Il est vrai que la tension ne peut donner une passion. Cependant, ce n’est pas le cas pour l’éminent auteur marocain Mustapha Bencheikh. Dans sa toute nouvelle publication, il raconte la manière dont cette pression paternelle lui a fait aimer l’acte intéressant de la lecture.
Au moment où certains parents souffrent avec leurs enfants pour lire, d’autres arrivent à s’imposer. C’est le cas du père de l’écrivain qui lui exige une « Lecture sous tension » également intitulé du dernier roman de l’auteur qui y révèle en outre les livres qu’il a lus. De quoi faire découvrir à un bon lecteur des œuvres qu’il n’a pas eu l’occasion de lire.
Une bonne mise à l’épreuve
A propos de cette pression parentale, le romancier précise : « Dans mon parcours personnel, il est clair que la pression exercée par mon père a contribué à me mettre à l’épreuve». Entre-temps, M. Bencheikh remonte le temps pour s’exprimer sur son caractère personnel dès le plus jeune âge. «J’étais par tempérament rêveur et nonchalant. Les injonctions de mon père m’imposaient un défi permanent. J’ai fini par comprendre que le meilleur moyen d’échapper à cette tutelle était de cesser de résister. Au fil des ans d’ailleurs, l’étau s’est desserré. Mais encore une fois, ce qui marche pour l’un ne marche pas systématiquement pour l’autre», avance-t-il. Par la même occasion, d’autres bons lecteurs peuvent développer cette passion spontanément sans haute tension parentale. Il suffit d’avoir, dès le bas âge, des livres chez soi pour les lire bien que leur teneur ne soit pas accessible à la compréhension pour développer cette assimilation à des phases ultérieures de la vie. Le tout favorisé par un entourage scolaire qui incite à la lecture. Quant à ses propres lectures qu’il relaie dans sa publication, elles sont destinées au partage. Pour lui, tout lecteur découvre et peut faire découvrir des livres. « J’ai parlé des livres qui ont croisé des événements de ma vie et qui directement m’ont marqué. Ils ont été des compagnons de route au moment où adolescent, je forgeais mon caractère. Ils intervenaient comme des éclaireurs, des mantras qui orientent et aident à mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons », détaille le narrateur. Et ce n’est pas tout !
Un récit mêlé au parcours personnel
Il est également question dans le roman de vie privée de l’auteur. Entre autres, il raconte ses ressentis au moment de fréquenter une bibliothèque avec le père et le frère pendant que ses pairs jouent au foot, son départ à Paris pour poursuivre les études supérieures, les souffrances dues au décès d’êtres chers. Mieux encore, il livre, dans son œuvre dédiée à la lecture, des regards sur différents domaines comme la politique, la justice et l’enseignement. Dans ce sens, il explique : « Mon récit fait chevaucher lecture et parcours personnel». « Or un parcours personnel s’effectue au milieu des autres, de la société. Il est toujours imprégné d’histoires, de vérités et de mensonges, bref il participe à un vivre-ensemble. Il ne peut donc s’en extraire impunément», enchaîne-t-il d’emblée. Il cite également l’auteur de «Mme Bovary». Pour lui, la littérature, écrivait Flaubert, «n’est pas là pour faire joujou». « L’écrivain probablement le plus accompli du 19ème siècle n’a pas manqué d’interroger sa société sous de multiples prismes», estime M. Bencheikh.
Œuvres : Outre son nouveau livre édité par la grande maison d’édition marocaine Marsam, l’écrivain a à son compteur un autre roman intitulé « Comme une histoire ». Il y traite des rapports humains en structure hospitalière. Dans cette œuvre publiée en 2021 en pleine ère Covid, il aborde également des relations entre médecins et infirmiers, de la gestion des hôpitaux et du rapport à l’argent entre autres. De surcroît, Mustapha Bencheikh est un éminent essayiste. Dans son livre «Hypothèque sur l’université marocaine », il décrypte les maux de notre université depuis la réforme 2003. Il a en outre contribué à l’ouvrage collectif appelé « Les infortunes de l’identité culturelle». «Les auteurs ont éprouvé le besoin d’éviter les postures pour tenter de lever certaines ambiguités qui caractérisent ce concept si controversé d’identité culturelle. (…) Ce livre ne peut apporter que de nouvelles questions et ne prétend en aucune manière à l’exhaustivité », écrit-il dans sa présentation.