avons su construire ensemble une énergie que nos invités ressentent pleinement et saluent souvent après chaque tournage. Notre devise, c’est l’amour et le respect de ce qu’on fait pour offrir le meilleur aux téléspectateurs.

Sada al Ibdaa est une émission culturelle et artistique bien ancrée dans le paysage. Pour celles et ceux qui la découvriraient cette année, comment décririez-vous l’esprit et la ligne éditoriale de l’émission ?
Avant de répondre, j’aimerais souligner qu’en treize ans d’existence, aucun sujet ni invité n’a été répété. Je dis cela pour faire comprendre l’ampleur du travail réalisé en amont, afin d’explorer des champs de recherche et des thématiques peu ou pas abordées par les médias. Cette année, nous nous orientons vers des sujets qui parlent directement au public marocain: l’éducation, la psychologie, la sociologie, le patrimoine culturel… Nous prenons de plus en plus conscience de l’importance de simplifier nos discussions pour être compris par un large public. Par « simplifier», j’entends bien expliquer aux non-spécialistes sans tomber dans la banalité, et c’est ce que nous demandons à nos invités pendant le tournage.
Nous relevons aussi le défi de rapprocher des sujets parfois perçus comme abstraits de la vie quotidienne, pour en montrer la portée et l’utilité comme les transformations dans l’écriture du roman arabe ou la sociologie du monde rural. Enfin, à l’image des saisons précédentes, nous continuons de donner la parole à des créateurs, écrivains et artistes qui n’ont pas encore bénéficié d’un accompagnement médiatique, souvent parce qu’ils vivent dans des villes lointaines ou de petits villages. La richesse culturelle est partout au Maroc, pas seulement dans les grandes villes.
En tant que chroniqueuse culturelle, quel regard portez-vous aujourd’hui sur le rôle de la culture dans les médias, surtout dans un contexte aussi mouvant que le nôtre ?
Aujourd’hui plus que jamais, nous avons besoin d’une présence renforcée de la culture dans les médias. Malheureusement, nous sommes inondés d’informations et d’images en continu et nous ne sommes pas toujours immunisés ni préparés à faire le tri avec un regard critique. La bêtise humaine et la banalité occupent une place grandissante et, malheureusement, le public semble parfois les accueillir facilement, voire avec beaucoup de plaisir.
La culture, seule, peut véritablement élever les âmes et les esprits. Nous avons la chance d’avoir des artistes et des écrivains d’un très haut niveau. Suivre leurs parcours et découvrir leurs œuvres ne peut que construire un citoyen conscient de son patrimoine culturel et surtout capable d’apprécier l’art dans toutes ses dimensions.

En quoi la diversité de vos profils -Abdelhak Najib, l’animateur, Mohammed Chouika, le chroniqueur, et vous-contribue-t-elle à la particularité de votre émission ?
Merci pour cette question très pertinente. Souvent, les téléspectateurs imaginent que nous sommes tous journalistes de formation et de carrière, ce qui n’est pas le cas pour nous tous. La diversité de nos profils, comme vous l’avez souligné, est en réalité une grande richesse pour notre émission. Elle se ressent vraiment dans la qualité des débats, la nature des questions que nous posons, ainsi que dans nos échanges avec les invités.
Par exemple, Abdelhak Najib a une longue carrière journalistique, notamment en tant que rédacteur en chef, et il est aussi écrivain et romancier. Mohammed Chouika, lui, est critique d’art et docteur en philosophie. Quant à moi, je viens d’un parcours dans les sciences de l’éducation, spécialisé dans l’éducation artistique et les compétences psychosociales. Cette complémentarité enrichit profondément nos échanges et permet d’aborder les sujets sous différents angles.

Votre parcours est également artistique. En quoi cette dimension, combinée à votre doctorat en sciences de l’éducation, enrichit-elle votre contribution à l’émission ?
La vérité, c’est que j’ai eu beaucoup de chance d’être lauréate du Conservatoire municipal de Casablanca, section art dramatique en français. Je profite d’ailleurs de cette occasion pour saluer le professeur Alami, qui a accompagné des générations au sein de cet établissement. J’y ai également étudié la musique et j’ai pratiqué la danse ailleurs.
Tout cet apprentissage m’a permis de rester en lien étroit avec le monde artistique, d’en comprendre les rouages mais surtout de savoir lire, analyser et savourer toute création artistique. Au final, cela m’aide énormément dans l’émission : je peux dialoguer avec les artistes avec justesse, décoder leur langage et créer une vraie connexion avec eux.

Quel a été le moments le plus marquant ou mémorable que vous ayez vécu en tant que chroniqueuse sur Sada al Ibdaa depuis toutes ces saisons ?
Il y en a plusieurs, même si j’ai un peu la mémoire courte ! Je voudrais souligner l’émission qui vient d’être diffusée récemment sur le thème du père. Je me rappelle avoir eu les larmes aux yeux tout au long du tournage, pensant constamment à mon propre père et à la chance que j’ai eue d’avoir son soutien tout au long de mon parcours. Je tiens d’ailleurs à lui rendre hommage, Monsieur Khalil Abdelmajid.
Un autre moment fort, ce furent les témoignages des jeunes écrivaines participantes à l’ouvrage collectif Bouya, une vraie fierté pour l’école marocaine et notre pays. Je me souviens aussi très bien de l’émission consacrée à la compréhension du handicap au Maroc, avec des témoignages très puissants de Malak et Ahmed.
La liste est longue… Ce que j’adore dans cette émission, c’est que parfois nous abordons des sujets qui peuvent paraître difficiles ou complexes à simplifier, mais pendant le tournage, une toute autre version se révèle. C’est évidemment grâce à nos invités, qui rendent ces échanges à la fois joyeux et riches d’apprentissage pour tous.

Si vous deviez-vous parler à vous-même, chroniqueuse lors de la toute première émission, que lui diriez -vous aujourd’hui ?
Je lui dirais : Prends du plaisir à poser tes questions, à découvrir de nouveaux horizons culturels et à faire de chaque échange un moment de grandeur humaine et intellectuelle. Ne cours pas après la perfection ; cours après la profondeur, l’émotion vraie, la rencontre sincère.
Ce que tu ne sais pas encore, c’est que cette émission va t’apprendre bien plus que tu ne l’imagines. Elle va affiner ton écoute, élargir ton regard et nourrir ta sensibilité.
Tu vas rencontrer des poètes, des romanciers, des penseurs d’un raffinement et d’une intelligence rares. Tu comprendras que notre langue est riche, et que notre littérature est un trésor trop souvent sous-estimé.

Vous êtes sur le point de vivre une aventure humaine, intellectuelle et spirituelle dont vous sortirez transformée. Quel message aimeriez-vous transmettre aux jeunes générations qui regardent Sada al Ibdaa ?
Nous sommes très heureux de vous compter parmi nos téléspectateurs et nous le serons encore plus si vous participez avec nous à travers vos écrits, vos créations, vos idées. Notre devoir est d’encourager la jeunesse à exprimer sa créativité et à grandir dans son pays, à s’y épanouir pleinement. La culture est une force, un moteur essentiel pour bâtir l’avenir et nous voulons être à vos côtés dans ce beau chemin.

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