Le politologue le plus connu des Etats-Unis a quitté le monde des vivants. Samuel Huntington s’est éteint à l’âge de 81 ans, le 24 décembre, à Martha’s Vineyard dans le Massachusetts. Une nouvelle annoncée, samedi, par l’université de Harvard sur son site Internet. Il est l’un des auteurs dont la notoriété dépasse les frontières du pays de l’oncle Sam. Le politologue américain le plus célèbre au monde. Samuel Phillips Huntington était né le 18 avril 1927 à New York, d’un père éditeur et d’une mère écrivaine. Excellent étudiant, il décroche son diplôme à l’université de Yale. Il n’avait que 18 ans. Le politologue new-yorkais commence sa carrière d’enseignant à 23 ans à l’Université de Harvard. Université où il a travaillé pendant 58 ans. L’intellectuel américain est devenu célèbre par sa théorie contestée sur le choc des civilisations. Il avait publié en 1996 le «Choc des civilisations», un essai qui avait fait beaucoup parler de lui. Son ouvrage, qui est très vite devenu best-seller, est traduit dans 39 langues.
Samuel Huntington développa dans son ouvrage «Le choc des civilisations» (The clash of civilizations), l’idée que dans le monde de l’après-guerre froide, les conflits violents n’opposeraient plus les Etats-nations mais naîtraient des différences culturelles et religieuses entre les grandes civilisations.
«Je reste persuadé que les identités et les antagonismes culturels ne joueront pas seulement un rôle, mais un rôle majeur dans les relations entre Etats», disait-il en 2007 dans une interview à Islamica Magazine. Samuel Huntington analyse les tensions qui existent entre les différentes civilisations qu’il perçoit. L’occidentale, l’africaine, l’islamique, la chrétienne orthodoxe, l’hindoue, la chinoise, la latine, la japonaise…
La géopolitique serait alors constituée des relations entre chacun de ces blocs civilisationnels. Au cours de sa carrière, Samuel Huntington a publié 17 ouvrages et 90 articles scientifiques. Deux chiffres qui témoignent de sa longue expérience. Ses livres les plus connus dans le monde francophone sont «Le choc des civilisations», objet de nombreuses controverses et «Qui sommes-nous ? ». «Chacun de ses livres a eu un impact», a déclaré l’économiste Henry Rosovski, son ami depuis près de 60 ans. «Ils font partie de notre vocabulaire», a-t-il ajouté. Selon Nancy Arkelyan Huntington, l’épouse de Samuel Huntington, avec qui il était marié depuis 51 ans, celui-ci s’était toujours placé en politique du côté démocrate. Pour Timothy Colton, professeur à Harvard et spécialiste de la Russie, Samuel Huntington était ancré dans la vie américaine et dans son identité, mais il a fini par s’attaquer à des questions beaucoup plus larges. Samuel Huntington avait pour disciple Francis Fukuyama. Philosophe et économiste américain d’origine japonaise. Il est connu pour sa thèse de la fin de l’histoire ou le triomphe de la démocratie libérale. En décembre 2001, la revue Atlantic Monthly fait de Samuel Huntington un «prophète» dont les prédictions ont été terriblement validées par les attentats du 11 septembre. George W. Bush l’invita à donner une conférence à la Maison-Blanche sur le thème du «Choc des civilisations». L’administration américaine trouve en effet chez lui le concept dont elle a besoin pour justifier sa réponse aux attentats contre le World Trade Center à New York.
La thèse d’Huntington, déjà assez simple, va être réduite à un affrontement entre le Bien et le Mal…
Huntington disparaît au moment où s’achève l’ère Bush, l’homme de la «croisade» contre le terrorisme islamiste. L’auteur de la thèse du choc des civilisations quitte notre monde. Sa théorie connaîtra-t-elle le même sort ?