Culture

M. Achaâri déchaîne les passions

Bichre Bennani (éditeur et libraire)
Le livre n’a jamais vécu une crise aussi grave que depuis que Mohamed Achaâri est arrivé. Dans les bibliothèques des cités, il n’y a aucune structure d’accueil pour les lecteurs, le personnel est complètement démotivé. Ces bibliothèques sont réduites au mieux en salle de travail où les étudiants potassent les examens. Les librairies n’ont jamais autant fermé que depuis que M. Achaâri est là. Les salons du livre repoussent les gens au lieu de les attirer. Les éditeurs sont en plein désarroi, parce que M. Achaâri n’a jamais su travailler avec les professionnels du livre. Il procède par copinage. M. Achaâri a eu le mérite d’éloigner les compétences et de s’entourer de copains. Pour nous, des jours tristes s’annoncent avec sa reconduction.

Abdelkader Retnani (éditeur)
C’est une très bonne chose. Parce que l’homme a une expérience de 4 ans et demi et qu’il va inscrire ses actions dans la continuité. Il n’y aura pas de rupture dans ce sens. Parmi les initiatives louables de M. Achaâri, il y a l’achat des livres des auteurs marocains par les bibliothèques et le fonds de soutien à l’édition. Cela dit, le secteur de l’édition traverse actuellement une grave crise, mais je tiens à rester positif en espérant que les initiatives du ministre de la Culture seront plus percutantes pendant les 5 années à venir. Il faut qu’il se batte pour augmenter le budget de son ministère. Tant que le gouvernement ne réservera pas 1% du budget national à la culture, il ne pourra pas faire grand chose.

Nadia Essalmi (éditrice de livres pour enfants)
Je n’ai jamais eu de bons rapports avec le Ministère de la Culture. Au lieu d’aider les éditeurs, M. Achaâri veut leur faire de la concurrence. Son ministère édite des livres pour enfants, d’une qualité médiocre, à 5 DH. S’il veut inciter les enfants à lire, il n’a qu’à aider les professionnels pour éditer de bons livres à petits prix. À moins que je ne m’abuse, son métier n’est pas de faire des livres. Il faut le dire sans demi-mesure : l’édition au Maroc agonise. Au lieu de l’aider à se redresser, M. Achaâri l’enfonce encore plus en lui faisant de la concurrence. Sa reconduction est une mauvaise surprise pour nous. On aurait souhaité voir à la tête de ce ministère une autre personne qui comprendrait notre situation, et nous aiderait à sortir de l’impasse.

Tayeb Seddiki (homme de théâtre)
Moi, je suis très content ! Parce que j’estime que 4 ou 5 ans ne sont pas suffisants pour appliquer un programme. Et au lieu de laisser des projets en souffrance en nommant un autre homme, il faut donner à M. Achaâri le temps de les faire aboutir. Il a mis beaucoup de choses sur les rails, et il faut lui laisser le temps de les conduire à bon port. Mohamed Achaâri a initié des projets magnifiques en direction du théâtre et du livre. Il a eu l’idée de fonder des bibliothèques dans le monde rural. Le jour où ce projet prendra corps, le paysage culturel dans notre pays va changer.

Abdellatif Zine (artiste-peintre)
Ma conviction, c’est qu’on veut flinguer la culture dans ce pays. Je ne trouve pas un autre sens à la reconduction du Ministre de la Culture. Quelqu’un peut-il m’expliquer pourquoi est-ce qu’on maintient un homme qui n’a fait qu’initier des projets ratés ? Il a complètement marginalisé les associations. Et plus grave : il favorise, d’une façon scandaleuse, les artistes de son parti. Les militants et les sympathisants avec son parti bénéficient de tous les avantages !

Abdelouahed Ouzri (homme de théâtre)
Je suis content de la reconduction de Mohamed Achaâri, parce que chaque fois qu’il y a un changement à la tête de ce ministère, le nouveau ministre prend le contre-pied des programmes initiés par son prédécesseur. Histoire de ne pas lui ressembler. Il chamboule tout. Je pense que M. Achaâri va essayer de corriger ce qui était négatif dans son ancien bilan et continuer les actions positives. En ce qui concerne le théâtre, ce ministère a créé le Fonds d’aide à la création du théâtre qui a permis aux gens de travailler. Au bout de 3 ans d’expérience, les mécanismes régissant l’octroi de cette aide ont montré leur limite. L’aide n’est pas une fin de soi, elle doit constituer le tremplin pour une saison théâtrale riche, impulser des tournées. Beaucoup de travail reste à faire dans ce sens.

Hassan Darsi (artiste-plasticien)
Je n’ai aucun rapport avec le ministère de la Culture. À Casablanca, il existe bien une délégation de ce ministère. Elle croule d’ailleurs sous les détritus du parc de l’Hermitage. Mais que fait cette délégation ? Est-ce qu’elle a un programme ? Est-ce qu’elle initie des actions ? Rien du tout. Elle est inexistante. En ce sens, j’ai beaucoup de mal à parler d’un ministère que je ne connais pas. Peut-être que ce ministère a plus de visibilité à Rabat et dans les villes où il soutient une certaine culture de festivals, mais ici, il n’y a rien qui atteste l’existence d’un ministère de la culture au Maroc. Parce qu’un programme, je ne dis pas clairement défini, mais seulement traduisible en action, n’est visible nulle part. Je répète que j’ai du mal à parler de ce ministère. Quant à M. Achaâri, est-ce qu’il a été reconduit sur la base d’un acquis et d’un bilan positif ou parce qu’il n’était pas possible de faire autrement ? Je suis incapable de m’exprimer là-dessus du moment que j’ignore tout de son ministère.

• Déclarations recueillies par Aziz Daki

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