Dans son ouvrage, l’auteur raconte comment Reinhard Höhn (1904-2000), l’intellectuel technocrate au service du IIIe Reich, se distingue par la radicalité de ses réflexions sur la progressive disparition de l’Etat au profit de la “communauté” définie par la race et son “espace vital”.
Le juriste devient fonctionnaire de la SS et nourrit la réflexion nazie sur l’adaptation des institutions au Grand Reich à venir. De retour à la vie civile, il crée à Bad Harzburg, un Institut de formation au management. L’établissement accueillera, au fil des décennies, l’élite économique et patronale de la République fédérale. «Quelque 600.000 cadres issus des principales sociétés allemandes, sans compter 100.000 inscrits en formation à distance, y ont appris, grâce à ses séminaires et à ses nombreux manuels à succès, la gestion des hommes», rappelle l’auteur. Dans son livre, il décortique l’organisation hiérarchique du travail par définition d’objectifs. Il explique comment le producteur, pour y parvenir, demeure libre de choisir les moyens à appliquer. Il fera, également, référence à d’autres modèles qui prendront la relève après les années 80 pour ne citer que le modèle japonais qui est moins hiérarchisé. L’auteur est formel : le nazisme aura été un grand moment managérial et une des matrices du management moderne.
Johann Chapoutot enseigne l’histoire contemporaine à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3. Spécialiste de l’histoire de la culture nazie et d’histoire politique et culturelle contemporaine, il est notamment l’auteur de La Loi du sang : Penser et agir en nazi (Bibliothèque des Histoires, 2014) et de La révolution culturelle nazie (Bibliothèque des Histoires, 2017).
Ed. Gallimard (9 janvier 2020)