CouvertureEconomieUne

Démantèlement d’avions, un potentiel inexploité faute de modèle

Le Royaume pourrait devenir précurseur dans cette activité à l'échelle du continent africain. (D.R)

Foncier, durée de contrats, certifications…. les nouvelles pistes pour le décollage d’une activité qui tarde à prendre son envol

Aéronautique.»

L’installation d’un écosystème spécialisé dans le démantèlement et le recyclage du matériel des avions fait toujours rêver les responsables. Ces derniers semblent avoir déjà tiré les conclusions des premières tentatives peu concluantes et promettent du nouveau pour bientôt. Premières indiscrétions.

Alors qu’il est déjà un grand opérateur connu et reconnu à l’échelle mondiale dans l’industrie aéronautique, le Maroc veut étendre son activité à un autre domaine, à savoir le le démantèlement et le recyclage du matériel des avions en fin de vie. Depuis 2014, les autorités publiques et les investisseurs privés étrangers comptent installer un écosystème spécialisé dans ses activités mais en vain. Aujourd’hui, les responsables sont déterminés à faire aboutir les projets restés depuis longtemps dans les tiroirs. Pour ce faire, un travail est en cours pour séduire les investisseurs potentiels. Concrètement, les responsables ont identifié les obstacles qui ont rendu l’aboutissement des projets difficile. Plusieurs axes de travail ont été identifiés. Il s’agit notamment du foncier, des durée de contrats, de la réalisation des infrastructures et les certifications pour opérer dans ce domaine.

Amélioration du cadre légal

L’un des obstacles majeurs cités par le ministère de l’industrie et du commerce devant l’implantation d’une activité de recyclage des avions concerne le foncier. Pour le département de tutelle, les premières tentatives de projets ont buté sur un obstacle majeur d’ordre légal. En effet, la loi sur les aéroports en vigueur actuellement fixe une durée maximale de 10 ans pour les contrats de concessions aux opérateurs privés. Une durée renouvelable une seule fois selon la même législation en vigueur au pays. Une contrainte qui a déjà découragé les investisseurs intéressés peu enclins à s’engager dans un tel projet sur une période qui ne dépasse par une dizaine d’années. Les responsables travaillent actuellement sur l’amélioration de ce cadre légal entourant les activités dans les aéroports pour rendre la législation plus flexible et encourager ainsi les acteurs potentiels à s’implanter au Royaume. Mais les responsables veulent aller encore plus loin. Car un autre obstacle a été relevé lors des premières tentatives concernant cette fois-ci les infrastructures.

ONDA bailleur

L’installation d’un écosystème spécialisé dans le démantèlement et le recyclage du matériel des avions suppose la réalisation d’infrastructures importantes et bien évidemment coûteuses. Il s’agit notamment de pistes d’atterrissage pour les avions, des hangars et ateliers pour le démantèlement et démontage des engins aéronautiques. Le hic, c’est que les investisseurs ne veulent pas réaliser ce genre d’infrastructures sur un foncier qui ne leur appartient pas. Face à cette situation, les responsables ont opté pour une alternative. L’orientation suivie actuellement concerne la réalisation des infrastructures par l’Office national des aéroports (ONDA). Ce dernier va par la suite louer les constructions par un contrat aux investisseurs potentiels. L’autre axe de travail des autorités concerne l’obtention de certificats internationaux pour pouvoir opérer dans le domaine. Selon Ryad Mezzour, il faut des certifications de pointe pour démanteler un matériel sur les avions puis réinstaller ce même matériel dans un autre engin. Un travail est donc en cours pour réaliser des progrès en la matière. Ces efforts consentis pourraient enfin permettre l’installation de démantèlement d’avions au Maroc.

Sites potentiels

Plusieurs régions du pays pourraient connaître l’installation de ces activités principalement dans l’Oriental mais également dans le sud-est du Royaume. Il s’agit notamment des villes d’Oujda, Bouarfa, Errachidia et Guelmim. Le pays pourrait devenir un précurseur à l’échelle de l’Afrique. Cette fois-ci sera-t-elle la bonne? Les responsables semblent en tout cas déterminés. Pour rappel, la dernière tentative remonte à 2021. L’Office national des aéroports avait lancé un appel d’offres international, ouvert entre le 15 avril et le 8 juin 2021 pour la sélection d’une entreprise qui assurera, dans le cadre d’un contrat, la conception, la construction, le financement et l’exploitation d’un centre de stockage, de recyclage des aéronefs. Pour attirer un plus grand nombre de prétendants, les autorités avaient proposé de faire bénéficier l’entreprise adjudicataire du domaine public pour une durée de 10 ans renouvelable avec un terrain nu d’une superficie minimale de 10 hectares avec une possibilité de monter jusqu’à 54 ha. La zone retenue par les responsables était celle se trouvant sous douane de l’aéroport Oujda Angad pour l’implémentation de cette activité. La mise en œuvre de ce projet devat se dérouler en plusieurs phases. Selon le cahier des charges, l’une des premières étapes d’une durée de 16 mois à compter de la date d’attribution du marché concernera l’aménagement du terrain abritant les activités précitées et la construction de voies et hangars pour stationner les avions sans oublier les travaux voirie et réseaux divers ainsi que l’aménagement des bureaux et autres dépendances nécessaires. Le choix des autorités d’implanter cette activité à proximité d’un aéroport n’est pas fortuit. Les installations de démantèlement d’avions sont construites sur des sites aéroportuaires, ce qui permet aux avions d’arriver par leurs propres moyens. Les moteurs de l’avion sont ainsi retirés afin d’être revendus pour réutilisation tout comme d’autres éléments comme l’avionique, les trains d’atterrissage, les câbles ou même les sièges. Même les débris de l’avion pourraient être recyclés pour extraire l’aluminium ainsi que d’autres métaux.

Métiers mondiaux

Depuis des années, l’aéronautique fait partie des métiers mondiaux du Royaume. Des poids lourds de la construction des avions sont ainsi présents directement ou indirectement. Le développement rapide de ce secteur a été porté dans ce sens par des opérateurs de grande envergure à l’instar de EADS, Boeing, Safran. Il faut préciser que deux composantes industrielles constituent les fondamentaux du secteur aéronautique mondial. Il s’agit de la construction aéronautique qui comprend tous les établissements fabriquant à titre principal des cellules d’avions, des moteurs et des équipements spécifiques pour avions et de la sous-traitance prise en charge par les établissements réalisant pour le compte d’un ou plusieurs industriels du secteur aéronautique, selon un cahier des charges préétabli, la fabrication de pièces, de produits d’éléments d’ensembles ou de sous-ensembles. A ces deux activités s’ajoutent depuis quelques années le recyclage des avions en fin de vie qui a de beaux jours devant lui dans le monde. Le Maroc compte sérieusement se tailler une part dans le marché mondial. Il faut dire que le Royaume s’oriente à diversifier ses activités dans le domaine. Après avoir acquis une notoriété sur le marché mondial dans la fabrication et la conception des pièces des avions, le pays s’est lancé récemment dans la maintenance des avions civils et militaires. A cela s’ajouterait probablement l’activité du recyclage. Les responsable croisent déjà les doigts… «

Dates clés de l’industrie aéronautique

Avril 2021.
Appel d’offres. L’Office national des aéroports lance un appel d’offres international pour la sélection d’une entreprise qui assurera, dans le cadre d’un contrat, la conception, la construction, le financement et l’exploitation d’un centre de stockage, de recyclage des aéronefs.

Avril 2022.
Partenariat. Sabca et Sabena Aerospace appartenant au Groupe Blueberry, et l’entreprise américaine Lockheed Martin signent un partenariat mettant en œuvre la joint-venture marocaine Maintenance Aero Maroc (MAM).

Novembre 2022.
Assemblage. Le Royaume connait le lancement d’une activité pionnière dans le secteur consistant en la fabrication et l’assemblage quasi complet de la structure d’un aéronef.

Novembre 2022.
Inauguration. Sabca et Sabena Engineering, inaugurent une nouvelle installation de 16.000 m² avec un investissement de plus de 180 millions de dirhams (17 millions d’euros).

Janvier 2023.
Incitations. Annonce par le ministre de l’industrie et du commerce au Parlement d’une série de nouvelles mesures pour l’incitation des investisseurs à choisir le Maroc pour l’installation d’activité de démantèlement des avions.

Plusieurs tentatives ont été effectuées par l’ONDA afin d’installer un écosystème de démantèlement des avions au Maroc. (D.R)
[box style= »default » box_color= »#c00c0e » title_color= »#eed3e1″ radius= »5″]

Recyclage

Stéréotype. Contrairement à l’idée reçue, l’activité du recyclage des avions n’est pas dangereuse ou polluante. Au contraire, l’Union européenne s’est dotée d’un programme spécial il y a quelques années. Selon les responsables de l’UE, «les avions ont généralement une durée de vie allant de 20 à 30 ans. Une fois qu’ils arrivent en fin de vie, les avions de transport de passagers sont soit réaffectés au fret, soit stockés dans des «cimetières» d’avions ou dans les aéroports, souvent au détriment de la sécurité. En l’absence d’u programme de recyclage, la fin de vie des avions se déroulait d’une manière un peu chaotique au terme de laquelle près de 45% du poids de l’appareil partait à la décharge». Avec le recyclage des avions, le Maroc va renforcer ses activités dans le domaine de l’aéronautique.

[/box]
Un appel d’offres international a été lancé en 2021 pour la sélection d’une entreprise qui assurera, dans le cadre d’un contrat, la conception, la construction, le financement et l’exploitation d’un centre de stockage et de recyclage des aéronefs. (D.R)
[box style= »default » box_color= »#c00c0e » title_color= »#eed3e1″ radius= »5″]

Industrie aéronautique
Développement. L’industrie aéronautique connaît un développement important et rapide grâce aux directives royales, ce qui a permis de faire de notre pays une destination pour les investisseurs dans l’industrie aéronautique, notre pays se classant au 15ème rang en termes d’investissements au niveau international. Les exportations du secteur ont également enregistré une hausse de 40% à fin novembre 2022 par rapport à la même période en 2021. Le gouvernement travaille à accélérer le rythme de développement industriel du secteur, en renforçant l’intégration locale, en développant les chaînes de production et les activités prioritaires et en développant de nouveaux systèmes technologiques pour renforcer la position de notre pays en tant que destination de premier plan pour le secteur mondial de l’aéronautique en s’appuyant sur les jeunes compétences marocaines. Le Maroc dispose de diverses plateformes industrielles de choix, notamment dans le secteur de l’aéronautique. Pendant la crise sanitaire, le secteur aéronautique marocain a été résilient, notamment avec le lancement de plusieurs projets traduisant la confiance des industriels internationaux dans cet écosystème.

[/box]

Verbatims

Ryad Mezzour, ministre de l’industrie et du commerce

«L’industrie marocaine est structurée autour de 54 écosystèmes industriels, où l’automobile et l’aéronautique occupent une place importante».

Mikail Houari, président d’Airbus Afrique et Moyen-Orient

«Le Royaume fabrique déjà des pièces pour tous les avions commerciaux d’Airbus, y compris l’A220. Cet appareil est le dernier ajout à notre gamme de produits et par conséquent à notre empreinte industrielle au Maroc».

Stéphane Burton, CEO d’Orizio

«Le Royaume du Maroc a mis en place une politique favorisant le développement de l’écosystème aéronautique sur son sol. Le Groupe Orizio a fait du Royaume du Maroc l’un des principaux sites de ses activités industrielles».

Articles similaires

ActualitéUne

Le Chef du gouvernement rencontre à Shanghai le Président du groupe SUNRISE, leader mondial du textile

Le Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, a rencontré, samedi à Shanghai, Lei...

SociétéUne

Reconstruction et réhabilitation de 42 centres de santé dans les régions affectées par le séisme

Dans le cadre des Hautes Orientations Royales et des efforts nationaux déployés...

ActualitéUne

Un total de 45.015 tentatives d’émigration irrégulière avortées depuis début 2024 grâce à la résilience des dispositifs marocains

Un total de 45.015 tentatives d’émigration irrégulière ont été avortées depuis le...

ActualitéUne

La nouvelle rentrée marque l’extension du modèle « Ecole Pionnière » et le lancement du « Collège Pionnier », souligne M. Benmoussa

La nouvelle rentrée scolaire marque le début de l’extension du modèle « Ecole...