Cette exposition collective, intitulée «Azurium», permet de découvrir plusieurs points communs entre les trois artistes, à titre d’exemple leur amour particulier pour leur ville natale, mais aussi leur appartenance aux premiers ateliers d’arts pour enfants organisés annuellement par le Moussem culturel international.
Originaires d’Assilah, Mouad Yebari, Younes El Kharraz et Narjisse El Joubari présentent jusqu’au 21 juin une série de leurs toiles à la galerie Kent à Tanger. Intitulée «Azurium», cette exposition collective permet de découvrir plusieurs points communs entre ces trois artistes, comme leur amour particulier pour leur ville natale, mais aussi leur appartenance aux premiers ateliers d’arts pour enfants organisés annuellement par le Moussem culturel d’Assilah. Elle met en avant le bleu commun de la Méditerranée, celui du ciel qui se reflète dans la mer et des songes et des soupirs… «Mais aussi le bleu-gris des contrejours, le bleu des soleils noirs de l’Afrique du Nord. Une lumière d’Assilah, intense, douce, et bouleversante», selon un communiqué de la galerie Kent. Il en découle que toute l’œuvre de Mouad Yebari est une déconstruction de la lumière d’Assilah. Le monde représenté de cet artiste est ombreux, il soulève les envers des choses et le fond des idées, là où viennent buter la conscience et ses mots pour laisser la place à l’intuition et au sensible. Il y a beaucoup de raison dans ce travail, une vie de raisonnement même, pour parvenir là où achoppe la pensée, ce lieu où ne sait plus s’exprimer que l’art, la peinture en l’occurrence. «C’est par ce processus de forage et d’impasse que le peintre est parvenu à déceler toute l’ombre dans la lumière, tout ce que cette lumière fulgurante d’Assilah, bleue, océanique, iodée, transparente, contient de nuit. Il faut beaucoup de sagesse et de modestie pour arriver, au moins une fois dans sa vie, à lever tout le noir qui se cache dans le blanc», selon Philippe Guiguet Bologne, écrivain et critique artistique.
De son côté, Younes El Kharraz propose pour cette exposition une nouvelle série de toiles qui, si elles restent dans la même manière que son travail antérieur, en vient tout de même à en révolutionner le fond et la forme. Tout d’abord, en quittant la figuration, comme si, discrètement, il annonçait son passage à une nouvelle vie. Il poursuit son touchisme nerveux, tempétueux, dans la veine une fois encore de ce par quoi l’expressionnisme abstrait nous a toujours régalés, sans pour autant que le visage de son élégante sorélienne ne transparaisse derrière les coups de pinceau, épais et énergiques. Il ne reste plus que le geste, sans aucun prétexte : Younes El Kharraz s’est libéré d’une obligation, d’un jeu de passe-passe avec l’histoire de la représentation et celle de l’art, et se découvre nu dans le champ de la peinture telle qu’elle vient à lui : entièrement épurée de subterfuges et d’échappatoires. «Il nous montre qui il est, ce qu’il sait et ce qu’il fait. Par ce dévoilement, le peintre rejoint la recherche de son collègue Mouad Yebari et va chercher du côté de l’ombre de la lumière.
Décidément, Assilah la belle, qui si longtemps a misé sur l’évidence de son apparence, soulève de plus en plus de questions, de secrets et de mystères, et sa magie si éclatante laisse la place à un sentiment de tout ce qui peut traduire, en soubassement, une forme d’ésotérisme», explique Philippe Guiguet Bologne. Quant à Narjisse El Joubari, elle opère, elle aussi, sa grande révolution. Elle a pendant longtemps saisi le bleu d’Assilah pour en faire un cadre de ciel, des fenêtres de ciel et des mises en abyme du ciel dans la lucarne de la toile. Elle cherchait à la fois une épure, un contraste et, très probablement encore, à réduire l’expression à ce qu’elle représente de plus ténu et de plus essentiel. «Un aplat de bleu, un aplat de noir, une giclée blanche pour prouver que tout cela n’est bien que de la représentation, mais que cela vit quand même, un nuage quelque part, puis un petit item accroché dans un coin de l’œuvre, comme le signe de la dérision de tout ce que nous entreprenons – c’est la part de vanité de l’œuvre de Narjisse El Joubari – ainsi, son travail est reconnaissable entre tous», dit Philippe Guiguet Bologne.