Une femme, passionnée par plusieurs hommes, qui ne voue un amour que pour son mari. Ainsi, l’auteure marocaine Mina Shaqi conçoit son héroïne, Mariam, dans son roman «Une femme, cinq hommes», édité par la maison Slaiki Akhawayne.
Dans l’intrigue, ce personnage féminin, qui disparaît subitement, est, tel que le révèle la lecture de cette publication, fort recherché par son époux qui informe la police. L’inspecteur qui mène l’enquête est également l’une des personnes ayant croisé la recherchée avant sa disparition. Entre faits et lettres, l’enquêteur finit par trouver la protagoniste qui adresse une missive à son conjoint afin de lui exprimer son amour pour sa seule personne. Le tout après des interrogatoires menés minutieusement auprès des différents hommes. De quoi refléter l’intitulé du roman.
A propos de cet enchaînement de personnages masculins, la romancière précise à ALM que celui-ci «trace en fait l’itinéraire de cette quête inconsciente d’une forme suprême d’amour associée à un modèle idéal d’homme que Mariam n’avait pas trouvé en son mari». «D’où elle était contrainte de vivre confinée dans un silence étouffant, allant ainsi à l’encontre de ses aspirations et subissant ses peines dans la patience, avec l’espoir d’une éclaircie dans sa vie devenue de plus en plus brumeuse», détaille l’écrivaine concernant son personnage principal qui découvre, contre toute attente, à un moment de lucidité furtive, qu’elle avait cédé à l’illusion d’adolescente. Celle-ci ayant tendance à idéaliser cet élan sentimental portant vers l’autre masculin.
«Une fois mariée, elle se sentait vivre dans une cage qui n’avait rien de doré mais où tout rappelait une prison, un monde où régnait le «froid» dans son sens le plus large et où l’on était vis-à-vis de soi-même, se remettant sans cesse en question», ajoute Mme Shaqi en s’exprimant sur Mariam qui songeait à briser les chaînes et s’envoler là où elle pouvait s’épanouir et progresser vers un idéal méritoire d’une femme libre et responsable d’elle-même, une femme qui refusait de vivre par procuration. En tout, cet enchaînement d’hommes n’a, tel que l’explicite la romancière, pas été sciemment provoqué, mais il est «le fruit du hasard». «Les rencontres avec d’autres hommes comblaient l’absence du mari qui ne pensait qu’à entretenir son propre plaisir hors du foyer. Il faut dire que Mariam a été éminemment et négativement marquée par cette «absence» à double sens, à savoir physique et morale», avance-t-elle.
Outre cette héroïne, le personnage de «Safia» attire également l’attention du lecteur qui découvre qu’elle disparaît de l’intrigue. Cette amie représente, tel que le révèle l’auteure, l’autre face de la femme soumise, résignée à son sort qui n’a jamais été tentée par le fait de sortir des ornières de son destin dont elle se contentait de se plaindre, d’autant plus qu’elle ne bénéficiait d’aucun niveau d’instruction ni de résolution l’habilitant à aspirer à une autonomie. «Si elle s’est éclipsée à la fin de l’histoire, c’est parce que Mariam avait compris que son alter ego (ou amie intime passagère) ne lui était plus d’aucune utilité et qu’il pourrait au contraire constituer un frein à son épanouissement.
Son geste (de Mariam) de lui offrir la khamsa est significatif d’une rupture, d’une table rase de cette parenthèse de vie, quoiqu’importante», ajoute l’écrivaine qui est en train d’écrire un roman qu’elle compte «finir dans les temps à venir». «Ecrire, c’est ma raison d’être, c’est ma passion. Je suis intimement attachée à ma plume qui me sert de tremplin vers un monde où mes rêves sont réalisés. Je ne saurais en fait vous expliquer ma soif pour l’écriture, comme pour la lecture d’ailleurs», conclut-elle.