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Collectif «Maroc des émergences» : Les initiatives locales comme actions de développement

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«Il faut un maillon intermédiaire à l’échelle du territoire pour favoriser le dialogue avec le politique et créer une logique pour la solution des problèmes des populations vulnérables».

«Y a-t-il un contrat social au Maroc ?». Le questionnement légitime posé, jeudi, par Driss Khrouz, professeur en sciences économiques et membre du comité de pilotage du projet «Maroc des Emergences», lors d’un webinaire initié par un Collectif portant le même nom de ce projet, est toujours d’actualité. La réponse à cette interrogation est visiblement positive à son sens. «Il y a une question de contrat social (NDLR : Acte par lequel une personne se réduit aux contraintes politiques de l’Etat) au Maroc», estime-t-il.

L’initiative de l’Etat toujours attendue

M. Khrouz, qui rappelle que le travail dans le cadre de ce Collectif de compétences, dont il fait partie, est entamé depuis trois ans, ne manque pas de diagnostiquer les évolutions et les écueils dans le pays. «Les investissements publics ont augmenté et les infrastructures se sont développées, mais la croissance n’est pas au rendez-vous», avance-t-il. Pour illustrer ses propos, il conduit, entre autres, l’exemple du chômage et de l’école qui a régressé. «Il y a une différence entre progrès et perceptions. Au lieu d’aller vers l’homogénéisation des acteurs, il y a plutôt un paradoxe de la multiplicité des acteurs. Tout le monde attend l’Etat», lance l’intervenant.

Comprendre pour avancer

Pour lui, il est impossible d’avancer sans comprendre et analyser. Comme il le précise, il y a des «nœuds». Dans ce sens, il cite le problème de «confiance». «Les jeunes n’aspirent qu’à partir», enchaîne-t-il en guise de commentaire. Par l’occasion, il soulève la dichotomie entre la numérisation et la réalité constatée pour légaliser des papiers. L’intervenant pointe également du doigt la qualification des ressources humaines. «Nous avons fait des réformes de l’école, mais celle-ci n’avance pas alors qu’elle dispose de 20% du budget de l’Etat. Ce n’est pas un problème de financement. Il y a plutôt un problème à gérer», martèle M. Khrouz. Aussi, l’économie marocaine ne crée pas, comme il l’indique, de l’emploi. «Le développement économique, ce n’est pas un miracle. Il ne consiste pas en les meilleures technologies. C’est plutôt un apprentissage collectif», enchaîne-t-il.

Et les émergences dans tout cela ?

Elles sont, quant à elles, un phénomène qui, à son sens, montre des réussites «fantastiques mais qui ne sont pas des exceptions». Comme il le met en avant, ce phénomène a besoin d’être connu, accompagné, développé et analysé pour que les acteurs notoires puissent en tirer le coût en termes de reddition des comptes et de participation des populations. «Cela pourrait régler des problèmes à travers la participation des femmes et des territoires locaux. Ainsi, les uns apprennent des autres», ajoute-t-il pour illustrer la démarche du Collectif par rapport aux émergences. «Ces expériences ne doivent pas être isolées. A partir d’elles, nous testons la subsidiarité des pouvoirs locaux. Les émergences, ce sont des pépinières de réflexion que nous mettons à disposition pour libérer les énergies. Encore faut-il que le politique suive», tranche-t-il.

De son côté, Ahmed Benabadji, consultant en stratégie, cofondateur du Transilience Institute, cofondateur de l’association Open Village et Open Schools, définit les émergences par «la prise en charge d’un besoin par une communauté». «Mais il faut des acteurs qui soient des leaders, des institutions locales ou des personnes voire des catalyseurs qui, par un leadership, facilitent et ouvrent un nouveau possible», détaille-t-il. L’intervenant met également en valeur le rôle des «facilitateurs qui renforcent les capacités au niveau local». «Ce qui importe c’est la co-construction à l’intérieur de la communauté. C’est une émergence qui est un processus qui donne le résultat et qui ne s’arrête pas», poursuit-il. Pour sa part, Amine Belemlih, consultant-chercheur en Intelligence collective et transformation des territoires, cofondateur du Transilience Institute, estime que le développement local peut être aussi l’affaire des entreprises voire des coopératives.

«Il faut un maillon intermédiaire à l’échelle du territoire pour favoriser le dialogue avec le politique et créer une logique pour la solution des problèmes des populations vulnérables», tempère-t-il en faisant valoir l’esprit du Collectif, qui compte comme partenaires le centre de recherche de HEM (Economia) et l’association Les Citoyens ainsi que la fondation Friedrich Ebert Stiftung et Oxfam Maroc. Le tout étant couronné par un «policy paper» basé, selon Manal El Abboubi, enseignante-chercheuse, Université Mohammed V, chercheuse associée, Economia-HEM, coordinatrice de la chaire Innovations sociales des entreprises, sur une méthodologie de «recherche-action». «L’idée est de co-construire la recherche d’un objectif commun», enchaîne-t-elle.

Le résultat étant un «policy paper» qui se veut de fournir un cadre d’analyse pour d’autres projets. «Les émergences sont destinées à un développement socio-économique durable et inclusif», ajoute-t-elle. Egalement de la partie, Xavier Duvauchelle, représentant pays d’Oxfam, estime que «le Maroc des émergences c’est valoriser, mettre en lumière l’autre, prendre en compte des initiatives locales et donner la parole à ceux qui ne l’ont pas». Le tout en mettant en avant «un modèle où les jeunes, les femmes, les personnes en situation de handicap sont acteurs de leur propre développement». «Il est temps pour ce modèle de développement», conclut-il.

 

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