Gouvernements, organismes internationaux et autres se découvrent des penchants de mécènes et affluent, des propositions de soutien plein les bras.
C’est la télévision qui aura le plus illustré le changement intervenu dans la vie des Afghans après le départ des Taliban. Des images, jadis bannies, ont fait leur entrée dans des foyers désormais bombardés d’ondes. Une première depuis des années: des femmes, sans burka, présentaient des programmes, sonnant véritablement le glas de la «tyrannie» talibane.
Des pays comme l’Iran, l’Inde, la Turquie, le Japon, l’Allemagne et la Chine, s’engouffrent dans la brèche. Ils affluent pour offrir leurs services, essentiellement pour la création de programmes, à la télévision de Kaboul. Abdul Afiz, nouveau patron de la télévision nationale, peut être heureux. Même L’UNESCO débloque 35.000 dollars déstinés à former le personnel technique.
Autre «mécène», Silvio Berlusconi, le hier-encore-controversé chef du gouvernement Italien, offre rien de moins qu’une station de télévision complète, lorsqu’il rencontre à Rome, en décembre, le chef du gouvernement provisoire Hamid Karzai. «Nous attendons que les transports s’améliorent afin de pouvoir assurer l’acheminement de cette station», a indiqué A. Afiz, qui dit n’être pas très sûr d’avoir bien compris ce que le responsable italien a promis.
L’offre de l’ancien magnat de la presse italienne reste en effet très vague. Une chose est certaine, l’Italie, comme tous les autres pays, ne manquera pas de s’inscrire dans cet élan de soutien, tant les enjeux stratégiques sont de taille, après la guerre de plusieurs semaines, qui a concentré sur le peuple afghan peut-être plus de bombes et autres armes de destruction, que jamais auparavant dans l’histoire.
En attendant, Abdul Afiz et son équipe continuent de faire des miracles au quotidien avec du matériel largement dépassé, pour la majeure partie détourné lors de la prise de pouvoir des taliban en 1996. La télévision, tout comme le cinéma, avaient été bannis sous le régime des fondamentalistes Taliban qui avaient leur propre interprétation de la charia. Après le départ des Taliban de Kaboul, dans la nuit du 12 au 13 novembre, la télévision aghane avait repris ses émissions présentées par une femme.
Aujourd’hui, la télévision est devenue la principale source de distraction pour les habitants de Kaboul, seule ville d’Afghanistan où les émissions sont captées. Même si les programmes ne sont diffusés pour le moment qu’entre 18H00 et 21H00, l’enjeu est énorme. Pour un début, les images arrosent déjà quelque 500.000 téléspectateurs. Mais cette barre ne devrait pas tarder à être dépassée. A. Afiz rêve même d’une transmission ininterrompue suivie par les Afghans du pays tout entier. Reste à récolter des fonds. Une entreprise qui ne s’annonce pas trop difficile, vu que les bailleurs se bousculent au portillon. En attendant, Afiz continue de gérer sa boîte en équilibriste évoluant sans manne publicitaire.
Mais il est vrai qu’il peut puiser dans la subvention du ministère de la Défense. Une générosité monnayée par l’obligation de diffuser des émissions sur les exploits militaires de l’Alliance du nord dans leurs combats contre les Taliban.
Côté infrastructure, les antennes ont été pour la plupart détruites par les bombardement alliés. A. Afiz ne devrait pas tarder à présenter la facture aux Américains.
«Quand ils seront moins occupés à rechercher Oussama ben Laden!» confie-t-il.