Culture

L’art dénaturé

© D.R

«Vandalisme : tendance à détruire stupidement, à détériorer, par ignorance, des oeuvres d’art ». C’est par le truchement de cette définition, empruntée au dictionnaire « Le Petit Robert », que les responsables de l’IFC ont choisi de réagir aux dégradations volontairement opérées sur trois photographies. Ils ont juxtaposé cette définition aux oeuvres endommagées. Il s’agit des photographies de Natacha Magnelli et Thomas Lang, deux artistes français qui ont sillonné, pendant six mois, le Maroc de Tanger jusqu’à Marrakech. De cet itinéraire, entamé en février 2002, est née une série de photographies intitulée « Histoires marocaines ». Les trois photographies détériorées sont en couleur et mesurent 1m sur 1,40 m. Elles représentent des corps nus. Il s’agit de ceux des deux photographes qui ont la particularité de faire de leur vie l’objet de leur art. La première photographie représente une femme de dos assise en train de faire sa toilette intime dans un hammam. Il s’agit sans doute d’une scène empruntée aux peintres de la fin du 19ème siècle, et particulièrement à Degas. Cette oeuvre a été égratignée à l’aide d’un objet pointu, de même qu’elle a été souillée par un stylo à feutre. Pareil pour son pendant masculin et une troisième photographie où l’on voit des membres entremêlés. Plastiquement parlant, le nu est un genre artistique au même titre que le portrait ou la nature morte. Il suscite régulièrement des réactions extravagantes dans notre pays. Est-ce en raison du manque de culture plastique des visiteurs ? Est-ce que certains spectateurs n’opèrent pas de distance entre l’appréhension d’un nu tel qu’il est représenté dans une oeuvre d’art et un corps humain dévêtu ? D’autre part, les photographies exposées à la Villa des Arts et la galerie de l’IFC reposent sur la mise en scène et portent les marques des rencontres faites par les deux artistes lors de leur séjour au Maroc. Au cours d’un déjeuner à Settat, ils entendent parler d’Aicha Kandicha, et c’est l’occasion de donner corps à cette créature qui possède encore beaucoup d’emprise sur les imaginaires. Ils la représentent curieusement mi-ange, mi-démon. La naissance des ailes suggère le côté angélique. Les pattes du mouton représentent le côté démoniaque. Cette oeuvre rend compte de la démarche à la fois onirique, narrative et autobiographique des intéressés. Ils n’établissent pas de frontière entre leur vie et leur travail. Bien plus, c’est leur quotidien qui nourrit leur art. Et ils ne s’en cachent pas, puisque les principaux protagonistes des photographies sont ceux-là mêmes qui les réalisent. En plus, Natacha Magnelli et Thomas Lang affectionnent particulièrement le récit dans leurs photographies. Leurs oeuvres racontent une histoire, suggèrent une ambiance, fixent une tranche de leur vie, mais de préférence en y ajoutant un élément insolite. En atteste cette oeuvre où les personnages sont enveloppés dans des sacs de couchage, superposés sur les matelas d’un salon marocain. Ou telle autre où plusieurs sacs à dos sont alignés sur le sol d’une maison, et qui ne semblent guère poser de problème à un personnage féminin. La lumière dans les photographies est souvent douce et tamisée. Les artistes privilégient à cet égard les espaces intimes, et c’est sans doute pour cette raison qu’ils se sont photographiés dans un hammam. Leur côté exhibitionniste n’est pas du goût de tout le monde!

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