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Mohamed Knidiri : «Avec un budget de 5 millions et demi DH le festival pourra mieux fonctionner»

© D.R

Entretien avec Mohamed Knidiri, président du Festival national des arts populaires (FNAP)

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La 50ème édition du Festival national des arts populaires (FNAP) a rythmé le temps d’une semaine la ville de Marrakech en folklore et couleurs. Son président, qui en dresse un bilan, revient sur les moments forts de cette manifestation toujours en quête de plus de financement.

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ALM : Le festival vient de tenir sa 50ème édition. C’est une édition assez symbolique. Son bilan doit faire votre fierté, n’est-ce pas ?

Mohamed Knidiri : Absolument. Nous avons pu constater que c’est une grande édition qui correspondait au 50ème anniversaire du festival et qui est venue après des perturbations et arrêts pour deux fois. Donc je pense que cette édition est réussie et elle va relancer le festival. La prochaine sera 50+1, c’est comme si nous démarrions à 0 maintenant. Cette année, nous avons fait, depuis la 5ème soirée du festival, le bilan qui a été très positif. Les échos médiatiques le sont aussi. Nous pouvons dire aussi que sur le plan des scènes, il y a eu une affluence extraordinaire surtout au niveau de la place Jamaa El Fna. Nous pouvons estimer à 50.000 le nombre de personnes qui passaient chaque soir. C’est extraordinaire. La place du Harti c’était à peu près 10.000 à 15.000 par soirée surtout quand il y avait vendredi les chikhates d’Al Aita de Safi, les spectateurs ont assistés longtemps au spectacle. Aussi, le théâtre Royal a tourné très bien ; il était de plus en plus rempli. Le fait d’y avoir mis des troupes marocaines et étrangères pour créer une certaine fusion était nouveau. Nous avons également animé le nouveau complexe socioculturel à Annakhil. Donc nous avons couvert les grands espaces de la ville.

Est-ce que vous avez pu atteindre les objectifs escomptés en termes d’affluence ?

Je pense que nous les avons dépassés un peu. Je croyais que le théâtre royal devait recevoir 500 à 600 personnes, il devait au moins y avoir un millier vendredi dernier. Le Palais Badiî, qui a une capacité de 2.500 était archicomble lors de la même soirée. Nous ne pouvons pas attendre mieux pour une deuxième édition de reprise.

Tellement la présence du wali de la région a été remarquable que l’absence du maire a suscité des interrogations. Quel commentaire en faites-vous ?

Tout à fait. Au programme il était prévu que le maire assiste au festival. Mais il s’est excusé parce qu’il devait avoir une mission à Rabat. Il a toujours été intéressé par ce festival et cette musique. Cette fois-ci, il s’est fait représenter par les élus. Le maire est avec nous, comme c’est le cas des conseils élus. De plus, les conseils nous ont aidés. Maintenant que le festival a pris ses assises, je pense qu’ils vont nous aider davantage pour que le festival réussisse et perdure. C’est un acquis de la ville. Justement, le premier jour c’était la parade. Nous voulions faire comme celle de Rio de Janeiro. Elle était bien réussie puisqu’elle est partie du jardin public historique El Harti pour longer l’avenue Mohammed V et d’autres places avant de s’arrêter à Jamaa El Fna. Ce sont des symboles pour annoncer officiellement cette ouverture. C’est la première fois que nous avons fait ce dispositif en présence des officiels et personnalités qui voient défiler les troupes folkloriques accueillies par les Marrakchis avec la «Dekka». C’était très beau. Je pense que les troupes marocaines et étrangères ont été bien accueillies par ce beau folklore.

Quel est le budget alloué au festival ?

Quand nous organisions l’événement auparavant, de 1999 à 2006, j’ai toujours dit que c’est le plus grand festival du Maroc et le plus pauvre. Cette année, nous avons reçu plus de 760 artistes si nous pouvons considérer que c’est le plus grand festival d’Afrique. C’est une manifestation qui a une signification particulière, c’est vraiment notre culture et patrimoine. Pour répondre à votre question, c’est un festival qui doit normalement avoir un minimum de 5 millions et demi DH pour bien fonctionner. Nous en avons à peu près 70 % avec lesquels nous fonctionnons. C’est-à-dire que nous sommes à peu près à 4 millions DH tout compris. Je pense que quand on arrivera à 5 millions et demi DH, le festival s’autofinancera. Actuellement, nous demandons de l’aide aux personnes qui ne donnent pas d’argent quand nous en avons besoin. Ils le font un peu par le sponsoring et la contribution de prestations entre autres. Mais nous arrivons à nous en sortir. L’année dernière, quand nous avons redémarré, nous avons eu un déficit de 100.000 à 250.000 DH. Cette année, nous avons épongé pour avoir un autre déficit mais ce n’est pas grave parce que les prestataires nous font confiance. Ils savent qu’ils seront payés et que ce que nous sommes en train de faire est très important pour le pays, son animation culturelle et son patrimoine.

Vous avez évoqué, pendant la conférence de presse qui a précédé la cérémonie d’ouverture, les problèmes financiers qui ont été à l’origine de l’arrêt du festival à deux reprises. La création d’une fondation ne serait-elle pas une solution pour résorber ce problème ?

En fait, la fondation, qui a organisé le festival depuis 2007 jusqu’à 2013, n’a pas pu avoir suffisamment de moyens pour le continuer. Je pense que sa manière de gérer n’était pas appropriée. Une association doit être gérée avec des bénévoles. C’est ce que nous faisons avec une centaine de personnes. Je n’ai pas de quoi les payer. Je leur donne des sommes symboliques. Par contre, je pense que dans la fondation il y avait des salariés. Maintenant, si nous avions les moyens qu’ils recevaient, soit 6 millions DH à peu près, nous n’aurions pas eu de problème du tout sur le plan financier. Actuellement même s’il doit y avoir des problèmes financiers, nous allons continuer. Il faut trouver des ressources. Pour l’heure, il y en a ceux qui sont convaincus. Au moins les institutionnels, les conseils élus, les autorités et certains notables ont compris que c’est un festival important pour le pays. Donc ils vont continuer à nous aider. Lors de cette édition, nous avons eu des promesses. Je pense qu’elles seront tenues et que cela va continuer à se développer.

Puisque vous avez parlé de notables, est-ce qu’ils se manifestent pour contribuer au rayonnement culturel de la ville ocre ?

Chaque grande ville a ses notables. A Marrakech, je pense que les notables communiquent bien, peuvent aider avec de belles paroles, mais sur le plan financier c’est très difficile. Au niveau de la ville, les sociétés, pour leur part, sont généralement des succursales. Celles qui existent ont d’autres chats à fouetter. Ce n’est pas la culture qui les intéresse en premier lieu. C’est une mentalité qui va peut-être évoluer.

Quel est l’apport de l’événement pour les artistes ?

Cette manifestation contribue à la paix entre les différentes couches sociales dans notre pays. Donc le festival est peut-être la seule occasion et activité qui puisse réunir tout ce monde assez divers dans le cadre de l’union. Ce sont des artistes qui sont heureux de se rencontrer. C’est là où l’on voit que le Maroc est unique et uniforme, voire diversifié à la fois. Cela se traduit par le folklore, les traditions et coutumes.

Pourrions-nous avoir une idée sur les cachets des artistes ?

Déjà, ils sont payés depuis le jour qu’ils arrivent pour faire des répétitions jusqu’au moment où ils partent. Le moqaddem de chaque troupe a une prime de plus. Les artistes ont également une indemnité forfaitaire pour le transport. En tout cas, nous leur donnons des sommes symboliques. Pour le transport, ils ont entre 2.000 et 7.000 DH selon la distance et le nombre d’artistes. Aussi, 500 DH de prime de responsabilité au chef de groupe. Puis 250 DH par jour depuis qu’ils sont là. Nous trouvons de plus des sponsors pour les approvisionner en produits alimentaires.

Quel est le rapport des Marrakchis à leur festival ?

Ils l’aiment beaucoup. Ils veulent y aller puisqu’ils viennent nous voir pour les invitations. Cela veut dire qu’ils sont passionnés pour ce plus grand festival culturel dans la ville. Nous avons repris en 1999 et nous avons eu un rayonnement international. Marrakech est donc une locomotive.

Un dernier mot…

Le FNAP est unique en son genre au Maroc. C’est un festival qui appartient à tous. J’aimerais bien que tout le monde éprouve le même sentiment à l’égard de ce patrimoine et qu’il y ait des contributions pour le développer par le soutien. J’appelle les grandes sociétés à s’occuper un peu du festival pour encourager les artistes qui portent notre patrimoine.

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