Généralités : les différends collectifs du travail sont soumis à la procédure de conciliation et d’arbitrage dont les dispositions sont prévues par les articles 549 et suivants du code du travail. Ces dispositions ne sont pas applicables à toutes les entreprises et à tous les conflits.
Le règlement pacifique des conflits du travail s’impose aux entreprises agricoles, commerciales et industrielles et dans les professions libérales. Il s’applique également aux entreprises publiques ou privées de l’Etat à caractère industriel, commercial ou agricole. Il s’applique aux entreprises soumises à des conventions collectives du travail en respectant les dispositions de celles-ci. Ce règlement n’est pas applicable aux entreprises exerçant une activité traditionnelle ou artisanale.
L’article 550 du code du travail stipule que tous les différends collectifs sont réglés conformément à la procédure de conciliation et d’arbitrage sans, pour autant, donner une définition au caractère « collectif » des conflits. Cette définition est d’une utilité certaine au regard de la procédure civile, car le conflit à caractère collectif est soustrait à la compétence des tribunaux sociaux.
Il nous paraît évident que deux conditions sont nécessaires pour qu’un conflit ait un caractère collectif, elles concernent l’objet du conflit et les parties au conflit.
Objet du conflit
Est considéré comme conflit ayant un caractère collectif celui dont l’origine met en jeu un intérêt, lui-même, à caractère collectif, telle que la décision unilatérale de l’employeur de diminuer les heures de travail, entraînant ainsi une baisse générale de salaires, ou de supprimer, pour des raisons de conjonctures économiques, une prime ayant pris la force d’un usage. Sans doute, un conflit qui concerne l’interprétation d’une des clauses de la convention collective, à laquelle l’entreprise et ses salariés sont soumis, est considéré comme ayant un caractère collectif.
Par contre, ne peut constituer un différend collectif le fait de licencier un salarié, même lorsque celui-ci est délégué du personnel de l’entreprise, l’intervention du syndicat auquel il appartient ne donne pas le caractère collectif au conflit. Cependant, le licenciement individuel peut engendrer un conflit collectif lorsque le motif l’ayant justifié menace les droits collectifs des salariés ou lorsqu’il est lié directement aux fonctions du délégué licencié. Ainsi le tracé de la frontière qui sépare les litiges collectifs du travail des différends individuels n’est pas toujours net.
Parties au conflit
Le conflit, pour être collectif, doit concerner un groupement de salariés, même lorsque ceux-ci ne sont pas regroupés sous la forme d’une formation syndicale dotée de la personnalité juridique.
Un conflit, provoqué par un syndicat auquel les salariés ne s’associent pas, ne peut être considéré comme collectif et encore moins un conflit tout court, le litige lui-même n’ayant aucune existence réelle.
Un conflit n’est pas forcément collectif parce qu’il touche les intérêts de l’ensemble des salariés. Ainsi, lorsque des employés sollicitent la reconnaissance des avantages prévus par une convention collective, l’aspect individuel du litige l’emporte.
Est considéré comme conflit ayant un caractère collectif celui dont l’une des parties est un ou plusieurs employeurs, ou un groupement professionnel d’employeurs ayant pour but de défendre les intérêts de ses membres.
Enfin, contrairement à une opinion répandue, le déclenchement d’une grève ne suffit pas pour considérer le litige comme ayant un caractère collectif.
Conciliation
Procédure de conciliation
Tous les différends collectifs du travail sont réglés conformément à la procédure de conciliation et d’arbitrage avant tout lock-out ou grève.
Cette mesure a lieu dans les conditions prévues par les articles 549 et suivants du code du travail, les conventions collectives ou les accords d’entreprises. Les salariés qui s’associent à une grève n’ayant pas respecté la procédure de conciliation se rendent coupables d’une faute grave justifiant des mesures disciplinaires de la part de l’employeur, allant jusqu’au licenciement; les dirigeants syndicaux ayant orchestré le mouvement en violation de la loi ou de la convention collective s’exposent à la même sanction; leur syndicat est responsable, il peut être condamné, par voie de justice, à la réparation de tous préjudices (matériel et moral) subis par l’employeur. Inversement, l’employeur qui, à l’occasion ou suite à un litige collectif, procède à l’arrêt subit de son activité, en guise de refus ou de protestation, est responsable d’un acte commis en violation de la loi, et s’expose à des condamnations au profit de ses salariés.
1- Au niveau de l’inspection du travail
En vertu de l’article 552-2, lorsque le conflit oppose une seule entreprise à ses salariés, il est signalé à l’inspecteur du travail, chef de la circonscription dans laquelle se trouve l’établissement, par la partie la plus diligente ou à l’initiative de l’inspecteur, en vue de rechercher une solution à l’amiable du litige. Cette démarche, plutôt informelle, est sanctionnée par un procès-verbal établi par l’inspecteur du travail, chef de la circonscription, dans lequel seront consignés les points du litige, les points ayant fait l’objet d’un accord et les points de désaccord ou l’échec total de la démarche, la présence ou l’absence de l’une ou des deux parties et, éventuellement, la signature du procès-verbal par l’une ou les deux parties, le tout conformément à l’article 555 du code du travail. Une copie du procès-verbal est délivrée ou notifiée à chacune des deux parties.
En cas d’échec total ou partiel de la démarche, la partie la plus diligente saisit la commission régionale de conciliation dans un délai de trois jours par le moyen d’une requête précisant les points sur lesquels porte le litige.
Lorsque la commission n’est saisie par aucune partie, celle-ci est saisie par l’inspecteur du travail chef de la circonscription
2- Au niveau de la commission provinciale
Lorsque le conflit oppose plusieurs entreprises, situées dans la même préfecture ou province, et leurs salariés, il est signalé à la commission provinciale d’enquête et de conciliation par la partie la plus diligente, celle-ci peut se saisir du litige sur sa propre initiative.
En vertu de l’article 557 du code du travail, la commission dénommée « Commission provinciale d’enquête et de conciliation » est instituée auprès de chaque préfecture ou province, elle est présidée par le gouverneur et composée, à égalité, de représentants de l’administration, des organisations professionnelles des employeurs et des organisations syndicales des salariés les plus représentatives.
Le président de la commission convoque les parties par télégramme dans un délai ne dépassant pas 48 heures, à compter de la date de sa saisine.
En principe, les parties doivent comparaître en personne, mais, en cas de force majeure, elles peuvent se faire représenter par une personne habilitée à conclure un accord de conciliation. Chacune des parties peut présenter un mémoire écrit comportant ses observations.
Une copie doit être communiquée à l’autre partie. La commission tente de régler le conflit dans un délai ne dépassant pas 6 jours à compter de la date de sa saisie.
La commission dispose de toutes les attributions pour enquêter sur la situation des entreprises et de leurs salariés, ordonner toutes enquêtes et investigations auprès des entreprises et de leurs salariés, demander aux employeurs de produire tous documents ou renseignements susceptibles d’éclairer la commission et, enfin, de se faire assister par des experts dont l’aide lui paraît utile.
En vertu de l’article 563 du code du travail, un procès-verbal est dressé à l’issue des séances de conciliation où seront consignés : l’accord total, l’accord partiel ou la non-conciliation des parties et, le cas échéant, la non-comparution des parties. Le procès-verbal est signé par le président et les parties, une copie doit être délivrée à chacune des parties ou leur être notifiée en cas de non-comparution.
Conformément aux dispositions de l’article 563-3, si aucun accord n’intervient au niveau de la commission, le conflit est soumis directement à la « Commission nationale d’enquête et de conciliation » dans un délai de 3 jours.
3 – An niveau de la commission nationale
Lorsque les parties au conflit ne parviennent à aucun accord devant la « commission provinciale d’enquête et de conciliation » ou lorsque le conflit oppose à leurs salariés, plusieurs entreprises situées dans plusieurs préfectures ou provinces, ou intéresse l’ensemble du territoire national, la « commission nationale d’enquête et de conciliation » s’en saisit, sans délai, en vue de rechercher une solution à l’amiable au litige.
La commission est présidée par le ministre chargé du travail et composée, à égalité, de représentants de l’administration, des organisations professionnelles des employeurs et des organisations syndicales des salariés les plus représentatives. Les modalités de fonctionnement de la « commission provinciale d’enquête et de conciliation » sont applicables à la « commission nationale d’enquête et de conciliation.
Arbitage
L’insuccès de la procédure de conciliation du au fait que les parties ne parviennent à aucun accord, ou que des désaccords subsistent sur certains points ou, encore, que les parties, ou l’une d’elles, n’ont pas comparu, conduit au recours à la procédure d’arbitrage prévue aux articles 567 et suivants du code du travail. L’insuccès, partiel ou total, de la commission provinciale ou nationale d’enquête et de conciliation, ainsi que la non-comparution des parties concernées ou l’une d’elles, est constaté par un procès-verbal dressé par le président de la commission. Le président de la commission soumet le dossier avec le procès-verbal à l’arbitre choisi par les parties concernées, dans les 48 heures suivant l’établissement du procès-verbal.
L’arbitre, choisi d’un commun accord par les parties concernées, doit figurer sur la liste d’arbitres établie par arrêté du ministre chargé du travail.
Si les parties ne parviennent à aucun accord sur le choix de l’arbitre, celui-ci est désigné par le ministre chargé du travail, dans un délai ne dépassant pas 48 heures.
L’arbitre doit convoquer les parties dans un délai de 4 jours à partir de la date à laquelle il a reçu sa mission.
Les parties doivent se présenter en personne ou, en cas de force majeure, se faire représenter par un représentant légal.
L’arbitre dispose, pour les besoins de sa mission, de toutes les attributions dont disposent les commissions provinciale et nationale d’enquête et de conciliation prévues à l’article 561 du code du travail. Les parties concernées doivent offrir à l’arbitre toutes facilités, produire tous documents et fournir tous renseignements relatifs au litige.
L’arbitre ne statue que sur les questions consignées au procès-verbal, constatant la non-conciliation, ainsi que sur les faits survenus après la rédaction du procès-verbal, mais résultant du différend.
La sentence de l’arbitre est rendue conformément aux règles de droit sur le conflit, et aux dispositions législatives et réglementaires ou contractuelles.
L’arbitre dispose, pour rendre sa sentence, d’un délai de 4 jours à compter de la comparution des parties. La sentence doit être motivée et notifiée aux parties, par lettre recommandée dans les 24 heures suivant son prononcé.