ALM : L’interconnexion et l’accès sont au cœur de ce projet de loi. Concrètement, quelles seront les retombées pour le secteur des télécoms et les abonnés?
Azdine El Mountassir Billah : L’intégration de la notion d’accès vise à consolider la concurrence dans le secteur des télécommunications en permettant aux opérateurs l’accès à l’ensemble des ressources et/ou services dont disposent les opérateurs tiers. Cela se traduira par de grandes possibilités d’offres de services diversifiés, innovants et compétitifs. L’ANRT assurera le suivi de la mise en œuvre et pourra, le cas échéant, imposer aux opérateurs concernés les modalités techniques et tarifaires de l’accès, afin de préserver les conditions d’une concurrence loyale au bénéfice des utilisateurs.
L’accent est également mis sur le partage des infrastructures entre opérateurs. Est-ce que cela veut dire que certains services comme l’ADSL commercialisés uniquement par Maroc Telecom seront bientôt proposés par les autres opérateurs en vertu de la nouvelle loi ?
Le partage des infrastructures est une mesure prévue par la loi n°24-96 relative à la poste et aux télécommunications. Toutefois, le nouveau projet de loi vise à en renforcer les mécanismes et à en clarifier le cadre d’application. Le partage doit se faire dans des conditions techniques et financières objectives garantissant les conditions d’une concurrence loyale. Il concerne toutes les infrastructures aussi bien mobiles que fixes dont disposent les opérateurs. A travers cette obligation, tous les opérateurs peuvent, dans la limite de l’objet de leur licence, répliquer les services offerts par les autres opérateurs, y compris l’ADSL, et ce, conformément pour ce cas précis, à l’offre de dégroupage de la boucle locale en paire de cuivre, préalablement approuvée par l’ANRT.
Quels sont les enjeux pour vous en tant qu’autorité de régulation ainsi que pour les opérateurs télécoms ?
La révision législative en cours est l’une des principales recommandations de la Note d’orientation générale pour le développement du secteur des télécommunications pour la période 2009-2013 (NOG 2013). L’adaptation du cadre juridique constitue une mesure primordiale pour la mise en œuvre des actions de régulation et de développement du secteur. Cette révision vise essentiellement à adapter le cadre législatif et réglementaire du secteur aux évolutions du marché et des technologies et de pallier les insuffisances relevées. A travers cette révision, l’ANRT sera dotée des moyens nécessaires lui permettant de jouer pleinement les missions qui lui ont été assignées en fournissant les conditions adéquates pour un développement effectif et harmonieux du secteur. Enfin pour les opérateurs, l’enjeu est celui d’agir dans un cadre cohérent et similaire au contexte d’évolution des opérateurs internationaux, avec une définition bien précise de leurs droits et obligations.
Plus concrètement, quelle sera la valeur ajoutée pour les abonnés ?
Une grande partie des nouvelles dispositions a trait à la transparence vis-à-vis des abonnés et à l’information des clients sur les caractéristiques de leurs produits et sur la couverture de leurs réseaux. D’autres mesures sont également prévues concernant la révision, par l’ANRT, des contrats d’abonnement aux services. Aussi et à travers cette révision, les conditions de mise en œuvre des leviers de régulation, tels que le partage d’infrastructure ou l’itinérance nationale, seront bien définies et détaillées. Le consommateur final bénéficiera sans doute des retombées de ces leviers et de l’instauration de conditions renforcées de concurrence entre les opérateurs.
Faut-il s’attendre à de nouveaux services dont la commercialisation sera possible grâce aux nouvelles dispositions du projet de loi ?
Grâce au cadre juridique instauré depuis 1997 par les pouvoirs publics pour la libéralisation du secteur, notre pays a connu un développement harmonieux et soutenu des marchés des télécommunications. Les opérateurs n’ont pas hésité à déployer des réseaux de dernière génération, qui leur ont permis d’offrir des services innovants et compétitifs.
Aujourd’hui, le marché marocain des télécommunications se situe à un niveau comparable avec les pays développés en ce qui concerne l’offre de services. Cette tendance se poursuivra certainement pour répondre aux attentes d’une clientèle toujours en quête de nouveautés et de services performants.
Le Conseil de gouvernement vient d’adopter le projet de loi 121-12 modifiant et complétant la loi 24-96 relative aux télécommunications. Le directeur général de l’ANRT, Azdine El Mountassir Billah, revient dans cet entretien sur les grandes nouveautés introduites par le nouveau texte.