Culture

La saga du B.O : De l’empire chérifien au Royaume du Maroc

© D.R

Tout le monde est censé le savoir. Tout texte de loi non publié au Bulletin officiel est un texte qui ne peut être appliqué. «Ça n’a pas encore été publié au BO». Cette assertion, on l’entend souvent mais la plupart des profanes n’en comprennent pas vraiment le sens juridique.
En effet, la publication au Bulletin officiel est une étape essentielle du processus d’élaboration et de promulgation d’un texte de loi. Cette étape n’a été introduite au Maroc qu’avec l’instauration du protectorat. D’ailleurs, l’accord du protectorat signé entre les autorités françaises et marocaines avait été lui-même publié dans le premier B.O. marocain.
Ainsi, la France pouvait promulguer, en toute quiétude, des textes, sans risquer de susciter des conflits de loi avec d’autres textes en vigueur, notamment en matière civile et pénale, pour la bonne raison qu’ils n’existaient pas. Cette action fut inaugurée par la circulaire du 2 septembre 1912 portant création du Bulletin officiel. «Il a été créé un Bulletin officiel du gouvernement chérifien et du Protectorat de la République française au Maroc destiné à publier les décrets et décisions du gouvernement chérifien, les lois, les décrets arrêtés et décisions du gouvernement de la République française relatifs au Maroc ainsi que les arrêts et décisions du commissaire Résident général», peut-on lire dans le premier Bulletin officiel en date du 1er novembre 1912 que : Il est certain que la création du B.O. marque un véritable tournant car il permet de rendre obligatoire la publication des lois et règlements pour qu’ils soient contraignants. Le B.O devient, de ce fait, l’unique référence sur le plan légal et, désormais, aucun citoyen ne saurait être astreint au respect d’une loi, si elle ne figure pas dans celui-ci. L’instauration du bilinguisme, qui date officiellement de cette circulaire, stipule que «les lois et règlements doivent être publiés en deux langues : l’arabe et le français». 
Le B.O. rendait des lois françaises applicables dans notre pays, par la simple publication de dahirs ou de décrets du président de la République française, autorisant leur entrée en vigueur au Maroc. An lendemain de l’Indépendance, le Secrétariat général du gouvernement est créé, et ce, dès la mise en place du premier gouvernement . Sa création est d’une importance primordiale puisque ce département est chargé de coordonner la préparation des projets de lois émanant des différents ministères. Entre autres, le Secrétariat général du gouvernement a pour mission d’accompagner le processus d’adoption de tout projet de loi en vérifiant sa conformité avec les dispositions constitutionnelles et sa compatibilité avec les textes législatifs et réglementaires en vigueur. Durant cette période constitutive, divers textes de loi vont être promulgués dans les B.O. Il s’agit notamment du Code de procédure pénal, la loi sur la liberté syndicale et le Code des libertés publiques pour ne citer que ces textes de loi.  Sur un autre registre, le B.O. a non seulement été dédié aux textes de lois mais aussi à des publications exceptionnelles, notamment par Dahir, de décisions royales. C’est ainsi, par exemple, que les évènements de Skhirat (1971) puis l’attentat contre le Boeing royal (1972) conduisent à la suppression du ministère da la Défense nationale. Cette même décision, prise par le dahir du 19 août 1972, est publiée dans le B.O. n° 3121 en date du 23 août 1972 qui stipule que «le ministère de la Défense nationale est supprimé. La compétence et les attributions du ministre de la Défense nationale sont exercées directement par Notre Majesté en Notre qualité de Chef suprême et de Chef d’état-major général des Forces armées royales». Autre fait marquant. Le B.O n°4713 du 2 août 1999 annonce la succession monarchique de SAR le Prince Héritier Sidi Mohammed à Feu SM. Hassan II. 
Dans le B.O. n°4713, on retrouve le premier discours du trône de Sa Majesté le Roi Mohammed VI et qui annonce la couleur d’un nouveau règne où le respect des droits de l’Homme et la lutte contre le chômage et la pauvreté sont à l’ordre du jour. Depuis, le Maroc s’est engagé dans un vaste chantier de réformes couvrant divers domaines : les droits de l’Homme, le statut de la femme, l’environnement économique et financier, la justice, la fonction publique, la promotion de la société civile… Réformes que l’on retrouve dans les successives publications du B.O. Ce document, en plus de son utilité dans la vie de tous les jours, est une sorte de mémoire vivante et d’un grand secours pour remonter les événements marquants du pays. On ne feuillette, du moins pour ceux qui y vouent un véritable culte, les feuilles non sans nostalgie.

Parcours d’une loi jusqu’à sa publication au B.O
Lorsqu’un membre du gouvernement prend l’initiative d’un projet de loi, le Secrétariat général du gouvernement intervient dans la phase de préparation, saisine du Conseil du gouvernement, mise au point et inscription à l’ordre du jour du conseil des ministres. Aucun projet de loi ne peut être déposé par les soins du Premier ministre sur le bureau de l’une des deux Chambres du Parlement avant qu’il n’en ait été délibéré en Conseil des ministres. Autant au niveau de la Chambre des Représentants que celui de la Chambre des conseillers. Le vote en plénière se fait après le dépôt du projet de loi, son examen et vote en commission concernée. Le projet de loi est examiné successivement par les deux Chambres pour parvenir à l’adoption d’un texte identique . Après son adoption par l’une des deux Chambres, le projet de loi est transmis à l’autre Chambre où il fait l’objet d’une procédure d’examen et de vote similaire. Lorsqu’il subit des modifications, le projet de loi est renvoyé pour adoption définitive à la Chambre qui a statué dessus la première. Une fois la loi adoptée, vient la phase de la promulgation. La Constitution de 1992 précise qu’il est procédé à la promulgation de la loi dans les 30 jours qui suivent son adoption. Lorsque le Souverain a apposé son sceau, la loi retourne au Secrétariat général du gouvernement qui l’adresse à la direction de l’imprimerie officielle pour publication au B.O.

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