«Indigènes» est le film événement du mois. Ce long-métrage réalisé par Rachid Bouchareb sort aujourd’hui, mercredi 27 septembre dans les salles en France. Quelques jours après, ce sera au tour des cinéphiles marocains de l’apprécier sur grand écran. L’avant-première est prévue pour le 3 octobre prochain à l’Institut français de Casablanca.
Mais ce n’est pas tout. L’autre surprise est la présence de deux acteurs vedettes du film en plus du réalisateur d’origine algérienne. Jamal Debbouze, Sami Nacéri et Rachid Bouchareb viendront en effet à Casablanca le 4 octobre pour discuter de cette expérience cinématographique.
L’aventure a réuni des comédiens, pour la plupart originaires du Maghreb, autour d’une histoire commune. Celle des soldats maghrébins qui ont combattu auprès de l’armée française pendant la Seconde Guerre mondiale. On les appelait «les indigènes». L’histoire se passe en 1943. Saïd, Kader, Messaoud et Yassir vont s’engager tout comme les 130.000 autres «indigènes», dans l’armée française pour libérer «la mère patrie» de l’ennemi nazi. Ces héros que l’histoire a oubliés vaincront en Italie en Provence, et dans les Vosges, avant de se retrouver seuls à défendre un village alsacien contre un bataillon allemand.
Rachid Bouchareb a voulu revenir sur cette partie de l’histoire de la France. Une histoire qui fait aujourd’hui l’actualité. Ce film a en effet remis sur le tapis quelques questions inhérentes à la vie de ces oubliés de l’Histoire. Depuis les années 60, la France a décidé, conformément à l’article 71 de la loi de Finances du 26 décembre 1959, de geler les retraites et pensions d’invalidité versées aux anciens combattants de son ex-empire colonial. C’est d’une véritable cristallisation qu’il s’agit. Il en résulte alors une situation très inégalitaire vécue avec amertume par les anciens combattants du Maghreb et d’Afrique noire, dont les pensions peuvent être jusqu’à dix fois moins élevées que celles des anciens combattants français. Après plusieurs protestations, le gouvernement français engage quelques tentatives de décristallisation des pensions. En 2003, Jean Pierre Raffarin Premier ministre à l’époque s’engage sur la voie d’une «décristallisation» partielle des pensions qui devraient désormais être indexées non pas sur celles des Français, mais sur le coût de la vie dans les différents pays où résident les anciens combattants. Mais ce ne fut pas suffisant. La preuve, la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH) et la Ligue des droits de l’homme (LDH) ont demandé, lundi dernier, à Jacques Chirac de s’engager pour les anciens combattants originaires du Maghreb et d’Afrique noire. "A la veille de la sortie publique du film «Indigènes» qui retrace l’engagement des 100.000 combattants du Maghreb et d’Afrique noire", "nous vous savons préoccupé de cette question et prenons acte de votre volonté d »aller plus loin’", écrivent les deux organisations dans une lettre ouverte commune relayée par l’AFP. Selon de propos de Jamel Debbouze qui campe le rôle de Said, Jacques Chirac et son épouse, qui ont vu le film début septembre ont été émus. Le chef de l’Etat a promis aux producteurs d’"Indigènes" la revalorisation des pensions. En tout, 80.000 tirailleurs de l’armée française sont concernés par cette revalorisation. Au-delà de la fiction le film de Rachid Boucharaeb, primé à Cannes en mai 2006, pourra-t–il l’heur de régler les problèmes des anciens combattants ?