Culture

Saâdia Mekhfi : un filet et beaucoup de courage

© D.R

Attention à l’hameçon ! Saâdia Mekhfi est une femme et pourtant elle va à la pêche, pas pour le plaisir, mais pour subvenir aux besoins de sa petite famille. Chaque jour, à 6 h du matin, elle sort en mer dans sa barque traditionnelle pour pêcher et ne rentre au foyer qu’à 8 h 30 mn du soir. Parfois, elle reste 4 à 5 jours d’affilée en mer à la recherche du poisson. La tâche n’est pas de tout repos. Mais ce qui était le plus difficile pour Saâdia, c’était de faire accepter aussi bien à la société qu’à la délégation du ministère de la Pêche à Laâyoune qu’une femme soit capable, au même titre que tout homme, d’accomplir cette tâche. Perçue exclusivement comme un monde d’hommes, la pêche a été longtemps "interdite" aux femmes.  «J’ai commencé à travailler dans la pêche depuis les années 90. A cette époque, le délégué du ministère de la Pêche n’avait pas voulu me délivrer une carte de pêcheur. Il m’a dit que les femmes ne sont pas autorisées à travailler dans ce secteur. Pour subvenir aux besoins de ma famille, j’a été obligée de me déguiser en homme et de travailler clandestinement. Certaines personnes m’ont beaucoup aidée en m’accordant un emploi sur leurs bateaux», raconte-t-elle avec nostalgie. Et d’ajouter : «C’était difficile pour moi de me cacher comme si je faisais une chose honteuse. Un jour, j’ai décidé de faire face au problème. J’étais prête à aller jusqu’à Rabat pour recouvrer mon droit. Nous sommes tout de même dans un pays qui consacre la politique d’égalité entre les femmes et les hommes. C’était un parcours de combattant».
Mariée et mère de deux enfants, cette femme, chef de famille, a été contrainte, par la force des choses (son mari invalide souffre d’une maladie cardiaque), d’investir une activité essentiellement destinée aux hommes ; à savoir la pêche traditionnelle. «Je n’avais pas d’autre choix. Il fallait travailler pour subvenir aux besoins de mes enfants et de ma petite famille. Mon mari est très malade. Son état de santé ne lui permet pas de continuer son activité comme auparavant. Il a fallu que je prenne la relève», poursuit-elle.
Armée de son courage et du savoir-faire transmis par son mari, elle a réussi grâce au microcrédit à développer son activité. «J’ai mon propre bateau et trois personnes travaillent actuellement avec moi. Mon mari m’accompagne également en mer», se félicite Saâdia, qui a dû lutter ardemment pour se faire une place dans le monde de la pêche.
Elle a ainsi gagné le respect de ses proches et de son entourage et contribué à l’ouverture d’un secteur jadis monopolisé par la gent masculine. Récemment, elle s’est vu récompenser pour son effort constant par le prix de meilleur projet innovant lors de la compétition "Microentrepreneurship Awards 2006", organisée par PlaNet Finance Maroc et Citigroup. Lors de la remise du prix, toute l’assistance s’est levée par respect pour cette femme d’exception et l’a chaleureusement applaudie.

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