Mahmoud Belfquih n’aurait, peut-être, jamais imaginé qu’il puisse recouvrer, un jour, sa liberté. Condamné à la prison à vie en 1990, il aurait pu se résigner à ce jugement implacable. Mais M. Belfquih n’est pas du genre à baisser les bras. Combatif, il a pris son destin en main. Durant les seize ans qu’il a passés dans la prison centrale de Kénitra, il s’est lancé dans une remarquable quête du savoir. Féru de littérature, il décroche son DEUG avec la mention «Assez bien». Jusqu’au-boutiste, il obtient, deux ans, plus tard sa licence en lettres arabes modernes, puis un DEA à la Faculté Mohammed V de Rabat. M. Belfquih aurait pu s’en tenir là. Mais sa course effrénée n’avait d’égale que la folle passion qu’il avait pour le savoir. Parallèlement à son admirable cursus littéraire, il s’inscrit à la Faculté des sciences juridiques de Rabat. « Je voulais absolument comprendre ce que c’est que le droit », tient-il à dire. Au début, c’était un DEUG en Droit général, puis une licence en droit civil, puis un DEA en droit civil. Et ce n’est pas fini. Après avoir accumulé ces diplômes, il s’inscrit au département de Sociologie à la Faculté des lettres et des sciences humaines Ibn Tofaïl de Kénitra. Deux ans plus tard, il est déjà major de sa promotion. Ce cursus est ponctué d’études intéressantes sur l’univers carcéral : « La sexualité dans la société carcérale », « La contre-violence chez le prisonnier, pourquoi ? »… Décidément, M. Belfquih aurait pu dormir sur ses lauriers. Mais voilà, à ce parcours académique jalonné de plusieurs diplômes supérieurs, il a conjugué une intense activité créative. A son actif, il compte déjà plusieurs publications : deux recueils de poésie intitulés «Désordre de nudité » (publié grâce au soutien de la direction de l’Administration pénitentiaire, à Rabat), puis « Démence de l’écho des intérieurs ». Et ce n’est pas tout. Au-delà de la poésie, M. Belfquih compte un livre autobiographique intitulé « Secrets et barreaux nus », sans oublier une dizaine d’essais touchant à son expérience carcérale. Que faut-il encore ajouter à ce CV déjà bien garni ? Un an après sa libération, suite à une grâce royale, M. Belfquih occupe un poste de responsabilité au Centre post-carcéral de Salé. Mission : aider les détenus, après leur libération, à réintégrer le milieu socio-professionnel. Interrogé sur son état d’esprit actuel, M. Belfquih cache à peine sa satisfaction : « Je n’ai pas été recruté pour ce poste parce que j’étais un ex-détenu, j’ai été sélectionné selon mon CV et mes diplômes. Je crois que j’étais convaincant sur ce plan », se réjouit-il.
Au-delà de l’autosatisfaction, l’ex-détenu offre aujourd’hui un bel exemple de réussite. A d’autres d’emboîter le pas…