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Questions à Hajib, chanteur marocain «J’appelle à une documentation audiovisuelle et écrite de l’art de l’«Aïta»»

© D.R

Il porte bien son nom. Il est «Farhane» (joyeux) de son vrai nom de famille, même quand il se livre au jeu des questions-réponses. Dans cet entretien, la star marocaine Hajib appréciée par un large public pour ses performances en «Aïta» livre sa recette pour la pérennité de cet art.

ALM : Vous ne cessez d’appeler à documenter l’art de l’«Aïta». D’après vous, quelle serait la démarche à adopter dans ce sens ?
Hajib : Tout d’abord, les artistes de cet art ont tendance à se faire rares. A leur tour, les textes sont devenus quasiment introuvables. A un moment, il n’y aura plus que quelques personnes qui n’en mémorisent que des extraits. C’est pour cela que j’appelle à une documentation audiovisuelle et écrite en présence des artistes encore en vie pour en faire un enregistrement. Aussi, il faut qu’il y ait une analyse et un décodage parce que quand cet art est relayé, il y a deux ou trois personnes qui y sont en jeu pour faire un échange avant d’arriver à un but. C’est comme dans un match de foot. Donc, pour que cet art nous livre ses secrets, il faut qu’il y ait un groupe d’artistes, accompagnés d’autres y compris des femmes, qui s’échangent la performance avant de se fixer sur un résultat. C’est ainsi que la documentation doit avoir lieu. C’est un travail qui doit être fait par le ministère de la culture pour qu’il soit gardé dans les bibliothèques.

Cet art est toujours l’apanage d’un certain public. Pourriez-vous nous dire comment le faire aimer à tous?
Plutôt, l’«Aïta» est prédominante. Mais rares sont ceux qui comprennent cet art. Tout le monde l’écoute et pense que ce sont juste des paroles conçues par un artiste. Aussi, le chanteur, qui performe, exalte une époque marquée par l’absence de médias. Et c’est l’«Aïta» qui, par ses cheikhs et cheikhates, relayait des informations. C’est pour cela que cet art n’a pas eu beaucoup d’innovations. Par la même occasion, rares sont ceux qui comprennent le sens des paroles de cet art aussi parce qu’il englobe des termes relayés à une époque déterminée. Ces termes doivent être décodés et analysés. C’est pourquoi, dans cette documentation, les personnes qui y ont des connaissances en recherche sur cet art doivent interpréter de tout texte et toute phrase poétique en déterminant son époque, lieu et temps de création, y compris le changement musical qui y a été apporté, ainsi que les personnes impliquées dans cette «Aïta».

Un certain public apprécie cet art sans en connaître aussi les genres comme Al Marsawi ou autres. Quelle serait, selon vous, la meilleure manière pour faire la différence entre cette multitude? Et quels sont les vrais genres d’«Al Aïta» ?
C’est cette documentation dont je parle qui révèlera cette multiplicité de styles. De plus, le caractère audiovisuel et écrit de cette documentation permettra de sauvegarder cette multiplicité. En tout, il y a l’«Aïta» du genre «Abdi», «Marsaoui», «El Haouzi», «Zaâri», «Lkhouribgui» et «Lmellali». Il y a aussi l’«Aïta» filalia, jeblia et Lhrizia. Il y en a beaucoup. J’en ai parlé dans les émissions « Naghmawatay » (Des notes et un thé) et «Noujoum Al Aoula» (Les stars de la première chaîne), ainsi que dans l’émission « Al Aïta Zamanai » que j’ai animée moi-même. J’y ai même fait la différence entre la chanson de moussems et l’«Aïta», ainsi que mes propres compositions autour de cet art. Pour rappel, quand une œuvre dépasse une trentaine d’années, elle relève désormais du patrimoine.

Vous dédiez pratiquement chaque année un concert à l’ « Aïta » dans la ville de Rabat. Pourriez-vous nous donner un avant-goût de la nouvelle édition ?
La prochaine fois, nous envisageons, avec mon équipe de préparation, notamment Mohamed Saoudi qui en est l’organisateur, une édition exceptionnelle. Avant le concert, il faut qu’il y ait des conférences pour mieux définir au moins deux ou trois genres de cet art. Nous espérons avoir un soutien pour toucher même à cinq ou six genres de l’ « Aïta ». Nous voulons que ce concert ne soit plus l’apanage de la ville de Rabat. Si, par exemple, Casablanca est une ville connue pour cet art, nous pouvons bien partir à Fès ou Meknès pour mieux y présenter ces genres.

L’art de l’ « Aïta » demeure l’apanage d’un certain public surtout à Rabat où tout le monde n’a pas d’appétence pour ce style. Comment faire en sorte, selon vous, pour qu’il soit apprécié un peu de tous ?
Ce sont ces soirées dont je viens de vous parler que nous pouvons bien organiser dans d’autres villes pour les mélomanes qui désirent savourer l’ « Aïta ». Et ce n’est pas tout ! Chaque année, nous essayons d’avoir un ou des apprenti (s) en cet art pour porter le flambeau.

Auriez-vous d’autres projets ?
Cet événement de « Laylat Al Aïta » fait partie de mes projets. Pour rappel, la première édition était organisée en 2019 pour que la deuxième soit animée en 2023 pour des conjonctures liées à la Covid. Et encore, cette dernière soirée a été reportée pour décès de ma mère.

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