Culture

Mariage du malhoun et des rythmes africains

© D.R

L’idée est ingénieuse. Sa réalisation l’est nettement moins. L’une des rares voix féminines du Malhoun a enregistré un album avec des instrumentistes et choeurs guinéens. Le tout a été enregistré à Conakry. Pour effectuer ce mariage entre l’une des formes les mieux enracinées dans la culture marocaine et les rythmes de l’Afrique sub-saharienne, Touria Hadraoui n’a pas choisi n’importe quelle formation guinéenne. Elle a fait appel à “Bote percussion“, “un groupe de musiciens et de danseurs fortement enracinés dans les traditions culturelles et artistiques des populations de la Basse Côte guinéenne“. De prime abord : la voix de Touria Hadraoui, chaude, pleine, un brin rauque, enchante. Elle maintient un juste dosage entre féminité et agressivité masculine. Ceux qui ont déjà entendu l’artiste en concert reconnaîtront cette voix. Et puis, l’enchantement cède la place à l’étonnement. Les percussionnistes guinéens ne suivent pas les envolées de la chanteuse, mais interprètent des rythmes très africains. D’un côté, Touria Hadraoui interprète une “kasida“ du répertoire malhoun. D’un autre côté, les Guinéens jouent ce qu’ils savent jouer, ce qu’ils ont l’habitude d’interpréter.
Il se produit une chose curieuse : il n’y a ni divorce, ni mariage, mais conjonction entre rythmes africains et une voix marocaine. Ce n’est pas une confrontation de deux cultures distinctes d’où jaillit du sens. Ce n’est pas non plus un mariage, puisque chaque partie interprète sa partition à part. C’est une superposition qui invite peu à l’enchantement. Toutes les chansons de Touria Hadraoui ne sont pas toutefois interprétées de la même façon. Dans l’une d’elles, il existe un souci d’harmoniser entre la voix de la Marocaine et la formation guinéenne. Il s’agit de “Foutintou“ où le choeur suit la mélodie de Touria Hadraoui. Les rythmes des tambours guinéens voyagent vers le Maroc pour marcher au pas de la composition marocaine. Cette chanson est une belle réussite. Elle se démarque malheureusement du reste.
“Arabesques sur rythmes africains“ est cependant un album innovateur. Son interprète est audacieuse : elle s’est déjà attaquée à un répertoire, typiquement réservé aux hommes. Elle fait preuve de la même audace en élargissant la géographie du Malhoun. Il faudrait juste qu’elle accorde mieux les deux cultures, et toutes les oreilles s’y retrouveront.

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