Sur le terrain commercial, le torchon brûle à nouveau entre les Etats-Unis et la Chine. Les Américains ont officiellement accusé Pékin devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) de ne pas sanctionner assez le piratage.
Washington a déposé, mardi 10 avril, deux plaintes contre la Chine pour violation de la propriété intellectuelle et pour les obstacles posés par Pékin à la distribution de musiques, films et livres étrangers.
Techniquement, les Etats-Unis ont demandé des consultations sur ces sujets. Une telle demande constitue la première étape du dépôt de plainte. Si, dans les 60 jours, les deux parties n’ont pas résolu leur différend, les Etats-Unis pourront alors transmettre le dossier à la commission de règlement des conflits.
La démarche de Washington avait déjà été annoncée lundi par la représentante au commerce Américaine, Susan Schwab, qui avait estimé que «le piratage et la contrefaçon en Chine restaient à des niveaux inacceptables».
Pourtant, Pékin a renforcé sa législation en matière de lutte contre le piratage. Les contrefaçons de disques audio et vidéo dépassant 500 exemplaires sont désormais passibles de poursuites judiciaires, au lieu de 1 000 auparavant, et celles excédant 2 500 copies, seront punies par sept ans de prison. Les Etats-Unis, eux, jugent ces efforts insuffisants.
En réaction à cette double plainte, Pékin a prédit une dégradation des relations avec les Etats-Unis. «La Chine regrette (cette décision) et est profondément insatisfaite», a indiqué un porte-parole du ministère du Commerce, Wang Xinpei.
«Cette action va sérieusement porter préjudice à la coopération que les deux parties ont déjà bâtie dans ce domaine et avoir une influence négative sur les relations commerciales bilatérales», a-t-il ajouté dans un communiqué.
Le respect de la propriété intellectuelle et l’ouverture du marché chinois sont deux des points d’achoppement majeurs entre les deux pays, avec la valeur du yuan, que les Etats-Unis jugent fortement sous-évalué, et leur déficit commercial abyssal, qu’il lie à cette sous-évaluation.
Pour certains analystes, leur action représente toutefois une escalade dans les relations régulièrement parsemées de menaces et pressions, comme lorsque fin mars Washington a décidé d’imposer des sanctions sur les importations chinoises de papier couché.
Hasard du calendrier, les douanes chinoises ont publié mardi les chiffres du commerce montrant que l’explosion de l’excédent commercial chinois s’était poursuivie au premier trimestre 2007, doublant quasiment sur un an (46,44 milliards de dollars, contre 23,31 milliards en janvier-mars 2006), même si l’excédent a rétréci en mars. «Ces chiffres sont publiés alors que la stratégie américaine semble être entrée dans une nouvelle phase avec la plainte à l’OMC et les sanctions (sur le papier couché) qui, clairement, font monter les enchères dans le jeu commercial sino-américain», a estimé mardi Stephen Green, économiste de Standard Chartered, cité par l’AFP. Il considère que Washington mène aussi une stratégie risquée à manier la carotte et le bâton, pouvant «miner la volonté de Pékin à agir».